Film de guerre sorti en 1998 et réalisé par Steven Spielberg, Il faut sauver le soldat Ryan a été récompensé à de nombreuses reprises, notamment à la cérémonie des Oscars, en remportant 5 statuettes, dont celle du meilleur réalisateur.
Ce long-métrage de presque 3 heures met en scène Tom Hanks, Tom Sizemore, ainsi que Matt Damon ou encore Vin Diesel.
Synopsis
6 juin 1944. Après des mois d'attente, l'opération Overlord commence et le débarquement en Normandie a lieu. John Miller, capitaine d'une compagnie de Rangers est dans la première vague à débarquer à Omaha Beach.
Après une lutte sanglante et acharnée pour le contrôle de la plage, les Américains prennent pied en France et parviennent à repousser les Allemands hors des côtes.
Cependant après cette difficile victoire, une mission encore plus délicate est confiée à Miller.
Il doit en effet partir à la recherche d'un soldat parachuté derrière les lignes ennemies : James Ryan, afin de le ramener au pays.
En effet, Ryan a perdu ses trois frères à la guerre et le chef d'état-major des armées lui-même, Georges Marshall, désire ramener ce quatrième frère en vie à sa mère.
Commence alors pour Miller et ses hommes une longue quête en territoire ennemi. Mais alors que l'ennemi se fait de plus en plus présent, des questions divisent la troupe du capitaine.
La vie d'un seul homme mérite-elle qu'on lui sacrifie plusieurs autres ? D'autant plus que personne ne sait si Ryan est toujours en vie.
Analyse
Il faut sauver le soldat Ryan marque le spectateur d'entrée de jeu par une reconstitution hyper-réaliste du débarquement allié à Omaha beach. La reconstitution est quasi-historique et le réalisme est poussé à l'extrême, sombrant parfois dans l'horreur et le gore. Néanmoins, comment reprocher à un film de guerre, relatant un évènement historique, de se montrer vrai, bien que jugé cru à sa sortie.
Le résultat est là malgré tout et le spectateur est rapidement immergé dans cette bataille qui semble désespérée. On ressent clairement le coupe-gorge dans lequel se débat l'armée américaine et la caméra parfois subjective renforce encore plus cet aspect. Le mixage et la bande sonore (récompensés aux Oscars) sont d'une grande qualité et la déflagration des obus et des cartouches finissent de nous faire revivre cette bataille acharnée.
Spielberg réussit un coup de maître en tournant l'une des scènes étant considérée comme la meilleure scène de bataille du cinéma par de nombreux magazines. Plus d'un millier de figurants, le double en armes et un total de 11 millions de dollars auront été nécessaires pour tourner ce début de film qui dure pas loin de trente minutes, ce qui pour une introduction s'avère particulièrement long.
Le réalisateur n'a pas précipité sa mise en scène et laisse donc tout le temps nécessaire à son film pour se mettre en place, lui conférant ainsi un grand réalisme et un contexte marquant.
La photographie du film jouit d'une grande qualité, notamment lors de la scène du débarquement. L'image semble assez épurée, très peu de couleurs vives composent la scène. Seul le sang se démarque et cela renforce l'aspect visuel de la mise en scène. La luminosité est assez faible, le débarquement ayant eu lieu très tôt le matin. L'esthétique est très convaincante et Janusz Kaminski sera oscarisé pour son travail à la photographie. À noter également l'utilisation de caméras sous-marines qui enrichissent le visuel du film et le côté réaliste, montrant ainsi que de nombreux soldats sont morts noyés, ceux-ci ne pouvant débarquer sur la plage, ont alors essayé de nager jusqu'à elle, devant supporter la charge trop lourde de leurs équipements ou les mitrailleuses allemandes.
Au niveau des acteurs, on peut noter une grande qualité dans l'interprétation de Tom Hanks qui incarne un capitaine tout ce qu'il y a de plus humain au niveau des émotions. On ne tombe pas dans le cliché de l'officier américain à la grosse voix et au cigare. Il en va de même pour l'ensemble des acteurs constituant la troupe de Miller.
Chacun possède son propre caractère, plutôt bien mis en avant, et ceux-ci rendent bien compte des tensions qui peuvent se développer dans un groupe durant l'exécution d'une mission controversée. Néanmoins ils parviennent à rester solidaires dans l'adversité sans surjouer et stéréotyper le militaire américain en héros.
Tom Hanks est donc bien entouré, principalement par Tom Sizemore qui une fois de plus endosse l'uniforme pour le rôle de dur à cuir qui lui va si bien et par Matt Damon qui, un an après son Will Hunting, passe devant la caméra pour Spielberg, dans le rôle d'un jeune soldat courageux, sans trop en faire cependant. Il rend bien compte de l'esprit de camaraderie qui peut naître entre soldats et son interprétation est bien dosée.
Malgré quelques erreurs techniques (parfois volontaires), Spielberg nous offre une fois de plus un grand moment de cinéma et évoque l'une des plus grandes pages de notre histoire avec réalisme et une certaine neutralité. Il ne cherche pas à enfoncer les soldats allemands et à valoriser l'armée américaine. Il se contente de filmer une histoire, certes plus d'un point de vue que de l'autre, mais sans perdre de vue son objectif principal, qui n'est pas d'encenser les victoires alliées, mais de raconter l'histoire d'un groupe de soldats durant la seconde guerre mondiale et d'en profiter ainsi pour traiter ces évènements qui ont marqué l'histoire.
Un grand film donc, pour trois heures d'immersion dans un des conflits les plus célèbres du vingtième siècle. De plus, venant du réalisateur américain, la bande originale n'est pas en reste, puisque c'est John Williams qui s'y colle pour nous offrir une nouvelle fois une musique sublime qui épouse parfaitement le film. Même si le côté symphonique reste courant dans les films de guerre, l'essentiel est que l'effet soit là et que les morceaux s'accordent harmonieusement avec les différentes scènes et c'est le cas ici et plus encore.
Williams alterne les morceaux très instrumentalisés et symphoniques pour renforcer les moments forts du films et des morceaux plus intimistes pour mettre en avant des moments plus calmes ou qui font monter la tension de l'intrigue. Rien de très novateur en somme, mais la recette marche tellement bien.
Pour conclure, Saving Private Ryan est un excellent film, maintes fois récompensé. Avec un large budget de presque 90 millions de dollars, Spielberg a réussi à rendre son long-métrage grandiose et authentique.
À voir, et je dirais même plus, à voir sur écran géant (comme si c'était facile :p)
Trailler
OST - Omaha beach
OST - Finding pvt. Ryan
OST - Approaching The Enemy
OST - Tu es partout (Edith Piaf)
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mercredi 30 mars 2011
lundi 28 mars 2011
Black Swan by Jim
Un peu plus de deux ans après The Wrestler, Darren Aronofsky signe son retour avec Black Swan, un thriller psychologique – voire psychanalytique- inspiré du film "Le locataire" de Polanski et de la nouvelle "le Double" de Dostoïevski.
Nina (Natalie Portman), une ballerine de la New York City Ballet Company, commence à perdre la tête lorsqu'une nouvelle danseuse fraîchement arrivée de San Francisco, Lily (Mila Kunis), débarque dans la troupe. La paranoïa s'installe de façon plus intense et plus effrayante lorsqu'elle décroche – pour une raison un peu nébuleuse – le rôle de la Reine des Cygnes dans la nouvelle version du Lac des Cygnes de Thomas (Vincent Cassel).
On a beaucoup insisté – que ce soit dans les reviews ou dans la bande-annonce du film – sur le fait que Black Swan est avant tout une représentation du "double" de "l'autre", des deux faces d'une même personne. Bien entendu, cette vision tient la route : Nina, le personnage principal, est rongée par l'apparition de Lily dans sa vie, à un point frôlant l'obsession morbide et la jalousie.
En devenant la Reine des Cygnes, Nina intègre parfaitement son rôle mentalement, puisqu'elle s'imagine être réellement un cygne, le Cygne Blanc, effrayé par sa rivale noire.
Le film joue énormément sur les contrastes, d'abord sur les zones d'ombres et de lumières : dans la première scène (qui est en fait un rêve), Nina danse en tant que Cygne Blanc, seule, puis, avec Von Rothbart, le sorcier qui l'a transformée en cygne. La scène est faite uniquement d'ombre (noire) et de lumière (blanche), entre les deux tendances, l'une étant le Cygne Blanc, l'autre le Cygne Noir.
Les autres nuances du film sont surtout entre Nina et Lily ; l'une est virginale, pure, vêtue de rose, de blanc, de couleurs douces et pastel, alors que l'autre est passionnée, libre, et habillée de noir.
Des symboles récurrents de ce thème du double/du contraste sont les miroirs : ils apparaissent à de nombreux moments importants du film, pour avertir le spectateur qu'on passe à une scène fantasmée ou non.
Passé un certain moment du film, la grande question apparaît : est-ce que Lily existe réellement ou est-elle le fruit de l'imagination (ou de l'exagération) de Nina?
Cette conception du double dans le film est certes intéressante, mais ne suffit pas à parler de l'histoire, parce qu'au final, ce n'est pas cet aspect dichotomique – très souvent utilisé dans le cinéma par exemple dans Fight Club – qui domine toute l'oeuvre : ce qui transcende le plus, c'est le caractère psychanalytique de l'histoire.
Quand Freud créa la psychanalyse, pour expliquer de nombreux comportements, il recourut aux mythes, qu'il revisita. Black Swan est une relecture de l'histoire du Lac des Cygnes, transposée à l'histoire de Nina : le Cygne Blanc et le prince s'aiment, mais le Cygne Noir, qui ressemble à s'y méprendre au Cygne Blanc, séduit le prince, pour empêcher le Cygne Blanc d'être sauvé par l'amour du prince. Au final, le Cygne Blanc se suicide.
Mais la psychanalyse (du temps de Freud) n'est pas qu'un ensemble de mythes, c'est également une multitude de symboles à interpréter. Et Andres Heinz, Mark Heyman, John McLaughlin et Darren Aronofsky s'en donnent à coeur joie : il y a deux grilles d'interprétation du film : la première est la psychose grandissante d'une jeune femme surmenée, exaltée et rendue folle par le rôle dont elle rêvait, et la deuxième interprétation est la perte de la virginité d'une jeune femme. Le film est entièrement codé sur base de cet évènement : la seule chose que Nina attend, c'est sa sexualité.
Dès le début du film, Nina apparaît comme asexuée : elle est maniaque du contrôle, vit avec sa mère, dort dans une chambre blanche et rose remplie de peluches. Dans la première scène du film où elle rêve de danser le Lac des Cygnes, il y a un sous-entendu sur le désir de la vierge de rencontrer l'homme, le démon, le sorcier, qui va lui enlever sa part de Cygne Blanc, d'innocence.
La seule passion à laquelle s'adonne Nina (et encore, avec une modération virginale), c'est la danse. Après l'avoir engagée pour jouer la Reine des Cygnes, Thomas lui fait même ce reproche : elle n'est capable que d'interpréter le Cygne Blanc, il n'arrive pas à la voir en Cygne Noir (qui symbolise la sensualité, la sexualité). La jeune femme commence à se consumer de l'intérieur, à tomber dans la folie, dans l'attente de l'acte sexuel, qui devrait la libérer, la transformer en Cygne Noir. Et tout au long du film, les signes apparaissent : elle connaît les préliminaires, fantasme sur l'acte, se prépare entièrement pour ce dernier, et attend, n'attend que ça. Bien sûr, la dernière scène du film symbolise parfaitement le passage à l'acte : Nina perd son innocence, sa virginité, son duvet de petit Cygne Blanc, et se transforme en Cygne Noir. Et bien sûr, comme dans toute perte d'hymen, il y a du sang.
Savez-vous que lorsqu'il composait le Lac des Cygnes, Tchaïkovski réprimait ses tendances homosexuelles et qu'on peut objectivement considérer que cette oeuvre parle des désirs interdits, tabous?
Dès la première scène où Nina aperçoit Lily, on peut comprendre qu'il ne s'agit pas que de jalousie, de haine, d'envie, mais également d'un désir foudroyant, fulgurant. Nina désire être Lily, la posséder, la pénétrer, se faire dévorer par elle. Un insatiable appétit pour le Cygne Noir. Le Cygne Blanc veut devenir le Cygne Noir, ne faire plus qu'un avec lui. C'est par Lily que la libido s'empare de Nina.
