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lundi 26 décembre 2011

The Company, Robert Altman (2003) by Cowboy

The Company est un film sorti en 2003, réalisé par le vétéran d'Hollywood, Robert Altman (MASH, Short Cuts, The Long Goodbye...). Il serait plutôt à considérer comme une oeuvre de commande pour le metteur en scène, et est en réalité un très vieux projet de l'actrice Neve Campbell (Scream, mais pas que, apparemment...).



Le film a pour sujet le monde de la danse, mais, à contrario de la majorité des oeuvres sur le sujet, il prend le contre-pied de ne pas se focaliser sur une histoire qui se déroulerait dans cet univers, mais de tenter d'immerger le spectateur dans celui-ci, et de lui montrer les réalités quotidiennes de cette forme d'art.
Le choix de n'avoir que quelques acteurs professionnels, parmi eux, Neve Campbell, James Franco et Malcolm McDowell, confirme cette perspective, et le montage et la réalisation font passer l'histoire au second plan.
Le spectateur est amené à suivre un schéma qui serait de l'ordre "répétitions – évènements quotidiens – spectacle", le but étant de nous montrer que les danseurs sont complètements dédiés à leur passion, qu'ils ne peuvent y échapper même en dehors du théâtre.
Ainsi, The Company aurait, en un sens, plus à voir avec le documentaire et la performance filmée qu'avec la fiction traditionnelle. Cet aspect est encore plus profond lorsque l'on sait que toutes les anecdotes du film sont tirées d'évènements réels.



La mise en scène de Robert est, comme toujours, brillante, mais il faut souligner l’ingéniosité de celle-ci pour les séquences de spectacle. Bien loin de coller à son personnage principal, comme en a décidé Arronfsky dans Black Swan, Altman choisit bien légitimement de privilégier les plans d'ensemble, avec peu de mouvements de caméra, un montage simple qui rappellerait ce qu'avait fait Jonathan Demme sur Stop Making Sense.
Les danseurs comme les professeurs se sont tous révélés être d'excellents acteurs, mais le questionnement quant à l'interprétation d'une fiction ou la recréation d'évènements déjà vécus surgit, au point que le naturel qui apparait à l'écran échappe peut-être à la notion habituelle qu'on attribue à l'art dramatique.



The Company est un film différent et extrêmement original. L'exercice est une réussite complète pour Altman, qui vient subjuguer le spectateur en le plongeant dans un univers méconnu, et qui, en choisissant de traiter son sujet quasiment comme un documentaire, parvient à donner du poids aux séquences de danse en montrant l'envers du décor, la discipline et les sacrifices de ce milieu.

Trailer.

lundi 19 décembre 2011

Mon nom est Personne by Oren



(Article déjà paru il y a des années sur le secteur GTH)

Présentation :
Le nom de ce film plus que connu, réalisé Tonino Valerii, sur un scénario et une production de Sergio Leone, est sorti en 1973 dans les salles. Mon nom est Personne (Il mio nome è Nessuno, à l'origine) est avec Terence Hill et Henry Fonda. Quant à sa musique, c'est évidemment celle d'Ennio Morricone. Le Synopsis est le suivant : la légende de l'ouest, Jack Beauregard (Henry Fonda), un Lucky Luke des temps anciens est lassé du pays, de ces gens que l'on y croise tout le temps et veut aller en Europe. L'un de ses plus grands admirateurs, appelé Personne (Terence Hill), veut quant à lui que Jack reste un modèle en rentrant dans les livres d'histoire, et cela en se mesurant contre la Horde Sauvage : une bande de 150 "fils de pute déchaînés".



Jusque là, tout va bien...

Néanmoins, ce western est particulier : il est parodique. En effet, le sujet (celui du temps qui passe) est abordé avec humour, ne serait-ce que la scène des "baffes", en passant par la scène finale avec le barbier. De plus, sa particularité est amplifiée par le fait que le réalisateur, Sergio Leone, s'auto-parodie avec Mon nom est Personne, en caricaturant ses précédents films : avec à la première scène, les trois tueurs qui s'avancent pour tuer Jack Beauregard, ce sont ceux d'Il était une fois dans l'ouest qui attendent l'Homme à l'Harmonica ; ou bien avec l'expression "Va te faire foutre", murmurée à l'oreille de Jack, présente elle aussi dans Le bon, la brute et le truand où Tuco (Eli Wallach) se prend un café à travers la face par Blondin (Clint Eastwood). Ou encore en reprenant quelques scènes et en utilisant le compositeur des westerns habituels de Sergio Leone : Morricone, avec le thème principal, mais aussi avec "The wild horde", qui nous rappelle la Chevauchée des Walkyries de Wagner, annonçant à chaque fois le rendez-vous de Jack avec son destin.

Un petit résumé de ses "plus" qui ont fait de ce film ce qu'il est :

- tout d'abord la musique, signée par Ennio Morricone : un vrai plaisir de l'écouter,
- les répliques (dont "Quand tu ne seras plus Personne et que tu seras quelqu'un, viens me revoir"),
- mais aussi, tout simplement l'histoire : le fait qu'une personne veuille absolument que son héros réalise son rêve d'enfant, la fin avec la lettre-hommage de Jack Beauregard,
- les thèmes abordés : comme dit plus haut, celui du temps qui passe, le contraste ancien/nouveau temps, la relation idole/admirateur...

Cette fin se veut nostalgique, mais avec des propos pourtant assez justes, et il y a là un certain contraste : tout le long du film, il y a une dimension parodique, mais on finit par des propos nostalgiques des temps anciens, ces propos nous montrent le changement vu par Jack Beauregard entre le XIX ème et le XX ème siècle : les gens changent, la violence est partout, le passage vers une époque plus moderne, plus industrielle se dessine. On voit donc une certaine inquiétude du personnage par rapport au nouveau siècle qui arrive, il se sent dépassé. Elle véhicule aussi une morale, la morale du film et aussi la morale du "nouveau temps". Cette morale pourrait très bien résumer la relation entre Personne et Jack.

Au final, un bon western Spaghetti à découvrir ou à revoir.

Bande-Annonce

Altered States (1980) by Dylan



"I'm a man in search of his true self. How archetypically American can you get? We're all trying to fulfill ourselves, understand ourselves, get in touch with ourselves, face the reality of ourselves, explore ourselves, expand ourselves. Ever since we dispensed with God we've got nothing but ourselves to explain this meaningless horror of life."