Outre le symbole de la virginité qu'on aspire à perdre, il y a l'attirance envers quelqu'un du même sexe qu'on essaye à tout prix de refouler. Ce refoulement s'exprime dans la jalousie, dans la peur que Nina éprouve vis-à-vis de Lily.
Black Swan est (peut-être) un clin d'oeil à Hollywood : au début du film, Beth (jouée par Winona Ryder) est la star, la vedette de la troupe : son visage est sur les affiches qui peuplent les murs de la New York City Ballet Company. Après la nomination de Nina dans le rôle de la Reine des Cygnes, Beth est remerciée par Thomas et doit prendre sa retraite à la fin de l'année, ce qui ne se passe pas sans encombre. L'ombre de Beth ne plane plus très longtemps puisqu'elle a un accident de voiture qui la propulse à l'hôpital. Nina, en véritable admiratrice de Beth, est touchée par la déchéance de la femme à qui elle s'identifiait.
Winona Ryder, il y a vingt ans, était une star : son visage était sur toutes les affiches.
Depuis qu'elle a eu, il y a un peu moins de dix ans, des problèmes de cleptomanie, c'est comme si elle n'existait plus pour Hollywood. Dans Black Swan, ce n'est pas la faute d'un trouble psychologique si Beth est rayée de la liste des étoiles, c'est simplement parce qu'elle est "trop vieille", qu'elle "approche de la ménopause" selon quelques mauvaises langues. À Hollywood, les actrices doivent rester jeunes et belles, parce qu'une fois qu'elles sont vieilles, il n'y a plus rien pour elles. Et même si les exceptions existent – Meryl Streep, Annette Bening, pour ne citer qu'elles – il est rare qu'une actrice puisse persister dans des rôles intéressants, dignes d'elle.
Darren Aronofsky a commencé à envisager Black Swan, en 2000. Et pourtant, la production du film ne s'est pas lancée avant 2008-2009. Si Black Swan a eu besoin d'une telle maturation, c'est dans un souci du détail, si précieux à Aronofsky. En plus, Natalie Portman s'est entraînée pendant cinq mois, à raison de six jours par semaine, pendant cinq heures, pour nous faire croire qu'elle pourrait être une vraie ballerine : le résultat est étincelant sur la pellicule : l'actrice, en plus d'être une Nina effrayée/effrayante est une ballerine gracieuse.
Black Swan est un film dans la lignée de Pi (le thème de la paranoïa, des saignements) et de The Wrestler (l'abandon de tout au profit de son art) : les films d'Aronofsky parlent souvent du fait de se sacrifier pour ce qui nous anime, que ce soit bon ou mauvais : dans Requiem for a Dream, les protagonistes se bousillent pour la drogue, dans the Fountain, Tommy ne vit plus que pour trouver un remède pour sauver sa femme plutôt que d'accepter sa mort et de passer quelques derniers moments avec elle. Dans Black Swan, Nina se laisse porter par la perspective de la représentation finale qui importe plus que tout, même si elle peut y laisser sa santé mentale, physique, son âme.
La presse a souvent évoqué le fait que Black Swan est un versant féminin de The Wrestler, ce qui n'est pas faux, mais qu'il faut nuancer : dans Black Swan, Nina est au début de sa carrière, alors que dans The Wrestler, Randy "The Ram" est un has been qui traîne son passé derrière lui. L'autre grande différence entre les personnages principaux est la suivante : Black Swan est une histoire de déconstruction, de perte de soi tandis que dans The Wrestler, Randy est en reconstruction : il se recherche, veut recoller les pièces du puzzle de sa vie. Le véritable point commun entre les films est dans leur conclusion : pour son "art", on peut aller jusque dans la mort, la souffrance n'est qu'un moyen d'atteindre la perfection.
Aronofsky éclipse sa performance de réalisateur fort discutée – à cause de sa caméra qui rend épileptique - au profit de la prestation hallucinée/hallucinante de Natalie Portman : la jeune femme porte sur ses frêles épaules (néanmoins musclées pour le film) le film, transcende parfaitement la schizophrénie, les deux cygnes. Comme il a déjà été explicité dans cet article, Portman ne se contente pas d'offrir une performance d'actrice, mais aussi, une performance de danseuse (qui a été très peu doublée) : un déploiement de grâce, de charme, d'élégance.
Pour revenir à la réalisation d'Aronofsky, elle n'est certes pas agréable, puisque les images bougent à une vitesse ahurissante, ne laissant pas le temps de reprendre son souffle, mais, est néanmoins justifiée : Black Swan est une histoire de fantasme, de désir, de folie, de perte de soi : il est donc légitime que la caméra agisse comme une dératée.
Black Swan est une fable noire bourrée de symboles psychanalytiques, entre réalité et fantasme. Et le meilleur rôle de Natalie Portman.
trailer
Nina (Natalie Portman), une ballerine de la New York City Ballet Company, commence à perdre la tête lorsqu'une nouvelle danseuse fraîchement arrivée de San Francisco, Lily (Mila Kunis), débarque dans la troupe. La paranoïa s'installe de façon plus intense et plus effrayante lorsqu'elle décroche – pour une raison un peu nébuleuse – le rôle de la Reine des Cygnes dans la nouvelle version du Lac des Cygnes de Thomas (Vincent Cassel).
On a beaucoup insisté – que ce soit dans les reviews ou dans la bande-annonce du film – sur le fait que Black Swan est avant tout une représentation du "double" de "l'autre", des deux faces d'une même personne. Bien entendu, cette vision tient la route : Nina, le personnage principal, est rongée par l'apparition de Lily dans sa vie, à un point frôlant l'obsession morbide et la jalousie.
En devenant la Reine des Cygnes, Nina intègre parfaitement son rôle mentalement, puisqu'elle s'imagine être réellement un cygne, le Cygne Blanc, effrayé par sa rivale noire.
Le film joue énormément sur les contrastes, d'abord sur les zones d'ombres et de lumières : dans la première scène (qui est en fait un rêve), Nina danse en tant que Cygne Blanc, seule, puis, avec Von Rothbart, le sorcier qui l'a transformée en cygne. La scène est faite uniquement d'ombre (noire) et de lumière (blanche), entre les deux tendances, l'une étant le Cygne Blanc, l'autre le Cygne Noir.
Les autres nuances du film sont surtout entre Nina et Lily ; l'une est virginale, pure, vêtue de rose, de blanc, de couleurs douces et pastel, alors que l'autre est passionnée, libre, et habillée de noir.
Des symboles récurrents de ce thème du double/du contraste sont les miroirs : ils apparaissent à de nombreux moments importants du film, pour avertir le spectateur qu'on passe à une scène fantasmée ou non.
Passé un certain moment du film, la grande question apparaît : est-ce que Lily existe réellement ou est-elle le fruit de l'imagination (ou de l'exagération) de Nina?
Cette conception du double dans le film est certes intéressante, mais ne suffit pas à parler de l'histoire, parce qu'au final, ce n'est pas cet aspect dichotomique – très souvent utilisé dans le cinéma par exemple dans Fight Club – qui domine toute l'oeuvre : ce qui transcende le plus, c'est le caractère psychanalytique de l'histoire.
Quand Freud créa la psychanalyse, pour expliquer de nombreux comportements, il recourut aux mythes, qu'il revisita. Black Swan est une relecture de l'histoire du Lac des Cygnes, transposée à l'histoire de Nina : le Cygne Blanc et le prince s'aiment, mais le Cygne Noir, qui ressemble à s'y méprendre au Cygne Blanc, séduit le prince, pour empêcher le Cygne Blanc d'être sauvé par l'amour du prince. Au final, le Cygne Blanc se suicide.
Mais la psychanalyse (du temps de Freud) n'est pas qu'un ensemble de mythes, c'est également une multitude de symboles à interpréter. Et Andres Heinz, Mark Heyman, John McLaughlin et Darren Aronofsky s'en donnent à coeur joie : il y a deux grilles d'interprétation du film : la première est la psychose grandissante d'une jeune femme surmenée, exaltée et rendue folle par le rôle dont elle rêvait, et la deuxième interprétation est la perte de la virginité d'une jeune femme. Le film est entièrement codé sur base de cet évènement : la seule chose que Nina attend, c'est sa sexualité.
Dès le début du film, Nina apparaît comme asexuée : elle est maniaque du contrôle, vit avec sa mère, dort dans une chambre blanche et rose remplie de peluches. Dans la première scène du film où elle rêve de danser le Lac des Cygnes, il y a un sous-entendu sur le désir de la vierge de rencontrer l'homme, le démon, le sorcier, qui va lui enlever sa part de Cygne Blanc, d'innocence.
La seule passion à laquelle s'adonne Nina (et encore, avec une modération virginale), c'est la danse. Après l'avoir engagée pour jouer la Reine des Cygnes, Thomas lui fait même ce reproche : elle n'est capable que d'interpréter le Cygne Blanc, il n'arrive pas à la voir en Cygne Noir (qui symbolise la sensualité, la sexualité). La jeune femme commence à se consumer de l'intérieur, à tomber dans la folie, dans l'attente de l'acte sexuel, qui devrait la libérer, la transformer en Cygne Noir. Et tout au long du film, les signes apparaissent : elle connaît les préliminaires, fantasme sur l'acte, se prépare entièrement pour ce dernier, et attend, n'attend que ça. Bien sûr, la dernière scène du film symbolise parfaitement le passage à l'acte : Nina perd son innocence, sa virginité, son duvet de petit Cygne Blanc, et se transforme en Cygne Noir. Et bien sûr, comme dans toute perte d'hymen, il y a du sang.
Savez-vous que lorsqu'il composait le Lac des Cygnes, Tchaïkovski réprimait ses tendances homosexuelles et qu'on peut objectivement considérer que cette oeuvre parle des désirs interdits, tabous?
Dès la première scène où Nina aperçoit Lily, on peut comprendre qu'il ne s'agit pas que de jalousie, de haine, d'envie, mais également d'un désir foudroyant, fulgurant. Nina désire être Lily, la posséder, la pénétrer, se faire dévorer par elle. Un insatiable appétit pour le Cygne Noir. Le Cygne Blanc veut devenir le Cygne Noir, ne faire plus qu'un avec lui. C'est par Lily que la libido s'empare de Nina.
Outre le symbole de la virginité qu'on aspire à perdre, il y a l'attirance envers quelqu'un du même sexe qu'on essaye à tout prix de refouler. Ce refoulement s'exprime dans la jalousie, dans la peur que Nina éprouve vis-à-vis de Lily.
Black Swan est (peut-être) un clin d'oeil à Hollywood : au début du film, Beth (jouée par Winona Ryder) est la star, la vedette de la troupe : son visage est sur les affiches qui peuplent les murs de la New York City Ballet Company. Après la nomination de Nina dans le rôle de la Reine des Cygnes, Beth est remerciée par Thomas et doit prendre sa retraite à la fin de l'année, ce qui ne se passe pas sans encombre. L'ombre de Beth ne plane plus très longtemps puisqu'elle a un accident de voiture qui la propulse à l'hôpital. Nina, en véritable admiratrice de Beth, est touchée par la déchéance de la femme à qui elle s'identifiait.
Winona Ryder, il y a vingt ans, était une star : son visage était sur toutes les affiches.
Depuis qu'elle a eu, il y a un peu moins de dix ans, des problèmes de cleptomanie, c'est comme si elle n'existait plus pour Hollywood. Dans Black Swan, ce n'est pas la faute d'un trouble psychologique si Beth est rayée de la liste des étoiles, c'est simplement parce qu'elle est "trop vieille", qu'elle "approche de la ménopause" selon quelques mauvaises langues. À Hollywood, les actrices doivent rester jeunes et belles, parce qu'une fois qu'elles sont vieilles, il n'y a plus rien pour elles. Et même si les exceptions existent – Meryl Streep, Annette Bening, pour ne citer qu'elles – il est rare qu'une actrice puisse persister dans des rôles intéressants, dignes d'elle.
Darren Aronofsky a commencé à envisager Black Swan, en 2000. Et pourtant, la production du film ne s'est pas lancée avant 2008-2009. Si Black Swan a eu besoin d'une telle maturation, c'est dans un souci du détail, si précieux à Aronofsky. En plus, Natalie Portman s'est entraînée pendant cinq mois, à raison de six jours par semaine, pendant cinq heures, pour nous faire croire qu'elle pourrait être une vraie ballerine : le résultat est étincelant sur la pellicule : l'actrice, en plus d'être une Nina effrayée/effrayante est une ballerine gracieuse.
Black Swan est un film dans la lignée de Pi (le thème de la paranoïa, des saignements) et de The Wrestler (l'abandon de tout au profit de son art) : les films d'Aronofsky parlent souvent du fait de se sacrifier pour ce qui nous anime, que ce soit bon ou mauvais : dans Requiem for a Dream, les protagonistes se bousillent pour la drogue, dans the Fountain, Tommy ne vit plus que pour trouver un remède pour sauver sa femme plutôt que d'accepter sa mort et de passer quelques derniers moments avec elle. Dans Black Swan, Nina se laisse porter par la perspective de la représentation finale qui importe plus que tout, même si elle peut y laisser sa santé mentale, physique, son âme.
La presse a souvent évoqué le fait que Black Swan est un versant féminin de The Wrestler, ce qui n'est pas faux, mais qu'il faut nuancer : dans Black Swan, Nina est au début de sa carrière, alors que dans The Wrestler, Randy "The Ram" est un has been qui traîne son passé derrière lui. L'autre grande différence entre les personnages principaux est la suivante : Black Swan est une histoire de déconstruction, de perte de soi tandis que dans The Wrestler, Randy est en reconstruction : il se recherche, veut recoller les pièces du puzzle de sa vie. Le véritable point commun entre les films est dans leur conclusion : pour son "art", on peut aller jusque dans la mort, la souffrance n'est qu'un moyen d'atteindre la perfection.
Aronofsky éclipse sa performance de réalisateur fort discutée – à cause de sa caméra qui rend épileptique - au profit de la prestation hallucinée/hallucinante de Natalie Portman : la jeune femme porte sur ses frêles épaules (néanmoins musclées pour le film) le film, transcende parfaitement la schizophrénie, les deux cygnes. Comme il a déjà été explicité dans cet article, Portman ne se contente pas d'offrir une performance d'actrice, mais aussi, une performance de danseuse (qui a été très peu doublée) : un déploiement de grâce, de charme, d'élégance.
Pour revenir à la réalisation d'Aronofsky, elle n'est certes pas agréable, puisque les images bougent à une vitesse ahurissante, ne laissant pas le temps de reprendre son souffle, mais, est néanmoins justifiée : Black Swan est une histoire de fantasme, de désir, de folie, de perte de soi : il est donc légitime que la caméra agisse comme une dératée.
Black Swan est une fable noire bourrée de symboles psychanalytiques, entre réalité et fantasme. Et le meilleur rôle de Natalie Portman.
trailer
lundi 21 mars 2011
Le Vieux Fusil by Jim
Le cinéma français peut se targuer d’avoir dans ses grands classiques un film comme Le Vieux Fusil : une œuvre originale, portée par une interprétation magistrale d’un feu Philippe Noiret au comble de son talent, en 1975.
L’histoire du Vieux Fusil s’inspire d’un fait historique tragique qui a fait plus de six-cent victimes dans le Limousin, en 1944, à Oradour-sur-Glane. Sur base de ce fait, une histoire a été brodée pour permettre au personnage de Noiret de sombrer dans une vengeance aussi glacée que chronométrée : au nom de son amour perdu, Julien, l’homme que Noiret interprète, se prête au même jeu que les nazis : celui de la tuerie cruelle, silencieuse, en apparence arbitraire.
Si cette première approche de l’œuvre cinématographique peut sembler limitée à la modalité du meurtre méthodique, cela ne suffit pas à rendre compte du film, qui, dans son entièreté, respire, pourtant, l’amour, la passion, la tranquillité.
La réalisation mélancolique de Robert Enrico et le montage excellent d’Eva Zora forment un duo formidable qui laisse transparaître cette existence discrète et heureuse d'avant le drame qui renversera tout.
Soulignons aussi le couple touchant formé par Philippe Noiret et Romy Schneider, qui, incarnent à l’écran, avec grâce, et sensibilité les héros tragiques d'une histoire funeste.
Le Vieux Fusil n’est pas qu’une énième histoire sur un drame de la seconde guerre mondiale, et encore moins une représentation de la vengeance chez un homme ordinaire ébranlé par des circonstances extraordinaires : le film est une ode à l’amour, une ode à Clara, la femme que Julien aime de tout son cœur. Attention, le Vieux Fusil n’est nulle tirade niaise sur les pâquerettes : c’est l’histoire d’amour de deux personnes « banales » - dans le sens où il s’agit de deux humains qui aspirent à la paix, le calme, la vie tendre – , malheureusement séparées par des évènements dramatiques et barbares.
Il y a tant d’amour dans le film, que le spectateur se sent lui-même submergé par tant d’émotions, de souvenirs trempés de mélancolie. Il est naturel, sensé, que Julien et Clara seront séparés, leur couple déchiré par un deuil carnassier qui poussera Julien à retrouver le vieux fusil, son vieux fusil, qui lui servira à éliminer chacun des salauds qui l’a privé de sa femme. Dans ces moments de vengeance, de colère, de tristesse infinie, des instants du passé surgissent et rappellent à Julien pourquoi il aimait Clara, pourquoi sa peine est démesurée, et pourquoi il est juste d’annihiler ceux qui – sans s’en rendre compte – ont abattu les murs de son bonheur.
Le film est une succession de dualités : le présent et le passé se mélangent constamment ; on passe de l’un à l’autre, d’une façon logique et structurée qui permet au spectateur de ne pas être perdu dans l’histoire. Le passé se matérialise par l’introspection de Julien, dès le moment où il imagine ce qui a pu arriver à sa bien-aimée. Le massacre qui prend suite dérive donc de l’imagination de Julien : Julien se représente, difficilement, tragiquement, ce qui a pu arriver à Clara.
Et du cadavre de Clara éclot le souhait de retrouver le vieux fusil. Mais à chaque mouvement, à chaque étape franchie, à chaque nazi tué, Clara apparaît. L’observateur externe rencontre, au début du film, en chair et en os, vivante, étincelante, Clara, qui s’anime, et qui se perd sur un arrêt sur image horrifique, avant de se réanimer, sous nos yeux ébahis, en souvenir ensorcelant, rappelant que la vie vaut la peine d’être vécue. Même dans l’absurdité de la situation – le massacre du village, de sa fille, de Clara – les images qui hantent Julien suggère que sa vie valait la peine d’être vécue, d’être consommée, d’être exaltée : à chaque coup de feu, c’est une preuve de plus qu’on a pris à un homme ce qu’il avait de plus cher : l’amour, la tranquillité.
Le tranquillité disparaît le temps d’un instant dans la vie de Julien : le temps de prendre les armes. Et finalement, elle ne se dévoile que dans des séquences souvenirs. La première image et la dernière image du Vieux Fusil sont un clin d'oeil à cette tranquillité, à ce bonheur incommensurable qu'un homme a perdu : sa femme, sa fille, leur vie de douceur, de tendresse, de calme, de bonheur. Adieu le bonheur.
Un mot peut résumer le film : Passion. La passion qui commence le jour de la rencontre entre Clara et Julien, et qui prend toute sa signification quand Julien, après avoir pleuré, et cassé quelques objets se reprend et s'abandonne à la vengeance. Nous ne quittons jamais cette passion, cette flamme éternelle qui anime l'être de Julien. Même si le personnage semble nonchalant, il est véritablement exalté par ce coup de foudre qui l'a transformé en l'époux de Clara.
Le Vieux Fusil est un film qui emporte, qui ne laisse pas de répit, qui se savoure tristement. Certaines images sont très dures, et on ne peut qu'acclamer l'ingéniosité de l'équipe des effets spéciaux, qui, pour un film des années septante, a fait dans le réaliste.
Du point de vue des acteurs, Philippe Noiret fut couronné d'un César pour son interprétation magistrale, détonante de Julien. Romy Schneider est divine, son léger accent allemand lui donnant un petit charme exotique, alors que son visage est d'une beauté resplendissante, naturelle, douce. La voir à l'écran fend le coeur tant le personnage de Clara est une mine d'or, un mystère, une déchirure intérieure qui ne laisse pas indifférent. La cerise sur le gâteau de ce chef d'oeuvre du septième art est la musique inoubliable composée par François de Roubaix, entre mélancolie et bonheur. Une ode à la tranquillité loin de l'horreur de la guerre, à l'amour simple mais passionné, à la vie.
Parce que même si le Vieux Fusil est une histoire de morts, c'est également une ode à la vie, au plaisir que procure l'amour, l'être aimé.
Bande-annonce
L’histoire du Vieux Fusil s’inspire d’un fait historique tragique qui a fait plus de six-cent victimes dans le Limousin, en 1944, à Oradour-sur-Glane. Sur base de ce fait, une histoire a été brodée pour permettre au personnage de Noiret de sombrer dans une vengeance aussi glacée que chronométrée : au nom de son amour perdu, Julien, l’homme que Noiret interprète, se prête au même jeu que les nazis : celui de la tuerie cruelle, silencieuse, en apparence arbitraire.
Si cette première approche de l’œuvre cinématographique peut sembler limitée à la modalité du meurtre méthodique, cela ne suffit pas à rendre compte du film, qui, dans son entièreté, respire, pourtant, l’amour, la passion, la tranquillité.
La réalisation mélancolique de Robert Enrico et le montage excellent d’Eva Zora forment un duo formidable qui laisse transparaître cette existence discrète et heureuse d'avant le drame qui renversera tout.
Soulignons aussi le couple touchant formé par Philippe Noiret et Romy Schneider, qui, incarnent à l’écran, avec grâce, et sensibilité les héros tragiques d'une histoire funeste.
Le Vieux Fusil n’est pas qu’une énième histoire sur un drame de la seconde guerre mondiale, et encore moins une représentation de la vengeance chez un homme ordinaire ébranlé par des circonstances extraordinaires : le film est une ode à l’amour, une ode à Clara, la femme que Julien aime de tout son cœur. Attention, le Vieux Fusil n’est nulle tirade niaise sur les pâquerettes : c’est l’histoire d’amour de deux personnes « banales » - dans le sens où il s’agit de deux humains qui aspirent à la paix, le calme, la vie tendre – , malheureusement séparées par des évènements dramatiques et barbares.
Il y a tant d’amour dans le film, que le spectateur se sent lui-même submergé par tant d’émotions, de souvenirs trempés de mélancolie. Il est naturel, sensé, que Julien et Clara seront séparés, leur couple déchiré par un deuil carnassier qui poussera Julien à retrouver le vieux fusil, son vieux fusil, qui lui servira à éliminer chacun des salauds qui l’a privé de sa femme. Dans ces moments de vengeance, de colère, de tristesse infinie, des instants du passé surgissent et rappellent à Julien pourquoi il aimait Clara, pourquoi sa peine est démesurée, et pourquoi il est juste d’annihiler ceux qui – sans s’en rendre compte – ont abattu les murs de son bonheur.
Le film est une succession de dualités : le présent et le passé se mélangent constamment ; on passe de l’un à l’autre, d’une façon logique et structurée qui permet au spectateur de ne pas être perdu dans l’histoire. Le passé se matérialise par l’introspection de Julien, dès le moment où il imagine ce qui a pu arriver à sa bien-aimée. Le massacre qui prend suite dérive donc de l’imagination de Julien : Julien se représente, difficilement, tragiquement, ce qui a pu arriver à Clara.
Et du cadavre de Clara éclot le souhait de retrouver le vieux fusil. Mais à chaque mouvement, à chaque étape franchie, à chaque nazi tué, Clara apparaît. L’observateur externe rencontre, au début du film, en chair et en os, vivante, étincelante, Clara, qui s’anime, et qui se perd sur un arrêt sur image horrifique, avant de se réanimer, sous nos yeux ébahis, en souvenir ensorcelant, rappelant que la vie vaut la peine d’être vécue. Même dans l’absurdité de la situation – le massacre du village, de sa fille, de Clara – les images qui hantent Julien suggère que sa vie valait la peine d’être vécue, d’être consommée, d’être exaltée : à chaque coup de feu, c’est une preuve de plus qu’on a pris à un homme ce qu’il avait de plus cher : l’amour, la tranquillité.
Le tranquillité disparaît le temps d’un instant dans la vie de Julien : le temps de prendre les armes. Et finalement, elle ne se dévoile que dans des séquences souvenirs. La première image et la dernière image du Vieux Fusil sont un clin d'oeil à cette tranquillité, à ce bonheur incommensurable qu'un homme a perdu : sa femme, sa fille, leur vie de douceur, de tendresse, de calme, de bonheur. Adieu le bonheur.