Altered States est un film Américain de 1980 réalisé par Ken Russel, réalisateur anglais souvent critiqué pour son obsession pour la sexualité et pour l’église. C’est une adaptation d’un roman de Paddy Chayefsky. Le roman est basé sur la vie de John C. Lilly, un chercheur qui étudiait la nature de la conscience en utilisant entre autre les drogues hallucinogènes et les sons des dauphins. L’histoire est celle de Edward Jessup (William Hurt), un professeur d’université qui étudie la schizophrénie. Il développe une théorie qui considère les autres états de conscience comme des états réels. Il fait de nombreuses expériences en se servant notamment d’un water tank, une cuve ou il s’immerge afin d’augmenter les sensations et la clairvoyance. Il fait ensuite un voyage au Mexique, ou il participe à un rituel chamanique dans la montagne.Le rituel est l’élément perturbateur du film, et fait un peu penser au rituel Ayahusca, et aux descriptions de visions et croyances réelles qu’on peut trouver notamment dans des livres comme Voir de Carlos Castaneda. Après le rituel, Edward va changer. Son entourage le remarque, lui aussi, mais il essaye de leur expliquer sa vision des choses. Pour ses confrères, il a vécu une régression génétique et risque un cancer. Mais pour lui, toute son expérience au Mexique va bien au delà de la médecine ou de la science. Pour lui, ça n’a rien à voir avec la génétique ou un éventuel cancer. Ce qu’il a vécu était bien réel. Il va donc continuer ses expériences et ramener la drogue au Etats-Unis pour l’étudier et en reprendre. Pour le reste, je vous laisse découvrir le film, car ça en vaut vraiment la peine. Et il faut écouter les superbes dialogues et explications du film, car le scénario est vraiment un de ses point fort :

"We all live with it. That unbearable terror is what makes us such singular creatures. We hide from it, we succumb to it, mostly we defy it! We build fragile little structures to keep it out. We love, we raise families, we work, we make friends. We write poems..."



A mes yeux, ce film est un petit bijou. Et il faut d’autant plus en profiter qu’il a bien failli ne jamais voir le jour. Le réalisateur d’origine (Arthur Penn) ayant démissionné, ainsi que le responsable des effets spéciaux. La production a également laissé tomber, mais c’est grâce à Warner Bros qu’il a enfin pu atterrir sur les écrans. Ouf. Tout ça pour avoir une nomination aux Oscars pour la musique… comme quoi ! Mais bon, ce n’est pas seulement la musique qui aurait pu être nominée, c’est l’ensemble. Les acteurs, la mise en scène, tout est réuni pour donner au film le souffle puissant dont il a besoin. Malgré quelques effets spéciaux « fonts verts » qui laissent à désirer, l’esthétique générale des hallucinations reste très intéressante. Il y a une très forte symbolique qui elle, n’a pas d’âge, et le film reste un très grand (et bon) délire visuel.

Je me retiendrai aussi de dire que Enter The Void n’a rien inventé. La fin du film nous donne réellement la sensation d’être en pleine hallucination et de complètement sortir de nous même. C’est intense, violent, troublant, scotchant. On se croirait en plein bad trip sous LSD, et encore. J’apprécie vraiment tous les éléments visuels présents dans ce film et ne m’en lasse jamais. Mon rêve serait d’ailleurs de le voir sur un grand écran de cinéma, avec un bon système sonore. Le rêve !!! J’envie les gens qui ont pu aller voir ça en 1980. Mais bon, je fais avec mon ordinateur, et le film reste carrément orgasmique. Altered States mélange ésotérisme et science-fiction, et réussit un coup de maître là ou beaucoup de réalisateurs se plantent. Faire un film intellectuel qui parle de sortie hors du corps, de plans de conscience, tout ça vu et vécu par un scientifique… Il faut dire aussi que l’acteur principal, William Hurt, fait un travail remarquable. D’autant plus que c’était son premier vrai film ! C’est certes maintenant un visage connu, mais il montre ici une facette « nouvelle » que j’apprécie énormément. Et je trouve que commencer par un film pareil, c’est vraiment, vraiment culotté.



L’univers général du film est intriguant et original, et il y a également de très belles images (notamment celles de nudité). La relation entre Edward et sa femme Emily (Blair Brown) est une très belle relation : a la fois intellectuelle et amoureuse. Mais c’est cette compréhension qu’ils ont l’un pour l’autre que je trouve intéressante. Ce n’est pas le couple creux et stéréotypé qu’on a souvent l’habitude de voir. Il y a une humanité profonde dans ce film.

"You saved me. You redeemed me from the pit. I was in it, Emily. I was *in that ultimate moment of terror that is the beginning of life. It is nothing. Simple, hideous nothing. The final truth of all things is that there is no final Truth. Truth is what's transitory. It's human life that is real. I don't want to frighten you, Emily, but what I'm trying to tell you is that moment of terror is a real and living horror, living and growing within me now, and the only thing that keeps it from devouring me is you."*



Altered States touche à un sujet qui m’intéressait et me fascinait bien avant d’avoir vu le film. Mais c’est très rare de voir des scénarios sur le sujet, surtout aussi bien documentés. Les états de conscience, les drogues hallucinogènes, les recherches faites dans les années 70…. Le seul petit défaut du film est la toute fin. Tout est crescendo pour finalement retomber un peu. Mais bon, c’est vraiment si on veut chipoter, et je me doute que ça devait être une idée de la production pour éviter que le spectateur ne soit pas trop traumatisé. Happy Ending, après tout, pourquoi pas ? Dans tous les cas, Altered States est un film que je conseille à tous les amoureux de la science-fiction, de l’ésotérisme, à tous les gens qui aiment les univers décalés, ou ne serais-ce que pour voir les débuts de William Hurt. C’est un film qu’on oublie pas, et dont on ne ressort pas indemne. Conclusion : Putain, ça c’est du cinéma !!!!!

TRAILER

jeudi 15 décembre 2011

L'épopée humaine du Son au Cinéma by Deckard

Le cinéma, c’est devenu quelque chose de radicalement compliqué. Tandis qu’il y a 60 ans, on trouvait juste une petite bande de potes au générique, désormais c’est une véritable armée qui défile sur fond noir avec de la mauvaise musique (ou pas). Des machinistes, des électriciens, des coiffeurs, des hommes-sandwich, et aussi des mecs qui font du son. On a vraiment besoin d’être 40 pour tenir un micro et appuyer sur des boutons ? Et bien oui, et c’est ce que je vais tenter de vous faire comprendre, sans rentrer dans la technique, qui vous vous en doutez, demande un paquet d’années de formation, de litres de café, de bide qui pousse et de cheveux qui tombent.
Partons d’un exemple concret, avec un personnage fictif, nommé Robert. Robert a 40 piges, il gère à mort l’électronique, l’acoustique, son père est artiste peintre et sa mère vit de sa rente, il a été pistonné mais a aussi beaucoup de talent. Il sera donc notre superviseur technique dans le domaine de la production sonore. Robert vient d’être nommé pour un film de grande envergure, un film avec des robots qui se cognent et des filles avec des jolis culs, « Tranformateur » de Michel Bon, il sera présent partout tout le temps, il ne dormira pas beaucoup, c’est certain.

Robert a donc du pain sur la planche, et doit réunir son armée pour avoir un son qui vrille les tympans et toucher un chèque très convenable, et pourquoi pas avoir une statuette dorée pour le son qui envoie le plus la purée ? Tout doit être parfait, et dans chacune de ces étapes : la pré-production, la production (le tournage quoi), et enfin la post-production.