Un mot peut résumer le film : Passion. La passion qui commence le jour de la rencontre entre Clara et Julien, et qui prend toute sa signification quand Julien, après avoir pleuré, et cassé quelques objets se reprend et s'abandonne à la vengeance. Nous ne quittons jamais cette passion, cette flamme éternelle qui anime l'être de Julien. Même si le personnage semble nonchalant, il est véritablement exalté par ce coup de foudre qui l'a transformé en l'époux de Clara.
Le Vieux Fusil est un film qui emporte, qui ne laisse pas de répit, qui se savoure tristement. Certaines images sont très dures, et on ne peut qu'acclamer l'ingéniosité de l'équipe des effets spéciaux, qui, pour un film des années septante, a fait dans le réaliste.
Du point de vue des acteurs, Philippe Noiret fut couronné d'un César pour son interprétation magistrale, détonante de Julien. Romy Schneider est divine, son léger accent allemand lui donnant un petit charme exotique, alors que son visage est d'une beauté resplendissante, naturelle, douce. La voir à l'écran fend le coeur tant le personnage de Clara est une mine d'or, un mystère, une déchirure intérieure qui ne laisse pas indifférent. La cerise sur le gâteau de ce chef d'oeuvre du septième art est la musique inoubliable composée par François de Roubaix, entre mélancolie et bonheur. Une ode à la tranquillité loin de l'horreur de la guerre, à l'amour simple mais passionné, à la vie.
Parce que même si le Vieux Fusil est une histoire de morts, c'est également une ode à la vie, au plaisir que procure l'amour, l'être aimé.
Bande-annonce
Du scénario au story-board jusqu'au montage... by Cowboy
Vous le savez, la vie d'un film commence bien avant que la caméra ne se mette à tourner, et s'achève (d'ailleurs, s'achève-t-elle vraiment ? ) bien après que le metteur en scène ne crie "Coupez ! ". D'une idée qui germe dans la tête de quelqu'un jusqu'à la projection face à un public, la construction d'un film passe par de multiples étapes qui vont vous être présentées ici même.
I. Pré-production
II. Tournage
III. Post-production
IV. Distribution
I. La première démarche pour l'élaboration d'un film concerne le scénariste. En effet, après avoir imaginé une histoire trépidante et sué sang et eau pour retranscrire ses idées sur sa machine à écrire (et ce n'est clairement pas donné à tout le monde), le pauvre bougre va devoir présenter un synopsis accompagné de notes d'intentions aux producteurs. Selon que le pouce du type qui a l'argent se dirige vers le haut ou le bas, le scénariste va alors devoir écrire, réécrire, remanier son script jusqu'à approbation définitive ; ou alors tenter sa chance ailleurs. L'élaboration d'un scénario complet et viable prend plusieurs mois, et peut parfois rencontrer moult difficultés avant d'arriver à terme (Blade Runner, par exemple). Si tout va bien, on va choisir un distributeur selon le public visé, le genre, et toutes les spécificités du film, et la préproduction va pouvoir commencer.
Le travail préalable à la préproduction, c'est le producteur qui s'en charge. Il trouve le réalisateur, le directeur de la photographie, les acteurs, tous les professionnels qui vont travailler sur le film, évalue le financement, loue des locaux et des studios. Pendant ce temps, on se charge du découpage technique du scénario : on le divise en scène, on estime la durée du film (ce qui influe sur les ressources de la production), on paramètre déjà les plans. Le but est d'assigner de façon claire chaque élément du scénario au corps de métiers qui lui convient, afin de limiter les imprévus.
Ensuite, le repérage fait intervenir le chef décorateur, et, souvent, le réalisateur lui-même. Et selon les endroits qui vont être choisis, on peut être amenés à modifier un scénario. Comme disait Bertrand Blier, de mémoire, il suffit que l'escalier soit à gauche dans la maison, au lieu d'être au centre, et ça change tout.
Ensuite vient la création du story-board, qui consiste à dessiner de manière plus ou moins sommaire les plans envisagés par le réalisateur. Certains demandent un story-board intégral du film, d'autres ne veulent que les plans les plus élaborés, et enfin, certains s'en passent complètement. Un bon story-board permet d'avoir une idée très précise du visuel du film, et impose un cadre et une certaine discipline au réalisateur. Mais il faut parfois s'en départir et profiter des évènements inattendus qui se produisent lors d'un tournage. Et là, le réalisateur est face à ses choix.
La synthèse de tout ce travail de préproduction aboutit à un plan de travail, souvent réalisé par le premier assistant-réalisateur. Il regroupe toutes les informations et indications recueillies pour chaque corps de métier ayant déjà officié ou qui va devoir travailler lors du tournage. Là encore, il s'agit d'éviter les problèmes de communication et les aléas du tournage qui pourraient plomber le film (petite pensée pour Terry Gilliam...). C'est aussi à ce moment que l'on décide dans quel ordre le film va être tourné.
II. On en arrive au tournage proprement dit, probablement la partie la plus connue. On va sur le lieu de tournage, en studio ou en décors naturels, on prépare les plans, les décors, l'acteur arrive, fait sa starlette, on utilise le clap (cf la superbe propa de Zuff sur le sujet), on crie action, on filme, on re-filme, jusqu'à ce que ce soit parfait, et paf. C'est dans la boite, "coupez". Ça peut se compliquer, si les acteurs font leurs fines bouches, s'ils meurent pendant le tournage, si le réalisateur menace les acteurs de castration, ou toute autre chose qui se retrouveront des années plus tard dans les biographies des étoiles d'Hollywood.
III. On en arrive au travail de post-production, vital s'il en est puisqu'il va aboutir à l'élaboration du master du film, duquel seront tirés les copies qui arriveront dans votre cinéma. Et pour cela, le monteur doit intervenir, et sélectionner, parmi les rushes accumulés pendant la production, ceux qui vont devenir le film. Occasionnellement, on peut faire des retakes, c'est-à-dire retourner filmer des scènes qui ne fonctionnent pas (ça se voit généralement dans la coiffure des acteurs). À ce stade-là, tout peut encore arriver, on peut complètement bouleverser le sens d'un film en ajoutant, supprimant, déplaçant et modifiant des scènes. C'est aussi là que le réalisateur peut se rendre compte qu'il a vendu son âme à une infâme société de production qui veut le montage final, et décider de ne pas signer son film (qui sera alors remplacé par Alan Smithee. En tout cas, c'était la tradition, avant...).
Mais de toute façon, le boulot n'est pas encore fini, car si l'on a l'image, il faut aussi le son. Et là, ce sont les bruiteurs, les compositeurs, le mixeur, et, dans certains cas, les acteurs qui reviennent faire de la post-synchronisation si les prises n'étaient pas audibles, qui vont se partager le travail.
Et puis il y a toute la partie consacrée aux effets spéciaux, afin de remplacer les toiles vertes par des paysages numériques, et essayer de donner un sens à une bande d'acteurs qui agitent leurs épées en plastique dans le vide.
Mixage final, mastering, et paf, on a notre bobine, prête à éprouver la rudesse d'une kinoton, à subir les affres du temps, à se consumer face à un public ébahi par la poésie indicible d'un message touchant passé à travers le prisme de ce média fantastique qu'est le cinéma. Sauf que ce n'est pas tout à fait fini. Il reste une étape.
IV. Oui, car c'est bien beau d'avoir fait un film, mais avant de rentrer chez soi pour attendre de savoir si on a rentabilisé notre film et si on va avoir un césar, et bien il faut le faire connaître, son bébé. Et donc, il faut le promotionner. Promouvoir. Et ce n'est pas une mince affaire. Outre les interviews à Télérama, il faut aussi aller dans les salons pour essayer d'exporter le film. Et parfois ça marche, comme Caro et Jeunet qui ont cartonné sans trop qu'on sache pourquoi aux States.
La distribution implique aussi une part de programmation : dégoter des réseaux pour distribuer le film. Parce que sinon, le film ne sortira pas dans un nombre suffisant de salles et ne rentrera pas dans ses frais, comme Scott Pilgrim. Mais heureusement, plus tard, il y aura la version DVD. Et si j'avais retenu mon cours d'économie des médias, je pourrais vous dire avec précision la part que la vente de tickets représente dans les recettes d'un film, mais non, alors je me contenterais de dire que de nos jours, cette fraction, sans être négligeable, ne constitue plus la façon principale de rembourser ceux qui ont financé le film.
Voilà, notre beau bébé est né, après moult péripéties, depuis son incubation dans les neurones du scénariste jusqu'aux négociations pour qu'il soit diffusé le plus largement possible. Après, savoir s'il va marcher ou pas, c'est une autre histoire.
PS : milles excuses, j'ai un peu mélangé le système Hollywoodien et le système à l'européenne. Il y a des différences. Tant pis.
I. Pré-production
II. Tournage
III. Post-production
IV. Distribution
I. La première démarche pour l'élaboration d'un film concerne le scénariste. En effet, après avoir imaginé une histoire trépidante et sué sang et eau pour retranscrire ses idées sur sa machine à écrire (et ce n'est clairement pas donné à tout le monde), le pauvre bougre va devoir présenter un synopsis accompagné de notes d'intentions aux producteurs. Selon que le pouce du type qui a l'argent se dirige vers le haut ou le bas, le scénariste va alors devoir écrire, réécrire, remanier son script jusqu'à approbation définitive ; ou alors tenter sa chance ailleurs. L'élaboration d'un scénario complet et viable prend plusieurs mois, et peut parfois rencontrer moult difficultés avant d'arriver à terme (Blade Runner, par exemple). Si tout va bien, on va choisir un distributeur selon le public visé, le genre, et toutes les spécificités du film, et la préproduction va pouvoir commencer.
Le travail préalable à la préproduction, c'est le producteur qui s'en charge. Il trouve le réalisateur, le directeur de la photographie, les acteurs, tous les professionnels qui vont travailler sur le film, évalue le financement, loue des locaux et des studios. Pendant ce temps, on se charge du découpage technique du scénario : on le divise en scène, on estime la durée du film (ce qui influe sur les ressources de la production), on paramètre déjà les plans. Le but est d'assigner de façon claire chaque élément du scénario au corps de métiers qui lui convient, afin de limiter les imprévus.
Ensuite, le repérage fait intervenir le chef décorateur, et, souvent, le réalisateur lui-même. Et selon les endroits qui vont être choisis, on peut être amenés à modifier un scénario. Comme disait Bertrand Blier, de mémoire, il suffit que l'escalier soit à gauche dans la maison, au lieu d'être au centre, et ça change tout.
Ensuite vient la création du story-board, qui consiste à dessiner de manière plus ou moins sommaire les plans envisagés par le réalisateur. Certains demandent un story-board intégral du film, d'autres ne veulent que les plans les plus élaborés, et enfin, certains s'en passent complètement. Un bon story-board permet d'avoir une idée très précise du visuel du film, et impose un cadre et une certaine discipline au réalisateur. Mais il faut parfois s'en départir et profiter des évènements inattendus qui se produisent lors d'un tournage. Et là, le réalisateur est face à ses choix.
La synthèse de tout ce travail de préproduction aboutit à un plan de travail, souvent réalisé par le premier assistant-réalisateur. Il regroupe toutes les informations et indications recueillies pour chaque corps de métier ayant déjà officié ou qui va devoir travailler lors du tournage. Là encore, il s'agit d'éviter les problèmes de communication et les aléas du tournage qui pourraient plomber le film (petite pensée pour Terry Gilliam...). C'est aussi à ce moment que l'on décide dans quel ordre le film va être tourné.
II. On en arrive au tournage proprement dit, probablement la partie la plus connue. On va sur le lieu de tournage, en studio ou en décors naturels, on prépare les plans, les décors, l'acteur arrive, fait sa starlette, on utilise le clap (cf la superbe propa de Zuff sur le sujet), on crie action, on filme, on re-filme, jusqu'à ce que ce soit parfait, et paf. C'est dans la boite, "coupez". Ça peut se compliquer, si les acteurs font leurs fines bouches, s'ils meurent pendant le tournage, si le réalisateur menace les acteurs de castration, ou toute autre chose qui se retrouveront des années plus tard dans les biographies des étoiles d'Hollywood.
III. On en arrive au travail de post-production, vital s'il en est puisqu'il va aboutir à l'élaboration du master du film, duquel seront tirés les copies qui arriveront dans votre cinéma. Et pour cela, le monteur doit intervenir, et sélectionner, parmi les rushes accumulés pendant la production, ceux qui vont devenir le film. Occasionnellement, on peut faire des retakes, c'est-à-dire retourner filmer des scènes qui ne fonctionnent pas (ça se voit généralement dans la coiffure des acteurs). À ce stade-là, tout peut encore arriver, on peut complètement bouleverser le sens d'un film en ajoutant, supprimant, déplaçant et modifiant des scènes. C'est aussi là que le réalisateur peut se rendre compte qu'il a vendu son âme à une infâme société de production qui veut le montage final, et décider de ne pas signer son film (qui sera alors remplacé par Alan Smithee. En tout cas, c'était la tradition, avant...).
Mais de toute façon, le boulot n'est pas encore fini, car si l'on a l'image, il faut aussi le son. Et là, ce sont les bruiteurs, les compositeurs, le mixeur, et, dans certains cas, les acteurs qui reviennent faire de la post-synchronisation si les prises n'étaient pas audibles, qui vont se partager le travail.
Et puis il y a toute la partie consacrée aux effets spéciaux, afin de remplacer les toiles vertes par des paysages numériques, et essayer de donner un sens à une bande d'acteurs qui agitent leurs épées en plastique dans le vide.
Mixage final, mastering, et paf, on a notre bobine, prête à éprouver la rudesse d'une kinoton, à subir les affres du temps, à se consumer face à un public ébahi par la poésie indicible d'un message touchant passé à travers le prisme de ce média fantastique qu'est le cinéma. Sauf que ce n'est pas tout à fait fini. Il reste une étape.
IV. Oui, car c'est bien beau d'avoir fait un film, mais avant de rentrer chez soi pour attendre de savoir si on a rentabilisé notre film et si on va avoir un césar, et bien il faut le faire connaître, son bébé. Et donc, il faut le promotionner. Promouvoir. Et ce n'est pas une mince affaire. Outre les interviews à Télérama, il faut aussi aller dans les salons pour essayer d'exporter le film. Et parfois ça marche, comme Caro et Jeunet qui ont cartonné sans trop qu'on sache pourquoi aux States.
La distribution implique aussi une part de programmation : dégoter des réseaux pour distribuer le film. Parce que sinon, le film ne sortira pas dans un nombre suffisant de salles et ne rentrera pas dans ses frais, comme Scott Pilgrim. Mais heureusement, plus tard, il y aura la version DVD. Et si j'avais retenu mon cours d'économie des médias, je pourrais vous dire avec précision la part que la vente de tickets représente dans les recettes d'un film, mais non, alors je me contenterais de dire que de nos jours, cette fraction, sans être négligeable, ne constitue plus la façon principale de rembourser ceux qui ont financé le film.
Voilà, notre beau bébé est né, après moult péripéties, depuis son incubation dans les neurones du scénariste jusqu'aux négociations pour qu'il soit diffusé le plus largement possible. Après, savoir s'il va marcher ou pas, c'est une autre histoire.
PS : milles excuses, j'ai un peu mélangé le système Hollywoodien et le système à l'européenne. Il y a des différences. Tant pis.
lundi 14 mars 2011
the Good, the Bad and the Weird (FILM) by Frisotte
Bon, je suppose que je ne vous apprends rien en vous disant que Kim Jee-woon (le réalisateur) a voulu rendre hommage à Le Bon, La Brute et Le Truand et aux westerns en général en faisant ce film. Ce film est… unique - enfin pour moi - par les décors, les habits, les accessoires, les personnages, etc. Cela peut s’expliquer notamment par le contexte historique.
Histoire (du film hein) :
Nous sommes en Mandchourie dans les années 30. Kim Pan-ju est un riche Coréen qui cherche à devenir encore plus riche en faisant des affaires avec les Japonais. Il envoie donc un bonhomme amener une carte à Kanemaru, un très riche Japonais (on apprend par la suite que le Japon en a besoin pour étendre sa domination). Mais voilà, Kim Pan-ju est un peu trop ambitieux, alors il paye Chang-yi (la Brute) pour récupérer la carte et l’argent que lui doit Kanemaru. Pour cela, Chang-yi va devoir arrêter un train. Malheureusement, personne n’a prévu le passage de Te-goo (le Cinglé) dans le train pour voler les riches voyageurs. Chang-yi arrête donc le train (avec ses acolytes de Brute), arrive dans la cabine de Kanemaru et… Kanemaru est mort et les valises ont été fouillées. Pendant qu’il cherche la cause de cela, ses acolytes fouillent le reste du train et tombent sur Do-won (le Bon), ou plutôt, Do-won leur tombe dessus. La Brute voit Le Cinglé en train de s’enfuir dans le désert, lui tire dessus, mais pas de bol, il se fait viser par Le Bon. Ils commencent tranquillement à se tirer dessus d’un bout à l’autre du train pendant que le Cinglé se fait la belle. Puis le Bon se fait éjecter du train par l’énorme marteau d’un homme de la Brute et se met à poursuivre le Cinglé. La bande des Trois royaumes observe la scène du haut d’une petite colline. Pendant ce temps, le Cinglé se fait récupérer par Man-gil (son ami) en side-car.
Bon, je vous ai fait un topo des dix premières minutes du film.
Ainsi, tout le monde veut la carte (sauf le Bon qui veut juste capturer le Cinglé et la Brute) : le Cinglé, la Brute, la bande des Trois Royaumes, l’armée japonaise.
J’aimerais bien vous en dire un peu plus, mais c’est vraiment un film qui ne peut pas se raconter, à cause de sa rapidité et l’entremêlement des histoires dans la trame principale, sans tomber dans le spoil.
Les personnages :
La Brute (Lee Byung-Hun, qui a joué dans des films que je n’ai pas vu) : il a un look de dandy, avec une coupe de cheveux très branchée pour l’époque. Il ne cherche qu’une chose : être le meilleur, peu importe qu’il meurt ou non. Il a toute une bande derrière lui, notamment un mec très doué aux sabres et Attila (je l’ai surnommé comme ça à cause de son look et c’est lui qui a l’énorme marteau). Il recherche plus la supériorité que la carte au trésor, mais pour prouver à tous qu’il est le meilleur, il doit se battre contre le Bon et le Cinglé et donc les retrouver.
Le Bon (Jung Wo-Sung, pareil que pour la Brute) : il est seul, avec son cheval, sa carabine et son fusil. C’est un chasseur de prime, il recherche donc le Cinglé et la Brute. Néanmoins, au détour d’un rocher dans le désert, il va faire un marché avec le Cinglé pour se partager le trésor, si trésor il y a. On se doute tout de même qu’il n’a confiance en personne sauf en ses armes et il a raison car il ne rate jamais sa cible. C’est lui qui a le plus le look western du film, chapeau, foulard, long manteau (et non, pas de poncho).
Le Cinglé (Song Kang-ho : The Host, Memories of Murder) : c’est un voleur, qui préfère le side-car au cheval pour se déplacer dans le désert. Il a souvent un chapeau et des lunettes d’aviateur sur la tête (même avec un casque scaphandre). Il est toujours là où on ne l’attend pas et il a surtout le chic pour se fourrer dans des situations étranges. Tout le monde le prend pour un empoté et un benêt, mais en réalité il est bien moins cinglé qu’on ne le pense.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que ces trois personnages ne restent pas bloqués dans leurs surnoms (surnoms qui n’existent que pour l’affiche en réalité), ils sont tour à tour brute, bon et cinglé. Le Bon nous parait sympathique par sa nonchalance et sa façon de voir les choses, mais il n’hésite pas à tirer sur tout ce qui bouge, la Brute doit sa nature à un épisode marquant du passé (qu’on entrevoit parfois en flash-back), le Cinglé prend soin de sa « mémé » et de Man-gil. Ce que j’ai aimé dans ces persos, c’est qu’en réalité ils sont bien plus complexes qu’on ne peut le penser au premier abord et en tant qu’acteurs, on sent qu’ils se sont éclatés sur ce film et ça fait vraiment plaisir à voir.
En personnages secondaires, on peut noter la présence de la tribu des Trois royaumes, ils sont évidemment bien moins développés que les trois personnes principaux, mais leur présence est quand même intéressante à noter ; on les voit tout au long du film et ils représentent bien la multitude de culture que connait la Mandchourie à cette époque. Leur chef est donc chinois, avec des massues pour armes, le second est coréen et un peu neuneu, le reste de la bande est mongol, russe, coréen et chinois, ils sont habillés de façon traditionnelle ou plus moderne, ils ont des chevaux, des chameaux ou des motos.
On a l’impression tout au long du film d’avoir droit à du grand n’importe quoi, toutes ces différences de civilisations, d’accoutrements, la frontière constante entre modernité et « archaïsme », l’humour à chaque coin du film, tout cela sur un fond de chasse au trésor et de courses poursuites.
Les décors sont principalement désertiques, avec des falaises, des défilés, du sable qui vole pendant les chevauchées, mais une partie de l’action se déroule également au Marché fantôme, une ville totalement hallucinante, un vrai labyrinthe, où tout ce qui a été volé est vendu (on peut d’ailleurs voir une statue géante de Bouddha).
Il y a donc une influence directe des westerns spaghettis. Avec Le Bon, La Brute et Le Truand, on retrouve le trésor caché, l’association bancale entre le Bon et le Cinglé/Truand, une intervention de l’armée, le Cinglé se retrouve d’ailleurs en train de creuser vers la fin du film pendant que le Bon le surveille avec son fusil (bon par contre je vous préviens tout de suite, vous n’aurez pas droit à la réplique culte de Blondin). Et évidemment, comme tout le monde s’y attend, il y a le duel, ou plutôt le triel.
Hey, vous voulez savoir qui gagne ? Et ben regardez le film.
Malgré cette importante influence des westerns spaghettis, Kim Jee-woon arrive très bien à mettre sa touche personnelle pour en faire un film totalement déjanté et culte, unique en son genre (même si je ne m’y connais pas non plus fabuleusement bien en cinéma coréen).
Histoire (du film hein) :
Nous sommes en Mandchourie dans les années 30. Kim Pan-ju est un riche Coréen qui cherche à devenir encore plus riche en faisant des affaires avec les Japonais. Il envoie donc un bonhomme amener une carte à Kanemaru, un très riche Japonais (on apprend par la suite que le Japon en a besoin pour étendre sa domination). Mais voilà, Kim Pan-ju est un peu trop ambitieux, alors il paye Chang-yi (la Brute) pour récupérer la carte et l’argent que lui doit Kanemaru. Pour cela, Chang-yi va devoir arrêter un train. Malheureusement, personne n’a prévu le passage de Te-goo (le Cinglé) dans le train pour voler les riches voyageurs. Chang-yi arrête donc le train (avec ses acolytes de Brute), arrive dans la cabine de Kanemaru et… Kanemaru est mort et les valises ont été fouillées. Pendant qu’il cherche la cause de cela, ses acolytes fouillent le reste du train et tombent sur Do-won (le Bon), ou plutôt, Do-won leur tombe dessus. La Brute voit Le Cinglé en train de s’enfuir dans le désert, lui tire dessus, mais pas de bol, il se fait viser par Le Bon. Ils commencent tranquillement à se tirer dessus d’un bout à l’autre du train pendant que le Cinglé se fait la belle. Puis le Bon se fait éjecter du train par l’énorme marteau d’un homme de la Brute et se met à poursuivre le Cinglé. La bande des Trois royaumes observe la scène du haut d’une petite colline. Pendant ce temps, le Cinglé se fait récupérer par Man-gil (son ami) en side-car.
Bon, je vous ai fait un topo des dix premières minutes du film.
Ainsi, tout le monde veut la carte (sauf le Bon qui veut juste capturer le Cinglé et la Brute) : le Cinglé, la Brute, la bande des Trois Royaumes, l’armée japonaise.
J’aimerais bien vous en dire un peu plus, mais c’est vraiment un film qui ne peut pas se raconter, à cause de sa rapidité et l’entremêlement des histoires dans la trame principale, sans tomber dans le spoil.
Les personnages :
La Brute (Lee Byung-Hun, qui a joué dans des films que je n’ai pas vu) : il a un look de dandy, avec une coupe de cheveux très branchée pour l’époque. Il ne cherche qu’une chose : être le meilleur, peu importe qu’il meurt ou non. Il a toute une bande derrière lui, notamment un mec très doué aux sabres et Attila (je l’ai surnommé comme ça à cause de son look et c’est lui qui a l’énorme marteau). Il recherche plus la supériorité que la carte au trésor, mais pour prouver à tous qu’il est le meilleur, il doit se battre contre le Bon et le Cinglé et donc les retrouver.