Allons-y pour la pré-production, Robert doit nous dégoter :


- Un directeur artistique : c’est lui qui, à l’aide de Robert, et en accord avec Michel bon, va devoir définir l’aspect global du rendu sonore, quel son fera le grand chef des robots quand il pète, quelle musique va-t-on mettre quand Morgane Fauxe lave une voiture avec ses nichons, etc… en gros, il fait pas grand chose, il écrit juste des grandes lignes et boira du whisky avec Michel Bon tous les soirs pour se foutre de la gueule de tel ou tel technicien.

- Un chargé de production : c’est lui qui va analyser chaque scène et définir les besoins humains et matériels pour chacune d’entre elles, en d’autres termes : le découpage technique. Combien de micros à placer quand le robot défonce une benne à ordure, en stéréo ? en surround ? Combien ça va coûter ? Doit-on demander une rallonge de budget, ou prendre des stagiaires ? Combien de personnes pour manipuler tout ça, de combien de pistes a-t-on besoin ? Y-aura-t-il beaucoup de bruit sur le plateau ? Ce décolleté permettra-t-il de dissimuler un micro entre les saintes mamelles ? C’est une étape longue, fastidieuse et très importante, la préparation doit être au poil. Naturellement, l’argent prend ici beaucoup de place dans les débats. Le chargé de prod’ passe 80% de son temps au téléphone, il se fait engueuler sans arrêt par le producteur, et a un talent inné pour gérer 98 trucs en même temps.


Sur le tournage, finie la branlette ça rigole plus, normalement tout est prêt, et ça se bouscule au portillon, Robert a du trouver sur Facebook :


- Un chef opérateur : C’est lui qui va effectuer l’enregistrement des différentes sources, il dispose pour cela d’un enregistreur multi-pistes, d’un écran de contrôle, d’une petite table appelée roulante où il va rassembler tous ses accessoires, parmi lesquels des récepteurs sans fils, des câbles, une petite table de mixage, des instruments de mesure sonore, de Time-Code etc… Généralement le setup complet coûte le prix d’une maison. Bref, sur le plateau son, c’est lui le grand chef, et c’est le seul membre de l’équipe à pouvoir réclamer que l’on refasse une prise à cause du son. Il s’assure d’enregistrer les sons « directs », directement liés à l’action, et également des sons seuls, bien souvent l’ambiance d’une pièce, d’un lieu, le bruitage d’un élément du décor etc… Tout ceci interviendra plus tard au montage. Le chef op’ est souvent assez vieux et très fiable, il fume 3 paquets par jour et a la gueule de bois chaque matin.



fantasme ultime, et oui


- Un perchman : Véritable artiste de l’ombre, le perchman s’assure de placer le micro principal au cœur de l’action, à l’aide d’une longue perche en carbone, au bout de laquelle est fixé un micro (souvent appelé micro-canon, c’est à dire très directif) et son dispositif de protection anti-vent, la cage acoustique. Ce brave homme doit prendre soin de ne pas rentrer dans le cadre, de ne pas faire d’ombre, de ne pas faire de bruit, sous peine d’entendre un « COUPEZ » et d’avoir l’air bien con. Bref, le perchman est une belette, un homme sans ombre, discrétion et coopération avec les gens de l’image sont ses meilleurs alliés. Il est souvent de gauche, s’habille avec des vêtements usés mais confortables, et est contre l’intervention en Lybie.



Non, ce n'est pas un chien mort au bout de la perche

- L’assistant son : souvent un jeune Padawan plein d’ambition et déterminé à grimper les échelons, son rôle n’en est pas moins primordial, car c’est souvent lui qui va le plus collaborer avec les acteurs pour le placement des micros HFs, ces fameuses capsules micro miniatures que l’on va dissimuler sous les vêtements de la manière la plus discrète et la moins gênante possible, afin de ne pas rater le moindre mot. Tout un art ! D’autant qu’il y a un câble qui va se balader dans les vêtements de la victime, pour rejoindre le transmetteur sans fil, que l’on met où il y a de la place… ça finit souvent au niveau du cul. Bref, avec du casting féminin, ce petit gredin a le joli rôle, puisqu’il doit savamment étudier les formes opulentes des sources à enregistrer.

- Un deuxième assistant son : il met du scotch sur les câbles, pose sans arrêt des questions à Michel Bon et à Robert, il fait du café et demande sans arrêt aux autres s’il veulent bien transmettre son CV de merde à quelques clients. Son avenir semble radieux.

Naturellement, le directeur artistique et Robert sont présents, car ils gagnent mieux leur vie que les autres, et qu’il faut bien justifier tout ça.


Pour la post-production, là il y a du monde, et le processus prend souvent plusieurs mois, voire un an. Lorsque le montage-image est terminé (ou pas !), tout se fait dans cet ordre-là…


- Le compositeur : il a commencé à bosser il y a quelques semaines, il reçoit des séquences au fur et à mesure, en accord avec le directeur artistique, quelques partitions, qu’il va pouvoir finaliser une fois le précieux montage-image final reçu. C’est un métier de longue haleine, où il faudra créer une musique qui donnera en quelque sorte le ton du film. Bref, faut du talent, et un paquet d’années de conservatoire. Bien souvent, il s’agit de gens avec des cheveux longs qui sont pétés de thunes. Naturellement, la production de la musique en elle-même fait appel à des dizaines d’autres intervenants du monde du son, mais c’est une autre histoire !

- Le monteur son direct : Souvent appelé aussi monteur dialogue, c’est lui qui va se charger de faire le montage des sources sonores enregistrées au tournage. Le chef opérateur lui a transmis un rapport-son qui décrit chaque piste et son contenu. Le monteur direct choisit ce qui est utile, enlève ce qui ne l’est pas, nettoie les bruits parasites, et dresse déjà un panorama de tout ce qu’il va falloir ajouter, autrement dit, ré-enregistrer par la suite.



ProTools, ton meilleur ami


- Le recordeur : intitulé de poste bizarre, qui au final fait du doublage. Bah oui, sur un plateau, parfois on a 3 grues, 2 machines à fumée, 70 personnes et même parfois un réalisateur qui dirige ses acteurs « en live ». Bref, y a du boucan partout et les prises de son directes ne sont pas exploitables. Il faut donc ramener tous les acteurs en studio pour qu’ils doublent leur propre voix. De plus en plus de films font systématiquement appel à ce procédé, le Seigneur des anneaux par exemple. Cela garantit une prise de son hyper-propre. Mais est-ce mieux que le vrai son réel sincère et instantané ? Dans le métier, on va dire qu’il y a 2 écoles…

- Le bruiteur : véritable OVNI du métier, il vit souvent dans un bordel pas possible, où chaque objet qui traine produit un son bizarre. C’est lui qui va devoir recréer, ou enrichir, les bruitages réels du tournage. Frottements de vêtements, coups de feu, bruits de pas, porte qui claque, pet de foufoune, chaise qui grince etc… Plus qu’un technicien, le bruiteur est souvent un artiste assez bizarre, capable de recréer la collision d’un train sur une montagne à l’aide de quelques chamallows et d’un berger allemand. Il a pleins de micros bizarres, vit chez sa mère et sait faire pleins de trucs bizarres avec sa bouche. En bref, un métier très difficile et exigeant.