Le Bon (Jung Wo-Sung, pareil que pour la Brute) : il est seul, avec son cheval, sa carabine et son fusil. C’est un chasseur de prime, il recherche donc le Cinglé et la Brute. Néanmoins, au détour d’un rocher dans le désert, il va faire un marché avec le Cinglé pour se partager le trésor, si trésor il y a. On se doute tout de même qu’il n’a confiance en personne sauf en ses armes et il a raison car il ne rate jamais sa cible. C’est lui qui a le plus le look western du film, chapeau, foulard, long manteau (et non, pas de poncho).
Le Cinglé (Song Kang-ho : The Host, Memories of Murder) : c’est un voleur, qui préfère le side-car au cheval pour se déplacer dans le désert. Il a souvent un chapeau et des lunettes d’aviateur sur la tête (même avec un casque scaphandre). Il est toujours là où on ne l’attend pas et il a surtout le chic pour se fourrer dans des situations étranges. Tout le monde le prend pour un empoté et un benêt, mais en réalité il est bien moins cinglé qu’on ne le pense.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que ces trois personnages ne restent pas bloqués dans leurs surnoms (surnoms qui n’existent que pour l’affiche en réalité), ils sont tour à tour brute, bon et cinglé. Le Bon nous parait sympathique par sa nonchalance et sa façon de voir les choses, mais il n’hésite pas à tirer sur tout ce qui bouge, la Brute doit sa nature à un épisode marquant du passé (qu’on entrevoit parfois en flash-back), le Cinglé prend soin de sa « mémé » et de Man-gil. Ce que j’ai aimé dans ces persos, c’est qu’en réalité ils sont bien plus complexes qu’on ne peut le penser au premier abord et en tant qu’acteurs, on sent qu’ils se sont éclatés sur ce film et ça fait vraiment plaisir à voir.
En personnages secondaires, on peut noter la présence de la tribu des Trois royaumes, ils sont évidemment bien moins développés que les trois personnes principaux, mais leur présence est quand même intéressante à noter ; on les voit tout au long du film et ils représentent bien la multitude de culture que connait la Mandchourie à cette époque. Leur chef est donc chinois, avec des massues pour armes, le second est coréen et un peu neuneu, le reste de la bande est mongol, russe, coréen et chinois, ils sont habillés de façon traditionnelle ou plus moderne, ils ont des chevaux, des chameaux ou des motos.
On a l’impression tout au long du film d’avoir droit à du grand n’importe quoi, toutes ces différences de civilisations, d’accoutrements, la frontière constante entre modernité et « archaïsme », l’humour à chaque coin du film, tout cela sur un fond de chasse au trésor et de courses poursuites.
Les décors sont principalement désertiques, avec des falaises, des défilés, du sable qui vole pendant les chevauchées, mais une partie de l’action se déroule également au Marché fantôme, une ville totalement hallucinante, un vrai labyrinthe, où tout ce qui a été volé est vendu (on peut d’ailleurs voir une statue géante de Bouddha).
Il y a donc une influence directe des westerns spaghettis. Avec Le Bon, La Brute et Le Truand, on retrouve le trésor caché, l’association bancale entre le Bon et le Cinglé/Truand, une intervention de l’armée, le Cinglé se retrouve d’ailleurs en train de creuser vers la fin du film pendant que le Bon le surveille avec son fusil (bon par contre je vous préviens tout de suite, vous n’aurez pas droit à la réplique culte de Blondin). Et évidemment, comme tout le monde s’y attend, il y a le duel, ou plutôt le triel.
Hey, vous voulez savoir qui gagne ? Et ben regardez le film.
Malgré cette importante influence des westerns spaghettis, Kim Jee-woon arrive très bien à mettre sa touche personnelle pour en faire un film totalement déjanté et culte, unique en son genre (même si je ne m’y connais pas non plus fabuleusement bien en cinéma coréen).
La MPAA by Dylan
Si vous vous êtes toujours demandé pourquoi dans les gros films américains, le sexe se faisait toujours en missionnaire, pourquoi les bisous dans les vieux films de cinéma ne duraient pas longtemps, pourquoi ils ne mettent jamais la langue ou si vous vous êtes simplement toujours demandés pourquoi certains films sont interdits aux moins de 18 ans, alors cet article est pour vous... Parce que oui ! J'ai décidé de vous parler de la censure et de la MPAA aux États-Unis. Pourquoi les États-Unis ? Parce que je pense que la plupart des gens ici regardent surtout des films américains et que je trouve que c'est extrêmement intéressant de savoir comment ça fonctionne, ne serait-ce que pour comprendre pourquoi on trouve certains films sur nos écrans...
I. Qu'est ce que la MPAA ?
La MPAA, Motion Picture Association of America est une association qui, soit disant, défend les intérêts du cinéma aux États-Unis. Tous les gros studios Américains en sont membres ( Paramount, Sony, Universal, Disney, Warner Bros, 20th Century Fox). Cette association est une bande de personnes anonymes qui regarde les films avant leur diffusion et leur donne un "rate", un symbole qui signifie la tranche d'âge qui peut voir ce film. La soumission d'un film à l'évaluation de la MPAA n'est pas obligatoire mais fortement conseillée, car un film qui n'est pas "RATED" est techniquement un film indéfini qui aura beaucoup plus de mal à trouver des cinéma pour diffuser le film. Cela veut dire aussi moins, voire aucune, publicité pour le film, zéro marketing, donc quasiment aucune audience. Sauf dans des cas très rare comme Deep Throat où en fin de compte, la censure et les débats autour des films en ont fait des films cultes que tout le monde allait voir. Mais en général, c'est l'effet inverse : si vous avez une mauvaise "note", vous avez clairement fait votre film pour rien. En fin de compte, c'est un peu comme le visa d'exploitation en France. Il y a plusieurs types de symboles : G (General Audiences - Tout Public), PG (Parental Guidance - Selon l'avis des parents), PG-13 (un dérivé un peu plus fort), R (Restricted - moins de 17 ans) et NC_17 (interdit aux moins de 17 ans).
II. Mais à quoi est-ce que cela correspond vraiment ? Sur quelles "règles" se basent les membres du comité ?
Bien que les quelques membres qui ont rompu le silence disent qu'on ne leur a donné aucune règle en soit, il y en a tout de même quelques unes. Même si, officiellement, cela reste du cas par cas.
► G : General Audiences
Pas de nudité, pas de sexe, pas de drogue. La violence doit être minime ou faite en animation. Et pas de gros mots non plus.
► PG : Parental Guidance Suggested
Quand on trouve des petits mots comme "shit" ou "ass" et de la nudité partielle qu'on ne voit que rapidement (ex : montrer ses fesses). Il peut également y avoir de la violence "soft" comme un coup de pied, une petite baffe.
► PG 13 :
Tous les mots dérivés de "shit" (shitass, shit face, shithead), tous les dérivés de "fuck" (fuck off, fuck me, fuck up), tant qu'on ne l'utilise pas trop et PAS pour parler de sexe (et merde).
► R : Restricted
Alors là, c'est la teuf, on peut parler de sexe ouvertement, tuer toute sa famille et les insulter après en fumant de la drogue. Et là vous me direz, et le sexe alors ? (Je vous ai grillés ça va hein). Le sexe est autorisé seulement en position du missionnaire.
Sont interdits :
- Le sexe oral entre femmes (voire hommes)
- La sodomie (Wulfy)
- Le fétichisme (Thoms)
- Plus de deux personnes en même temps (DDYDLS), mais non reviens !
- Les "comportements abhorrés" (ex : sucer son poney).
Alors là, c'est le drame, tu te prends un gros "Interdit aux moins de 17 ans" et tu peux dire officiellement que tu t'es fait OUNED par la MPAA. Ils sont d'ailleurs clairement dérangés par les scènes homosexuelles et les scènes d'orgasmes. À Hollywood : on ne jouit pas, non Monsieur ! Ce qui est d'ailleurs complètement dingue, c'est qu'on retrouve des scènes similaires, voire moins hardcores, dans les films gays et que, comme par hasard, eux sont interdits aux moins de 17 ans et pas les autres. Deux exemples ? Mysterious Skins a été interdit, contrairement à Sideways. Boys Don't Cry a été interdit aux moins de 17 ans, Henry & June aussi... Mais par contre, aucun problème pour montrer un type se branler dans une tarte dans American Pie...
Les réalisateurs suivants ont vu leurs films interdits aux moins de 17 ans, considérés comme pornographiques ou ont dû couper des scènes afin d'éviter ces mentions : David Lynch, John Waters, Hassel Wexler, Greg Araki, Kevin Smith, Paul Schrader, William Friedkin, Wes Craven, Kubrick, Spike Lee, Peter Jackson, Les frères Wachowski, Harmony Korine, Jean-Jacques Annaud, Alan Parker, Antonioni, Tarantino, Vincent Gallo, Sam Raimi, Jane Campion, Bertolucci, Adrian Lyne, Louis Malle (et bien d'autres encore)...
Capitaine Orgazmo, de Trey Parker
III. Ça vient d'où ?
On dit au comité qu'ils sont les "gardiens de la moralité", sachant qu'ils se basent essentiellement sur le Hays Code, code qui a été instauré aux États-Unis en 1930... Ça date un peu. Il est donc question de valeurs chrétiennes et de ne pas choquer les pauvres petits enfants innocents en les transformant en légumes. Dans un sens, le Hays Code a permis à bien des beaux films de se faire, car les réalisateurs arrivaient toujours à contourner la censure de façon inventive et originale. Par exemple, Hitchcock, pour son film Notorious, faisait parler ses acteurs entre deux baisers, histoire de pouvoir faire durer ce bisou plus longtemps à l'écran (qui devait, selon le Hays Code, durer moins de quelques secondes). Mais heureusement que le Hays Code n'est plus appliqué à la lettre, sachant qu'il interdisait quasiment tout. Il fallait présenter la famille et le mariage sous un angle favorable, respecter les valeurs morales, ne pas parler de prostitution, d'homosexualité, de sexe, d'adultère, etc, le crime devait être présenté comme quelque chose de mal, pas de drogue et si le héros était un criminel, il ne devait pas s'en sortir indemne... Mais est-ce qu'un comité (Board) a vraiment son mot à dire sur ce qui peut choquer ou non les autres ?
Boys Don't Cry, de Kimberly Peirce
IV. Petit exemple
La réalisatrice de Boys Don't Cry, Kimberley Peirce, a eu un problème avec ses producteurs, qui ne voulaient pas que le film sorte s'il était interdit aux moins de 17 ans. Vous allez me dire, le film est dans tous les cas assez violent et il est donc normal de protéger la jeunesse. Mais le problème de censure autour du film ne venait pas forcément de ce qu'on pouvait croire. En effet, il y avait trois scènes qui posaient problème au comité. La première, le fait que le personnage principal s'essuyait la bouche après avoir fait un cunnilingus. La deuxième, c'était la scène de viol (normal). Et la troisième était que l'orgasme d'un personnage durait trop longtemps. La réalisatrice ne comprit pas vraiment en quoi un orgasme pourrait faire du mal à qui que ce soit et elle avait bien raison... Pourquoi est-ce que cette scène posait un problème ? Parce qu'on ne voyait que la femme et que la scène était uniquement à propos de son plaisir à elle. Bouh les gros machos !
La Leçon de Piano, de Jane Campion
Pourquoi est-ce que quelqu'un n'aurait pas le droit de voir un film à cause d'un mot ou d'un geste ? N'est-ce pas en fin de compte interdire à quelqu'un de regarder quelque chose qu'on voit aussi dans la vie ?
V. Mais en fin de compte, est-ce là le vrai débat ?
Car lorsque les créateurs de South Park ont réalisé Orgazmo, on leur a simplement dit que le film serait interdit aux moins de 17 ans à cause des allusions trop sexuelles, mais personne ne voulait leur dire précisément de quelles scènes il s'agissait. La raison ? La MPAA n'est officiellement pas un comité de censure, mais simplement d'évaluation. Par contre lorsqu'ils ont réalisés le film South Park, on leur a donné des notes très précises sur tout ce qu'il fallait changer. Pourquoi cette différence de traitement alors que les auteurs sont les mêmes et le délire aussi ? Eh bien tout simplement parce que le premier film était un film indépendant et que le second était un film de studio. Merci Paramount !
Unfaithful, de Adrian Lyne
Le créateur de la MPAA a dit clairement que si un réalisateur faisait un film que beaucoup de monde voulait voir, il n'aurait jamais à s'inquiéter de tout ça. Il faut donc faire des films bien pensants, que beaucoup de monde pourra apprécier et donc, clairement, un film qui fait du fric. D'après Kevin Smith, si on refuse la notation, on peut vous refuser le droit de promouvoir votre film, par exemple à la Télévision. Sachant également qu'aux États-Unis, les chaînes importantes sont responsables de près de la moitié de la production des cassettes (et maintenant DVD) et qu'ils n'éditeront quasiment jamais des films interdits aux moins de 17 ans... C'est également pour cette raison que les films indépendants ont plus de mal à se faire accepter comparé aux films des studios. Car les studios, ce sont aussi souvent les distributeurs, ce sont eux qui brassent l'argent et ce sont donc eux les gros patrons. Ce qui est encore plus dingue, c'est que PERSONNE ne sait qui sont les membres de la MPAA. Plutôt étrange qu'un système public comme le cinéma soit en fin de compte dirigé par des inconnus membres d'un étrange comité. (Moi je dis, appelez Tom Hanks, c'est encore un coup des Illuminatis...) Hé oui, le cinéma de masse, c'est ça, c'est Hollywood. Alors repensez-y à deux fois avant de critiquer un film, car on ne sait pas toujours ce qui se cache derrière son histoire...
► www.mpaa.org
dimanche 6 mars 2011
Thema partie 2 : Elizabeth by Jim
Elizabeth I : quelques repères historiques
Elizabeth I nait en 1533, des amours de son père Henry VIII avec Anne Boleyn. Après trois ans dans l'opulence de la condition de princesse royale, la petite fille est déclarée bâtarde car sa mère vient d'être jugée coupable d'inceste (avec George Boleyn), d'adultère, et bien sûr, en conséquent, de haute-trahison. Elizabeth, grâce à la troisième femme d'Henry VIII – Jane Seymour -, pourra revenir à la cour, et, jouir de son statut de princesse grâce à la dernière épouse du roi, Catherine Parr. Les trois enfants du roi auront la possibilité de monter sur le trône, dans l'ordre suivant : d'abord Edward, ensuite Mary, et enfin Elizabeth.
A la mort d'Henry VIII, en 1547, Edward, âgé de neuf ans, ne peut prendre sa place, et donc, l'oncle de l'enfant, Edward Seymour devient Lord Protecteur. En 1553, Edward décède, en laissant sa couronne à une cousine, Jane Grey (il avait « déshérité » ses deux soeurs). Lady Jane Grey sera reine pendant neuf jours, avant d'être renversée par les partisans de Mary I. De 1553 à 1558, Bloody Mary règne, massacre tout sur son passage : la reine est la seule enfant d'Henry VIII de confession catholique, et elle ne peut accepter que son pays soit constitué de beaucoup protestants et de partisans de la Réforme. Finalement, en 1558, Mary succombe et Elizabeth, à vingt-cinq ans devient reine.
Des quarante-quatre ans de règne de la reine rousse, on retient l'établissement des fondations de l'Anglicanisme, et, cerise sur le gâteau : l'accession de l'Angleterre au statut de première puissance mondiale. Ce statut, l'Angleterre le conservera jusqu'au début du vingtième siècle.
Elizabeth (1998)
Bloody Mary est sur le point de trépasser, et Philippe II, son mari, beaucoup plus jeune qu'elle et dégoûté de son épouse, repart en Espagne. Dans un accès de folie, alors que tous ses conseillers lui conseillent de faire exécuter sa demi-soeur Elizabeth – qui soi-disant complote derrière son dos – Mary la fait seulement séjourner à la Tour de Londres, et ne l'efface pas de la succession. A la mort de sa demi-soeur, Elizabeth devient reine de l'Angleterre, un pays dévasté de tout point de vue : économiquement, la couronne est endettée, politiquement, le pays est isolé du reste du monde, et religieusement, c'est bien pire, puisque la nouvelle reine est protestante, et ne bénéficie pas de la bénédiction de Rome (de plus, Elizabeth est une « bâtarde », elle est la fille de la « putain » d'Anne Boleyn, une bonne raison de la détester et de vouloir sa perte pour les catholiques).
Très vite, les conseillers de la Reine la mettent en déroute face à la menace externe Marie de Guise, la régente écossaise, et une pression est exercée sur la monarque pour qu'elle se marie, de préférence avec un français, le Duc d'Anjou (le neveu de Marie de Guise) bien que son ancien beau-frère, Philippe II, lui fait aussi les yeux doux. En plus de ces babillages, le plus grand danger est interne à la Cour : un des cousins d'Elizabeth, le duc de Norfolk – un noble extrêmement puissant- essaye de la faire tuer pour prendre sa place.
Elizabeth est un film historique très noir : à vingt-cinq ans, Elizabeth était certes plus préparée que son père Henri VIII lorsqu'il devint roi, mais pas prête : la situation compliquée de son pays n'a pas facilité ses débuts, désastreux. Une ambiance obscure, tressée par la vengeance, l'envie et le sentiment d'injustice, empoisonne le quotidien de la Reine qui, au début encore innocente et sensible, devient au fur et à mesure coriace et endurcie. La conjoncture des évènements ne joue pas en la faveur d'Elizabeth : Rome veut sa mort puisqu'elle est « la bâtarde », tout le monde veut profiter d'elle puisqu'elle est à la tête d'un royaume appauvri, sans armée, sans sous, sans foi, sans rien.
Le pari du film était de pouvoir évoquer les débuts de la Virgin Queen, qui, sont souvent méconnus, puisqu'on se plait à parler uniquement de l'acmé du règne : la défaite de l'Armada espagnole au profit de l'Angleterre, qui devient la première puissance.
Le film présente des personnages très importants, comme Francis Walsingham, le conseiller (et espion) le plus fidèle de la reine, qui lui sauvera plus d'une fois la peau, ou même Robert Dudley, le grand amour de la reine, qu'elle n'épousera jamais.
La conclusion du film est importante : ne voulant jamais d'un époux qui pourrait la diriger, et craignant pour son image de mener une vie débridée, Elizabeth décide de devenir "la Reine Vierge" en hommage à la Sainte Vierge : maquillage de circonstance, perruques adaptées, attitude pure ; la voici la métamorphose d'Elizabeth Tudor, jeune femme romantique en "The Virgin Queen", la reine bonne envers son peuple mais dure de caractère. Le choix de devenir la Reine Vierge est d'autant plus important qu'il symbolise l'attachement et le dévouement total de la Reine pour son pays.
Elizabeth : The Golden Age (2007)
En 1585, le très catholique Philippe II, souverain d'Espagne, n'a qu'un ennemi dans son sillage : l'Angleterre, représentée par son ancienne belle-soeur, Elizabeth I. Un nouveau complot voit le jour entre Philippe II, qui désire faire monter sa fille sur le trône d'Angleterre, et Mary Stuart, la reine d'Écosse (fille de Marie de Guise et de James V d'Écosse), avec notamment l'aide de Jésuites qui veulent de Mary Stuart comme reine également.
La machination se trame, avec l'ombre de Walsingham qui erre non-loin dans l'espoir de déjouer les traîtres.
En même temps, Elizabeth fait la rencontre de Walter Raleigh, un aventureux marin anglais, qui promet de servir loyalement sa reine pour toujours, surtout sur les terres qu'il vient de découvrir et qu'il a appelé "Virginia" en hommage à la souveraine.
Le climat obscur et incertain du premier film s'éclaircit, se désature, tout en gardant une place pour le doute : Philippe II a bien l'intention de lancer sa grande Armada (une centaine de bateaux de guerre) contre l'Angleterre, et de décapiter (ou même pire) Elizabeth. Le danger vient aussi bien de l'ancien beau-frère que du côté de la cousine écossaise, qui, derrière sa "grande âme catholique" convoite un nouveau trône.
Les guerres de religion occupent une place prépondérante dans le film : le fait d'être protestant ou catholique définit les aspirations, les risques prêts à être encourus, le danger. La reine protestante n'est jamais en sécurité : les jésuites œuvrent pour sa perte dans son pays, et à l'extérieur, que ce soit à Rome, en Écosse, ou à la Cour de Philippe II, tous veulent sa mort.
L'ensoleillement du film réside dans les relations d'Elizabeth : avec sa favorite, appelée également Elizabeth, et avec Walter Raleigh qui l'exalte véritablement : ses deux amours vont même se rencontrer et s'en aller, pour l'ironie du sort, pour enfermer la souveraine encore plus dans sa solitude forcée.
C'est même Elizabeth I qui pousse (inconsciemment) sa favorite dans les bras de l'intrépide navigateur : comme si elle ne pouvait pas refuser à ceux qu'elle aimait ce qu'elle ne peut avoir. La Reine est teintée de mélancolie, de choses qui la rongent parce qu'elle ne peut plus les embraser : en devenant la Virgin Queen, elle a laissé partir en fumée la vie à deux, la possibilité d'enfanter. Elizabeth I n'est pas la mère d'un enfant, mais la mère de son peuple : c'est son choix de vie.
Critique des films
D'emblée, il faut préciser que les films ne sont pas historiquement parfaits : vu le but qu'ils sont censés remplir, c'est-à-dire distraire et présenter d'une façon "simplifiée" les évènements pour ne pas effrayer et faire fuir les spectateurs, il est logique que l'histoire d'Elizabeth soit romancée. Les détails changés ne sont néanmoins pas "gros comme des montagnes" : dans le premier film, par exemple, on présente d'une façon romantique l'histoire entre la Reine et Robert Dudley, pour donner un peu de sucre dans une histoire amère (même si la fin du film présente une situation plus aigre que sucrée...).
Concernant le deuxième film, la triche du point de vue historique est un peu plus présente pour certains détails : on voulait faire un melting pot d'émotions, de situations, pour appréhender plus globalement le personnage d'Elizabeth, alors, Michael Hirst a écrit un scénario qui schématisait les relations Philippe II – Mary Stuart – Elizabeth et le bordel avec l'Armada.
L'Armada, en réalité, n'était pas qu'une déclaration de guerre de l'Espagne vers l'Angleterre, mais le symbole de la haine entre catholiques (espagnols) et protestants (les anglais ont été aidés par les hollandais). La tentative d'assassinat orchestrée par Thomas Babington ne put jamais connaître un dénouement réel, puisqu'il fut arrêté avant d'avoir pu faire quoi que ce soit. L'autre détail à avoir été falsifié est le rôle joué par Raleigh dans la victoire anglaise contre l'Armada : l'Histoire retient le nom de Francis Drake, un corsaire anglais, comme celui qui fut le grand héros. Néanmoins, étant donné la place qu'on voulait donner à Raleigh, il fallait le voir un peu plus : il fut un prétendant de la reine Elizabeth pendant un moment, mais finalement, se maria secrètement avec une des dames de compagnie avec qui il eut un enfant, quelques années après la défaite de l'Armada; chose qu'Elizabeth ne lui pardonna pas, puisqu'elle le fit enfermer à la Tour de Londres.
Elizabeth I est interprétée dans les deux films par l'irréprochable Cate Blanchett, grandiose, dont le regard inspire grandeur et sagesse dans le deuxième film, et volonté dans le premier. Sa métamorphose est intéressante, et jamais, on ne peut douter que Blanchett était la personne idéale pour endosser le(s) rôle(s). Walsingham est joué par un inquiétant Geoffrey Rush, au sommet de son étrangeté dans le premier volet, et malade et usé par le temps dans le second, mais toujours volontaire et présent.
Des seconds rôles on retiendra aussi pour le premier film : Joseph Fiennes (Dudley), Daniel Craig (Ballard), Vincent Cassel (le duc d'Anjou), Fanny Ardant (Marie de Guise), Kelly Macdonald (Isabel, la dame de compagnie).
Pour le second film, un casting excellent encore une fois : Rhys Ifans (le jésuite), Clive Owen (Raleigh), Samantha Morton (Mary Stuart, reine d'Écosse), etc.
La réalisation des deux films est assurée par Shekhar Kapur.