Des pas sur le gravier? Une biscotte et le tour est joué


- Le monteur son ambiance : véritable chasseur de sons, c’est lui qui va, à partir des sons seuls enregistrés au tournage et de sa propre banque qu’il enrichit dès qu’il part en vacances en Alaska, enrichir le montage image en crédibilisant chaque scène. Vent qui souffle, corbeaux lointains, parois d’une caverne ruisselante, rumeur souterraine… Il s’agit d’une partie très créative, où bien souvent les images prennent une autre dimension grâce à l’apport de sons crédibles. Un métier passionnant, qui se fait avec une étroite collaboration du réalisateur et du directeur artistique, tout ceci peut prendre beaucoup de temps, et peut vite grimper jusqu’à une cinquantaine de pistes.



Un setup classique de montage son


- Le Sound Designer : intitulé assez occulte, dans la mesure où il s’agit souvent d’un monteur son très expérimenté. Egalement présent sur d’autres marchés comme le jeu vidéo, le designer sonore s’occupe généralement de la partir FX sonore, les effets spéciaux quoi… Dans le cas de « Transformateur », il va créer le son des robots, des explosions, des vaisseaux, des cafetières… mais aussi accompagner certains mouvements de caméra par des SWIIIIiiiiiish ou des Woooosuushshhsshhhh. Bref, le sound designer, c’est un peu l’homme à tout faire, il recale des machins, crée des trucs, transforme les musiques… Artistique avant tout, mais techniquement très exigeant aussi.

- Le chef-monteur : il peut très bien être le monteur direct ou le sound designer (ou même tout faire à la fois), c’est lui qui va récupérer les sessions des autres pour tout compiler (en d’autres termes, la fameuse conformation) et en faire la session maître qui partira au mixage. Il finalise les choses, il fait du tri, il corrige ce qui est jugé foireux, il ajoute ce qui manque, mais également il met tout aux normes : Dolby, 5.1 etc… En bref, il peut engueuler les gens, et faire tout ce qui est techniquement possible pour que le mixage soit le plus confortable possible.

- Le mixeur : Grand manitou de la post-prod, son travail est capital, dans la mesure où c’est le dernier du processus de production. Généralement, dans son auditorium, tout le monde se pose peinard, boit du café et se repose après tout le bordel des derniers mois. Le monteur son, le réalisateur et le dirlo artistique sont présents, et surveillent de près ce qui doit être fort, moins fort… Mais le mixeur a du pain sur la planche : correction fréquentielle, gestion dynamique, respect des mesures audio, restauration sonore des sources abîmées, bref, il doit beaucoup créer, sans pour autant avoir le dernier mot, qui sera toujours celui du réalisateur. Du mixage dépend l’ambiance sonore entière du film, c’est un métier merveilleux, mais également long et exigeant.



Après tout ça, le film sort en salle, Michel Bon se fait conspuer par la critique et Robert retrouve son doux foyer, bien que sa femme soit partie entre-temps, car elle en a marre qu’il ne soit jamais là et blablabla. Mais ce n’est pas terminé !!!! Il reste le mixage DVD, le mixage Blu-ray, le doublage pour les autres pays, le mixage en vue d’une diffusion TV… Mais ce n’est pas forcément Robert qui va s’y coller, il a fait son taf, il a réuni sa grande armée, et qui sait… aura-t-il sa statuette dorée.


The End.

mercredi 7 décembre 2011

Gangs of New-York de Martin "Taxi Driver" Scorsese by Jim

Mulberry Street... and Worth... Cross and Orange... and Little Water. Each of the Five Points is a finger. When I close my hand it becomes a fist. And, if I wish, I can turn it against you (Bill the Butcher/William Cutting)



Paradise Square, 1846. La neige ne reste immaculée que le temps d'accueillir la bagarre du siècle qui oppose le gang des "Natives Americans" aux "Dead Rabbits". Bill the Butcher, l'américain, le natif, le vrai américain, contre Priest Vallon, l'immigré irlandais, le faux américain. Sous nos yeux, les coups de couteau, les coupures faites à la hache, le sang, la souffrance, la cruauté, la mort. Amsterdam Vallon, jeune enfant, voit de ses yeux son père mordre la poussière, glisser contre le manteau blanc et froid de la mort. Bill the Butcher et les natifs ont gagné, ce sont maintenant eux qui vont régner sur le quartier : les Dead Rabbits n'existent plus, une page se tourne.

Scorsese, en 2002, est heureux de présenter son dernier-né, Gangs of New-York. Il faut dire que le projet est né dans les années septante, suite à la lecture du livre de Herbert Asbury, sur les gangs et la criminalité à New-York au dix-neuvième siècle. Mais des tas de problèmes en plus de contretemps sont survenus et le film n'a pu se tourner qu'en 2000, à Rome, dans des studios où la ville - New-York - , et plus particulièrement le quartier des Five Points, a été reconstruite pour ressembler à ce qu'elle était un peu moins de deux siècles plus tôt. C'est avec une trame centrale très shakespearienne - à savoir la vengeance de l'assassinat du père- et une ambiance parfaitement transcendée, que Scorsese réussit à captiver. Les décors (et figurants) représentent excessivement bien New-York, telle qu'elle était à l'époque où des milliers d'immigrés, affamés et remplis d'espoir, l'arpentaient. En plus de traiter des problèmes d'intégration de ces nouveaux venus et des difficultés engendrées par le recrutement de chair fraîche pour combattre lors de la guerre de Sécession, le film résume les préoccupations de l'époque dans l'expression suivante: "tout le monde voulait sa part du gâteau". Cette part du gâteau, ça n'est peut-être qu'un logement (in)salubre et un morceau de pain, mais ça peut être aussi une citoyenneté, ou même, le sentiment d'appartenir à ce tout promis à tant de bonnes choses. Parce que la plupart des immigrants étaient des irlandais qui avaient connu la famine dans leur pays, et que pour eux, la venue en Amérique représentait la poule aux oeufs d'or.

Dans cette optique, Priest Vallon et ses Dead Rabbits aspiraient à pouvoir se faire une place au soleil - ou plutôt dans la grisaille New-Yorkaise - sous les effluves de crasse des Five Points. Mais c'est ici que Bill the Butcher intervient : en refusant de laisser les migrants affirmer leur identité et avoir eux aussi, une part du "gâteau", le personnage les réduit au silence et les asservit : tout le monde, en 1862, travaille pour lui, même les irlandais qui avaient pris les armes contre lui en 1846 avec Priest Vallon. Douce ironie, en 1862, quand Amsterdam revient dans le quartier des Five Points, c'est pour retrouver ce coin de son enfance transfiguré, aux mains des natifs et, surtout, de Bill.