En conclusion
Le règne d'Elizabeth I n'est pas appelé l'Age d'Or pour rien : la souveraine a fait tout son possible pour redresser son royaume, le hisser le plus haut qu'elle pouvait. Elle est connue pour avoir été une femme de caractère, brillante et cultivée. Les deux films rendent hommage à sa personne, en montrant souvent sa force de caractère inébranlable, mais aussi, ses faiblesses, ses inquiétudes. Le deuxième film est porté par un sentiment de nostalgie, nostalgie d'amour, de passion, d'aventures : la Reine est enchaînée au destin de l'Angleterre, ne peut partir loin avec Raleigh, vivre d'amour et d'eau fraîche. Cette intrusion d'une touche de regrets rend son histoire encore plus belle, et son personnage encore plus riche, plus complexe.
Voici donc deux films à voir, pour sa culture, pour les décors, pour l'ambiance, et bien évidemment pour Cate Blanchett, une des meilleures actrices de sa génération.
Trailer 1
Trailer 2
Elizabeth I nait en 1533, des amours de son père Henry VIII avec Anne Boleyn. Après trois ans dans l'opulence de la condition de princesse royale, la petite fille est déclarée bâtarde car sa mère vient d'être jugée coupable d'inceste (avec George Boleyn), d'adultère, et bien sûr, en conséquent, de haute-trahison. Elizabeth, grâce à la troisième femme d'Henry VIII – Jane Seymour -, pourra revenir à la cour, et, jouir de son statut de princesse grâce à la dernière épouse du roi, Catherine Parr. Les trois enfants du roi auront la possibilité de monter sur le trône, dans l'ordre suivant : d'abord Edward, ensuite Mary, et enfin Elizabeth.
A la mort d'Henry VIII, en 1547, Edward, âgé de neuf ans, ne peut prendre sa place, et donc, l'oncle de l'enfant, Edward Seymour devient Lord Protecteur. En 1553, Edward décède, en laissant sa couronne à une cousine, Jane Grey (il avait « déshérité » ses deux soeurs). Lady Jane Grey sera reine pendant neuf jours, avant d'être renversée par les partisans de Mary I. De 1553 à 1558, Bloody Mary règne, massacre tout sur son passage : la reine est la seule enfant d'Henry VIII de confession catholique, et elle ne peut accepter que son pays soit constitué de beaucoup protestants et de partisans de la Réforme. Finalement, en 1558, Mary succombe et Elizabeth, à vingt-cinq ans devient reine.
Des quarante-quatre ans de règne de la reine rousse, on retient l'établissement des fondations de l'Anglicanisme, et, cerise sur le gâteau : l'accession de l'Angleterre au statut de première puissance mondiale. Ce statut, l'Angleterre le conservera jusqu'au début du vingtième siècle.
Elizabeth (1998)
Bloody Mary est sur le point de trépasser, et Philippe II, son mari, beaucoup plus jeune qu'elle et dégoûté de son épouse, repart en Espagne. Dans un accès de folie, alors que tous ses conseillers lui conseillent de faire exécuter sa demi-soeur Elizabeth – qui soi-disant complote derrière son dos – Mary la fait seulement séjourner à la Tour de Londres, et ne l'efface pas de la succession. A la mort de sa demi-soeur, Elizabeth devient reine de l'Angleterre, un pays dévasté de tout point de vue : économiquement, la couronne est endettée, politiquement, le pays est isolé du reste du monde, et religieusement, c'est bien pire, puisque la nouvelle reine est protestante, et ne bénéficie pas de la bénédiction de Rome (de plus, Elizabeth est une « bâtarde », elle est la fille de la « putain » d'Anne Boleyn, une bonne raison de la détester et de vouloir sa perte pour les catholiques).
Très vite, les conseillers de la Reine la mettent en déroute face à la menace externe Marie de Guise, la régente écossaise, et une pression est exercée sur la monarque pour qu'elle se marie, de préférence avec un français, le Duc d'Anjou (le neveu de Marie de Guise) bien que son ancien beau-frère, Philippe II, lui fait aussi les yeux doux. En plus de ces babillages, le plus grand danger est interne à la Cour : un des cousins d'Elizabeth, le duc de Norfolk – un noble extrêmement puissant- essaye de la faire tuer pour prendre sa place.
Elizabeth est un film historique très noir : à vingt-cinq ans, Elizabeth était certes plus préparée que son père Henri VIII lorsqu'il devint roi, mais pas prête : la situation compliquée de son pays n'a pas facilité ses débuts, désastreux. Une ambiance obscure, tressée par la vengeance, l'envie et le sentiment d'injustice, empoisonne le quotidien de la Reine qui, au début encore innocente et sensible, devient au fur et à mesure coriace et endurcie. La conjoncture des évènements ne joue pas en la faveur d'Elizabeth : Rome veut sa mort puisqu'elle est « la bâtarde », tout le monde veut profiter d'elle puisqu'elle est à la tête d'un royaume appauvri, sans armée, sans sous, sans foi, sans rien.
Le pari du film était de pouvoir évoquer les débuts de la Virgin Queen, qui, sont souvent méconnus, puisqu'on se plait à parler uniquement de l'acmé du règne : la défaite de l'Armada espagnole au profit de l'Angleterre, qui devient la première puissance.
Le film présente des personnages très importants, comme Francis Walsingham, le conseiller (et espion) le plus fidèle de la reine, qui lui sauvera plus d'une fois la peau, ou même Robert Dudley, le grand amour de la reine, qu'elle n'épousera jamais.
La conclusion du film est importante : ne voulant jamais d'un époux qui pourrait la diriger, et craignant pour son image de mener une vie débridée, Elizabeth décide de devenir "la Reine Vierge" en hommage à la Sainte Vierge : maquillage de circonstance, perruques adaptées, attitude pure ; la voici la métamorphose d'Elizabeth Tudor, jeune femme romantique en "The Virgin Queen", la reine bonne envers son peuple mais dure de caractère. Le choix de devenir la Reine Vierge est d'autant plus important qu'il symbolise l'attachement et le dévouement total de la Reine pour son pays.
Elizabeth : The Golden Age (2007)
En 1585, le très catholique Philippe II, souverain d'Espagne, n'a qu'un ennemi dans son sillage : l'Angleterre, représentée par son ancienne belle-soeur, Elizabeth I. Un nouveau complot voit le jour entre Philippe II, qui désire faire monter sa fille sur le trône d'Angleterre, et Mary Stuart, la reine d'Écosse (fille de Marie de Guise et de James V d'Écosse), avec notamment l'aide de Jésuites qui veulent de Mary Stuart comme reine également.
La machination se trame, avec l'ombre de Walsingham qui erre non-loin dans l'espoir de déjouer les traîtres.
En même temps, Elizabeth fait la rencontre de Walter Raleigh, un aventureux marin anglais, qui promet de servir loyalement sa reine pour toujours, surtout sur les terres qu'il vient de découvrir et qu'il a appelé "Virginia" en hommage à la souveraine.
Le climat obscur et incertain du premier film s'éclaircit, se désature, tout en gardant une place pour le doute : Philippe II a bien l'intention de lancer sa grande Armada (une centaine de bateaux de guerre) contre l'Angleterre, et de décapiter (ou même pire) Elizabeth. Le danger vient aussi bien de l'ancien beau-frère que du côté de la cousine écossaise, qui, derrière sa "grande âme catholique" convoite un nouveau trône.
Les guerres de religion occupent une place prépondérante dans le film : le fait d'être protestant ou catholique définit les aspirations, les risques prêts à être encourus, le danger. La reine protestante n'est jamais en sécurité : les jésuites œuvrent pour sa perte dans son pays, et à l'extérieur, que ce soit à Rome, en Écosse, ou à la Cour de Philippe II, tous veulent sa mort.
L'ensoleillement du film réside dans les relations d'Elizabeth : avec sa favorite, appelée également Elizabeth, et avec Walter Raleigh qui l'exalte véritablement : ses deux amours vont même se rencontrer et s'en aller, pour l'ironie du sort, pour enfermer la souveraine encore plus dans sa solitude forcée.
C'est même Elizabeth I qui pousse (inconsciemment) sa favorite dans les bras de l'intrépide navigateur : comme si elle ne pouvait pas refuser à ceux qu'elle aimait ce qu'elle ne peut avoir. La Reine est teintée de mélancolie, de choses qui la rongent parce qu'elle ne peut plus les embraser : en devenant la Virgin Queen, elle a laissé partir en fumée la vie à deux, la possibilité d'enfanter. Elizabeth I n'est pas la mère d'un enfant, mais la mère de son peuple : c'est son choix de vie.
Critique des films
D'emblée, il faut préciser que les films ne sont pas historiquement parfaits : vu le but qu'ils sont censés remplir, c'est-à-dire distraire et présenter d'une façon "simplifiée" les évènements pour ne pas effrayer et faire fuir les spectateurs, il est logique que l'histoire d'Elizabeth soit romancée. Les détails changés ne sont néanmoins pas "gros comme des montagnes" : dans le premier film, par exemple, on présente d'une façon romantique l'histoire entre la Reine et Robert Dudley, pour donner un peu de sucre dans une histoire amère (même si la fin du film présente une situation plus aigre que sucrée...).
Concernant le deuxième film, la triche du point de vue historique est un peu plus présente pour certains détails : on voulait faire un melting pot d'émotions, de situations, pour appréhender plus globalement le personnage d'Elizabeth, alors, Michael Hirst a écrit un scénario qui schématisait les relations Philippe II – Mary Stuart – Elizabeth et le bordel avec l'Armada.
L'Armada, en réalité, n'était pas qu'une déclaration de guerre de l'Espagne vers l'Angleterre, mais le symbole de la haine entre catholiques (espagnols) et protestants (les anglais ont été aidés par les hollandais). La tentative d'assassinat orchestrée par Thomas Babington ne put jamais connaître un dénouement réel, puisqu'il fut arrêté avant d'avoir pu faire quoi que ce soit. L'autre détail à avoir été falsifié est le rôle joué par Raleigh dans la victoire anglaise contre l'Armada : l'Histoire retient le nom de Francis Drake, un corsaire anglais, comme celui qui fut le grand héros. Néanmoins, étant donné la place qu'on voulait donner à Raleigh, il fallait le voir un peu plus : il fut un prétendant de la reine Elizabeth pendant un moment, mais finalement, se maria secrètement avec une des dames de compagnie avec qui il eut un enfant, quelques années après la défaite de l'Armada; chose qu'Elizabeth ne lui pardonna pas, puisqu'elle le fit enfermer à la Tour de Londres.
Elizabeth I est interprétée dans les deux films par l'irréprochable Cate Blanchett, grandiose, dont le regard inspire grandeur et sagesse dans le deuxième film, et volonté dans le premier. Sa métamorphose est intéressante, et jamais, on ne peut douter que Blanchett était la personne idéale pour endosser le(s) rôle(s). Walsingham est joué par un inquiétant Geoffrey Rush, au sommet de son étrangeté dans le premier volet, et malade et usé par le temps dans le second, mais toujours volontaire et présent.
Des seconds rôles on retiendra aussi pour le premier film : Joseph Fiennes (Dudley), Daniel Craig (Ballard), Vincent Cassel (le duc d'Anjou), Fanny Ardant (Marie de Guise), Kelly Macdonald (Isabel, la dame de compagnie).
Pour le second film, un casting excellent encore une fois : Rhys Ifans (le jésuite), Clive Owen (Raleigh), Samantha Morton (Mary Stuart, reine d'Écosse), etc.
La réalisation des deux films est assurée par Shekhar Kapur.
En conclusion
Le règne d'Elizabeth I n'est pas appelé l'Age d'Or pour rien : la souveraine a fait tout son possible pour redresser son royaume, le hisser le plus haut qu'elle pouvait. Elle est connue pour avoir été une femme de caractère, brillante et cultivée. Les deux films rendent hommage à sa personne, en montrant souvent sa force de caractère inébranlable, mais aussi, ses faiblesses, ses inquiétudes. Le deuxième film est porté par un sentiment de nostalgie, nostalgie d'amour, de passion, d'aventures : la Reine est enchaînée au destin de l'Angleterre, ne peut partir loin avec Raleigh, vivre d'amour et d'eau fraîche. Cette intrusion d'une touche de regrets rend son histoire encore plus belle, et son personnage encore plus riche, plus complexe.
Voici donc deux films à voir, pour sa culture, pour les décors, pour l'ambiance, et bien évidemment pour Cate Blanchett, une des meilleures actrices de sa génération.
Trailer 1
Trailer 2
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