Well draw it mildly son. Happy Jack don't fill his lungs without I tell him he may do so(Bill The Butcher/ William Cutting)



Comme on peut s'en douter, la bataille finale entre Amsterdam et Bill the Butcher n'intervient qu'à la fin du film, après deux heures d'une exploration historique et sociologique de la grosse pomme, telle qu'elle était jadis. En plus de ce panorama sur la vie de l'époque, l'histoire décrit une relation qui se dessine entre Bill et Amsterdam : le natif prend sous son aile le jeune irlandais, et finalement, une sorte de lien père-fils s'installe entre eux. De quoi rendre encore plus shakespearien le film. Autour de ce lien gravitent des personnages secondaires, qui ont tous leur importance, leur influence sur le duo : Jenny, la pie voleuse, Johnny, le "second" d'Amsterdam presque, Monk McGinn, qu'Amsterdam prenait pour le plus vendu de tous mais qui pourrait être le plus loyal, Boss Tweed, le politicien véreux, les anciens Dead Rabbits, et la nouvelle génération d'irlandais.

De Gangs of New-York, on retiendra Daniel Day-Lewis, dans son interprétation magistrale de Bill the Butcher : l'acteur le plus doué de sa génération, le plus viscéral sûrement, n'avait plus rien fait depuis The Boxer de Jim Sheridan en 1997°. Comme à l'accoutumée, Day-Lewis s'est jeté à corps perdu dans le personnage qu'il devait interpréter : il s'est mis à parler avec un vieil accent - même en dehors du plateau - et a appris comment se servir de ses couteaux (en tant que boucher). L'implication dont l'acteur irlandais a fait preuve se reflète dans son jeu méthodique, froid, souverain ; il crève l'écran, les autres acteurs font pâle figure à côté de lui. C'est bien dommage, car DiCaprio ne tient pas la route face à Day-Lewis, malgré tout, ce n'est pas parce qu'il n'est pas un bon acteur, mais c'est parce que face à un Dieu, un mortel reste inférieur. Gangs of New-York était aussi une occasion pour Cameron Diaz de prouver qu'elle n'était pas juste bonne à se pavaner en balançant son derrière .



Scorsese n'a pas réalisé son meilleur film avec Gangs of New-York, mais il a encore une fois prouvé qu'il pouvait faire une histoire intrigante, bien ficelée et prenante du début à la fin. L’exploit, c’est bien sûr le personnage de Bill the Butcher, monstre de cruauté, pervers raciste qui se délecte presque de la souffrance d’autrui. Un personnage haut en couleurs pour une ville en pleine élaboration. Drame shakespearien qui a pour décor la violence et l’injustice, Gangs of New-York est une œuvre qui doit sa grandeur à Daniel Day-Lewis, un vrai monstre en Bill the Butcher, mais surtout, un monstre sacré du cinéma.

* Jim Sheridan est d'ailleurs le réalisateur avec lequel Daniel Day-Lewis a le plus travaillé : ils ont tourné ensemble My Left Foot, In the Name of the Father, et The Boxer. Cela dit il semblerait que Day-Lewis soit sur le point de tourner encore avec Scorsese, ce qui mettrait les deux réalisateurs à égalité. Day-Lewis a joué dans deux films de Scorsese : The Age of Innocence, et Gangs of New-York.


trailer
la version délire RPR des guignols

Hedwig And The Angry Inch (2001) by Dylan



"My sex change operation got botched; my guardian angel fell asleep on the watch; now all I got is a Barbie doll crotch; I've got an angry inch!"

Hedwig and the Angry Inch, comédie musicale off-Broadway, a été adapté au grand écran en 2001. C’est James Cameron Mitchell, l’auteur de la pièce, qui s’en est chargé. Et c’est tant mieux, car qui d’autre aurait pu réaliser un film avec un personnage aussi complexe, sinon le créateur même de ce rôle ? Le réalisateur de l'excellent Shortbus montre qu'il sait parler de sexualité comme personne, et sans y aller doucement. Ce coup-ci ,il va encore plus loin, en interprétant lui même le rôle qu’il a créer en 1994. C'est la première fois depuis Shortbus qu'il se remets à jouer la comédie, lui qui était acteur dans les années 90. J’ai voulu vous parler de ce film, car je trouve qu’il fait partit des OVNIS dont personne ne parle, et que c’est bien dommage. S’il fallait le comparer à d’autres, je dirai que c’est un mélange entre Velvet Goldmine et The Rocky Horror Picture Show. Lorsque glamour rencontre le rock and roll. Lorsque les hommes sont des femmes et les femmes sont… tout aussi étranges.

L’histoire est celle d’Hedwig, un transsexuel allemand qui a un groupe de musique controversé, provocateur et visuellement violent. Quelques temps avant le début du film, on comprend qu’Hedwig a vécu une relation musicale et amoureuse avec un jeune homme : Tommy Speck (Michael Pitt), mais que celui-ci s’est ensuite tiré de son côté, lui a volé ses chansons, et est devenu une star du rock. Dégoûtée, trahie, Hedwig suit alors la tournée du jeune homme de ville en ville en jouant dans des restaurants bas de gamme. Hedwig ne manque pas de dire à la presse et à tout le monde qu’on lui a volé ses chansons, mais peu de gens s’intéressent à l’histoire et peu de gens y croient. Alors Hewdig se défoule sur scène et, grâce à son micro, parvient encore à faire passer son message. Du moins c’est ce qu’il pense, car en dehors de son groupe, il est bel et bien seul, incompris, et surtout incomplet.



Hedwig est un des personnages de fiction les plus fascinants qu’il m’a été donné de voir dans un film. Sincèrement. Pas pour son statut de transsexuel, mais pour la façon dont il perçoit la chose. Rien à voir avec les hommes qui se prennent pour des femmes et se dandinent machinalement sans y réfléchir. Ici, nous avons affaire à un personnage philosophe, poétique, mais qui a une vision acharnée et très dure sur ce qu’il est et ce qu’il aurait du être. Car Hedwig a été mutilé par un chirurgien, n’acceptant l’opération que pour faire plaisir à son premier amour, un militaire américain, Luther Robinson, qui l’avait prit pour une femme. Il lui demandera alors de se détacher d’une partie de lui même : de son pénis, pour qu’il puisse l’aimer pleinement et l’épouser. Une demande égoïste, qu’Hedwig, jeune, acceptera sans se poser de questions. Son nom Angry Inch est le nom qu’il se choisit pour parler de ses parties génitales mutilées. Son identité, elle est trouble, double, incomplète. Hedwig recherche son âme sœur, la personne qui sera sa partie manquante, celle qui fera qu’il se sentira à nouveau entier. Avant d’être Hedwig, il s’appellait Hansel et habitait à Berlin Est. Il essaye de faire carrière là bas avant de réaliser qu’il ne correspond pas aux mœurs de son propre pays : "I had tried singing once back in Berlin. They threw tomatoes. After the show, I had a nice salad." C’est donc un personnage fort, qui balance entre ses origines d’un pays séparé en deux, et son rêve de rock et d’Amérique.



"Tout au long du film, Hedwig fait référence au discours d'Aristophane dans Le Banquet de Platon. Ce discours, rappelé dans la chanson Origin of Love, raconte le mythe de l'androgyne ; chaque être humain était à l'origine double, puis fut séparé par Zeus, effrayé par leur pouvoir rivalisant presque avec celui des Dieux." (Wikipedia)

Hedwig devient donc un personnage mythologique, se confiant à nous à travers des chansons, des textes, des questionnements. Le film balance entre poésie, philosophie et musique. Les acteurs sont bluffants, surtout John Cameron Mitchell (Hedwig) et Miriam Shor, qui joue son acolyte : une femme déguisée en homme. Et pour un film dont le thème est la sexualité et le transgenre, il est étonnant d’avoir la sensation que le sexe, qu’il soit masculin, féminin, ou entre les deux, n’a absolument aucune importance lorsqu’on parle d’amour et d’épanouissement. Pour cela, ce film est très fort. Il se dégage des clichés et, même lorsqu’on l’attend au tournant, nous montre qu’il repose sur un scénario intelligent et un personnage très, très complexe. Mais la complexité du personnage d’Hedwig n’est pas un problème : il passe le film à nous transmettre ce qu’il est et ce qu’il ressent, et tout ça, sans artifices, malgré le monde de paillettes et de maquillage. Hedwig and the angry inch est un film de contrastes. Le glamour cache l’horrible vérité, l’amour est toujours décalé, le sexe sous entendu. On remplace un pénis par des ours en gélatine, le sang par les paillettes, la haine par des chansons.

"It is clear that I must find my other half. But is it a he or a she? What does this person look like? Identical to me? Or somehow complementary? Does my other half have what I don't? Did he get the looks? The luck? The love? Were we really separated forceably or did he just run off with the good stuff? Or did I? Will this person embarrass me? What about sex? Is that how we put ourselves back together again? Or can two people actually become one again?"

Croyez-moi, faire une comédie musicale qui n’est pas nunuche et qui transmets autant d’émotions violentes à travers des mots (moins à travers les chansons) , c’est un coup de maître. Une leçon de cinéma. Mais au delà de ça, pour ceux que ça n’intéresse pas plus que ça, c’est également une œuvre à connaître, ne serais-ce que pour les nombreux hommages musicaux existants. Type O Negative, Meat Loaf, Lemon Demon, et même Rufus Wainwright ont tous reprit des chansons tirés de la comédie musicale, ou y ont fait référence. C’est également devenu un film culte, presque au même titre que le Rocky Horror Picture Show, étant donné que certains fans vont jusqu'à rejouer le film lors de séances, en se déguisant etc.

Le film balance de l’humour noir sans mettre de gants, et en fait quelque chose de vraiment violent psychologiquement. Les scènes musicales m’ont un peu moins plus, a part quelques unes. Mais ce film m'a donné envie de m'intéresser au reste de la filmographie du réalisateur, ce qui est assez rare. En dehors des chansons et d'un Michael Pitt un peu agaçant, le reste m’a tellement scotchée que je me suis laissée portée par la voix d’Hedwig, tantôt douce, tantôt vicérale. Malgré mon énervement personnel pour les transsexuels hommes. Un bon moment de rock and roll.

mardi 29 novembre 2011

Pourquoi Contagion est une arnaque by Jim

Steven Soderbergh est mort, définitivement mort. Si le réalisateur avait vu sa carrière décoller en 1989 avec l’obtention de la Palme d’Or pour son film Sex, Lies, and Videotape, l’apogée de son ère cinématographique se situait entre Out of Sight en 1998 et Ocean's Eleven en 2001, avec comme sommet de la pyramide Traffic en 2000 ou alors l’autre film réalisé cette année-là, Erin Brockovich. Quoi qu’il en soit, quelque soit votre position sur le cinéma de Soderbergh, chiffres à l’appui, on ne peut nier le fait que sa carrière est en chute libre depuis quelques années. Parce qu’entre Ocean’s Eleven et Che, il n’y a rien : que des non-succès au box-office et des râlements de fans ou cinéphiles déçus du mec qui avait eu un certain sens du rythme, de la mise en scène. Che, en 2008, faisait revenir Soderbergh « au devant de la scène » sans pour autant le (re-)consacrer. Les critiques ont beau avoir encensé ce biopic en deux parties, le public n’a pas suivi, et catastrophe, les deux films ont coûté plus cher que ce qu’ils n’ont rapporté. En 2009, même constat pour The Informant avec Matt Damon dans le rôle principal.
Il y a quelques mois (ou peut-être un an déjà ?!) Soderbergh avait annoncé sa retraite en clamant que « le cinéma, c’est comme Capri, c’est fini, et dire que c’était la ville de mon premier amour». Malheureusement pour nous, le réalisateur s’était sans doute foutu de notre gueule, parce qu’il a quelques films en chantier et, son nouveau film destiné à un grand public, Contagion, vient de sortir. Exposons ici pourquoi Contagion est un retour aussi raté que celui de DSK sur TF1.



Déjà, l’affiche du film trompe énormément, comme un éléphant du PS. Des grands noms, des visages connus, une police aussi sanglante qu’horrifique qui annonce un tagline dantesque, à savoir, « que rien ne se propage comme la peur ». De quoi faire trouiller les non-avertis. Citons aussi vite l’exemple des publicités pour la radio, qui jouent sur le même tableau : bruits rappelant l’apocalypse – telle que le cinéma nous l’a déjà décrit au travers de films de zombies par exemple -, déclarations des autorités sanitaires et politiques qui font écho à la grippe porcine, et doublures françaises toujours aussi atroces à écouter. Mais la cerise sur le gâteau, c’est la bande-annonce (mensongère), qui est tout à l’inverse du film : elle présente une histoire qui semble complexe, intéressante et rythmée.
En réalité, il n’en est rien, ce qui est d’autant plus drôle que Soderbergh était adulé pour son sens de la cadence il y a dix ans, sens qu’il a visiblement complètement perdu quand on se retrouve devant Contagion, un film qui capte l’attention vingt minutes avant d’agir sur la formation réticulée du spectateur et de l’endormir sur son siège.



Contagion présente une épidémie mondiale, pire que la grippe porcine (qu’on cite allégrement, sans doute pour réactiver les zones du cerveau peuplées de croyances par rapport aux épidémies), qui décime petits et grands et isole la population survivante dans une crise d’angoisse sinistre. Tout au long du film, nous suivons plusieurs protagonistes impliqués de près ou de loin dans le développement ou l’éradication de la maladie : des médecins, des chercheurs, un blogueur, un père de famille. Plusieurs problématiques sont abordées en une heure quarante-cinq : les questions de prise en charge des patients, de prise en charge des familles, de santé publique, de remèdes alternatifs, de populations désavantagées par rapport aux autres (ici, l’Asie), l’hypocrisie et les mensonges des Etats, etc. On multiplie donc les intrigues, ce que Soderbergh maîtrisait dans Traffic, mais qu’ici, il émancipe de tout intérêt : on effleure les personnages, et on ne ressent d’ailleurs aucune véritable empathie pour eux, puisque on les connaît à peine, on ne les comprend pas non plus, forcément. Tout est présenté d’une façon superficielle, quasi-anecdotique. On regrette de ne pas avoir creusé le personnage insupportable de Jude Law qui promettait clairement plus que l’apathie de Matt Damon, en papa poule qui veut sauver sa fille.



A vrai dire, il y avait beaucoup de bons éléments à exploiter dans Contagion, il fallait forcer le rythme, créer un climat hostile et asphyxiant (voire apocalyptique total), souligner le travail (ou l’hypocrisie, au choix selon les convictions) des autorités sanitaires, faire entrer le spectateur dans la peur, la vraie peur, la panique même. A la place, Contagion est plutôt un iceberg : une structure de glace dans laquelle il est impossible de s’immiscer. Structure de glace parce qu’il est mal aisé de cerner ou même d’apprécier les personnages, qui, sur l’écran, ressemblent à des ombres fuyantes impossibles à suivre, il y en a d’ailleurs trop à essayer de traquer. La froideur des relations à peine esquissées entre ces protagonistes est d’ailleurs une erreur de plus : Contagion est lésé d’un point de vue émotionnel, ne promet aucune autre sensation que celle de l’ennui. L’autre grand problème de taille – qui freine définitivement toute tentative d’appréciation- est le rythme du film, soporifique à souhait après la surprise engendrée par les vingt premières minutes, qui vont de découvertes en stupéfactions. C’est dommage, il y avait beaucoup à tirer d’un film pareil. Mais voilà, Soderbergh aurait mieux fait de prendre une – vraie- retraite un peu plus tôt afin de nous épargner cette énorme ineptie de bas étalage qui exhibe grossièrement des têtes connues (sans doute pour s’attirer de gros dollars ?!) pour palier au manque de consistance du film (qui n’est qu’en fait une présentation très brève et stéréotypée des causes et conséquences d’une épidémie mondiale).

trailer

Takeshi Kitano 3/3 : Glory to the Filmmaker by Viyanne

Dernier article de ma série sur Takeshi Kitano il est à présent temps de se pencher plus sur le côté drôle et insensé de l'homme.



Pour cela j'ai décidé de vous présenter Glory to the Filmmaker.

Glory to the Filmmaker est un film de Takeshi Kitano, avec Takeshi Kitano et racontant les aventures de... Takeshi Kitano.

Mais qu'est-ce-que, en pratique ça peut bien raconter ?
Le film nous raconte en fait les difficultés de Kitano dans sa quête : réaliser le film ultime pour les amateurs de cinéma.
Pour cela il va donc étudier toutes les pistes et les genres possibles ; quel va être le genre du film ? ah tiens, peut-être un film d'amour parce qu'il n'en a jamais fait ! Ou un film d'horreur, car ces dernières années ça marche bien les films d'horreur ! Voici la démarche de base du film, se questionnant, montrant Kitano et sa doublure en pleins déboires, face aux doutes et parfois fonçant dans le mur.
Mais au final Kitano trouve l'idée et une idée absurde mettant en scène des personnages on ne peut plus absurdes justement !
Tellement que je n'arrive pas à vous en faire un vrai résumé digne de ce nom.
En gros un brin de n'importe quoi, un autre d'humour et surtout beaucoup de non sens et d'autodérision.

Glory to the Filmmaker donne rapidement le ton, dans les premières scènes on se retrouve dans un hôpital où des médecins font des examens sur un mannequin.
Examen se soldant par un "Dites lui qu'il vienne en personne la prochaine fois".
Car ce mannequin c'est la doublure de Kitano dont je vous ai parlé un peu plus haut.



Ensuite on a droit à plusieurs projets, de plusieurs tentatives de Kitano pour réaliser ce film ultime, toutes se soldant par un échec.
Dont une par la phrase "Qui veut voir des films pesants où des gens boivent du thé ou de l'alcool pendant une demi-heure ?".
Kitano se moque avec tendresse du cinéma japonais mais aussi de son propre cinéma dans ce métrage.
On y croise du tout et du n'importe quoi : comme des catcheurs qui tiennent un restaurant et démolissent tous ceux qui se plaignent de la nourriture, un méchant savant fou aux inventions dingues qui rit en permanence, une pseudo parodie de Matrix et encore beaucoup d'autres choses toujours plus cocasses les unes que les autres.

La force et la faiblesse de Glory to the Filmmaker c'est d'être toujours sur la corde raide entre l'humour et le n'importe quoi, ce qui rend le film parfois légèrement dur d'accès si on cherche à suivre "l'histoire" tant elle part dans le flou et dans tous les sens.



Glory to the Filmmaker peut être pris comme un exercice de l'auteur mais aussi un demi aveu d'un manque d'inspiration tout comme l'inverse.

lundi 21 novembre 2011

Twilight: Breaking Dawn (2011) by Dylan



Twilight 4 : Breaking Dawn, le dernier film de la saga, première partie. (Bien qu’on se demande ce qu’ils vont mettre dans la deuxième). Aller, on prend les mêmes et on recommence. Ce coup-ci, on ne débute pas par Bella et Edward qui papillonnent dans un champ, mais par Bella qui apprend à marcher avec des talons. Ben oui, parce qu’elle va se marier, et qu’elle est obligée de se coltiner tout l’attirail. Bella va enfin devenir une femme en perdant ENFIN sa virginité (après le mariage bien sûr). Sauf que Bella flippe quand même un peu, parce que dans son cas, elle ne se marie pas vraiment jusqu’à ce que la mort les sépare. Elle se marie vraiment pour l’éternité. Parce qu’après le mariage, et après la nuit de noce, Bella va devenir vampire. Elle sera donc mariée à un émo tout blanc pour toujours. Mais bon, en attendant, Bella se prépare pour le mariage, et tout le monde se réunit dans les bois pour l’occasion. Le père de Bella n’est pas content que sa fille se marie à 18 ans mais il fait avec, en picolant et tirant des gueules de 3 mètres de long. Bella elle, nous dit grâce à une « super » narration que le temps de l’enfance est terminé et qu’elle grandit. Sous entendu, elle va bientôt se faire troncher et oublier ses rêves. Ou dans le cas de Bella, elle va ENFIN se faire troncher. Parce que bon, mine de rien, ça fait quand même quatre films qu’on attend ça.

Mais bon, en attendant, elle insiste pour faire l’amour pour la première fois en étant humaine. Même si c’est vachement dangereux, parce que Edward est vachement costaud et risque de la défoncer. D’ailleurs, tout ça ne plait pas du tout à Jacob. Jacob, il enlève toujours son t-shirt, mais il a de la barbe maintenant, il est plus mûr, alors il se fout moins à poil. Mais comme il est dégouté que Bella épouse Edward, il passe ses journées à courir dans les bois en loup-garou. Bah oui, ça défoule de courir nu dans les bois ! Finalement, Jacob vient quand même au mariage de Bella, invité par Edward. On ne sait pas pourquoi d’un coup Edward est devenu "pote" avec Jacob alors que dans le film d’avant, il avait quand même roulé des galoches à sa femme. MAIS BON. Pendant le mariage, Bella parle donc avec Jacob, danse avec lui, le serre dans ses bras pendant qu’il essaye lamentablement de l’embrasser dans le cou. Bella dit à Jacob qu’elle va coucher avec Edward en étant encore humaine. Et Jacob ramène ses potes chippendales pour lui faire la morale. Quel beau mariage ! Avoir une bande d’adolescent qui viennent te parler de ta virginité dans les bois. La classe quoi. Après le mariage, les deux partent en lune de miel, et tout semble bien se passer. Bella stresse, mais sa première fois se passe super bien. Sauf qu’elle a quelques bleus sur elle et que du coup, Edward se persuade qu’il lui a fait super mal et décide…de ne plus coucher avec elle. SUPREME FAIL. Du coup Bella n’est plus vierge mais elle veut encore niquer Edward. Encore et encore et encore. Vous l’avez compris, Bella est enfin une cochonne qui s’assume. Mais Edward ne veut pas, alors elle insiste, elle l’allume, et elle arrive à le faire craquer.Quelle sale tentatrice qui considère le sexe comme du plaisir ! BOUH.


Fuck me....

Heureusement, Twilight est très branché morale et va donc faire comprendre aux petites adolescentes que si tu es trop cochonne, tu vas prendre grave cher. Alors voilà, comme Bella ne connaît pas les capotes, et qu’elle pense que les vampires ça n’a pas de sperme….Bah elle tombe enceinte. Sauf qu’elle est enceinte d’un vampire, donc son bébé grandit 50 fois plus vite que la normale. Elle se retrouve alors enceinte après seulement 14 jours de mariage. Et son ventre grossit à vu d’œil. Et évidemment, elle ne veut pas avorter. Alors elle mets sa vie en danger, parce qu’être enceinte d’un bébé vampire, ça va clairement la tuer. Et il n’y a rien à faire. Ils passent alors tout le film à criser, à s’inquiéter, et a essayer de trouver une solution pour sauver Bella, sauver le bébé (ou le buter, selon les personnages). Tout le monde s’en mêle, les loups aussi. Le bébé est en train de tuer Bella vu qu’il est « trop fort » pour elle. La seule solution pour la sauver c’est qu’elle boive du sang. Alors elle le fait. Et elle kiffe. Mais ça ne suffit pas. Bella va-t-elle survivre ? Ou va t-elle regretter d’avoir été une petite cochonne à seulement 18 ans ? Jacob va-t-il empêcher ses potes de tuer Bella et son bébé?


Oh shit....

Au delà de l’histoire de merde, je dois avouer que j’ai été très surprise de la qualité de ce dernier film. Evidemment, ça reste à l’eau de rose, mal joué pour pas mal de personnages, et sans grand intérêt une fois sortit de la salle. Mais je voudrais dire BRAVO à l’équipe maquillage et effets spéciaux. Bella, lorsqu’elle est enceinte, devient tout maigre (sauf son ventre), toute blanche, toute frêle, et franchement flippante. Ce que j’ai apprécié dans le film, c’est la violence des images (oui oui). Ils n’ont pas hésités à vraiment rendre Kristen Stewart « horrible ». C’est très, très bien foutu. La scène de l’accouchement aussi, et tout ce qui suit après. Pour ça, j’ai été surprise, moi qui m’attendait à ce qu’ils épurent tout ça pour faire plaisir aux petites adolescentes qui s’identifient à Bella. Mais non, elle s’en prend vraiment plein la gueule, et tout le côté psychologique, relation entre elle et Edward etc… c’était réussi. Ca, c’est pour le côté positif. Mais il prend une place importante dans le film, et c’est pour ça que je trouve que c’est le plus réussi des Twilight, avec le 3. Par contre, les personnages secondaires sont clairement inutiles. On ne les voit presque pas et leurs scènes ne servent à rien et sont souvent mal jouées. La pote de Bella qui est jalouse, son père qui décidemment n’a jamais joué correctement depuis le début… sa mère en hippy/mère idéale, Jasper en mode beau gosse qui a UNE phrase de dialogue (Legolas power). On a aussi les deux loups qui décident d'aller aider Jacob, tout ça parce que Jacob fait le rebel et que ça les change de leur routine pourri... Et même quand on pense que le film est fini, on nous colle une scène surprise en plein dans le générique de fin, avec les Volturi (qu’on a pas vu de tout le film) qui nous disent que même si Bella devient vampire, leur conflit ne s’arrêtera pas, car la famille Cullen a quelque chose qu’ils veulent. (Le bébé? Ou autre chose?) OUUUUH SUSPENS !!!!!!

Conclusion : une bonne surprise, je m’attendais à bien pire que ça. Mais le film (et le livre) est beaucoup trop moralisateur. Il y a des passages drôles, de très bonnes idées, et une violence assumée, surtout vers la fin. Et rien que pour voir Jacob tomber amoureux du bébé de Bella (oui oui, un bébé), c’est franchement énorme. Twilight est donc un film qui vous dit que le sexe c’est mal, mais la pédophilie, c’est bien.

Eraserhead, David Lynch (1977) by Wayne

Eraserhead.
Rien que l'évocation de ce titre de film provoque chez certains une urticaire spontanée et chez d'autres des déclarations amoureuses ; et il en faut, des débats passionnés pour extraire la substance de ce premier long métrage indépendant devenu culte. David Lynch nous a-t-il livré le meilleur film de tous les temps ou s'est-il vastement foutu de la gueule du spectateur ?



Alors, de quoi en retourne-t-il ? Pourquoi tant de battage ? Premièrement, Eraserhead est une œuvre qui a mis longtemps avant d'avoir pu voir le jour en 1977. En effet, au départ c'était un court métrage nommé GardenBack, traitant de l'adultère, rien à voir. David Lynch faisait ce court métrage grâce à quelques bourses obtenues grâce à ses courts métrages précédent, et finalement il remplace le scénario original par celui de Eraserhead et commence à le tourner. Seulement, lorsqu'il présente une des scènes à l'American Film Institute, qui l'aidait au financement, ceux ci se retirent totalement. Lynch se retrouve donc sans aucune aide, et va devoir compter sur les apports financiers de ses collaborateurs et de sa famille pour mener à bien son film... et ça va durer plus de cinq années. Deuxièmement, on peut dire que les mecs ont su faire une promo vraiment astucieuse : le film étant diffusé en seconde partie de soirée dans deux cinémas New Yorkais (à l'affiche pendant 4 ans en Midnight Movie quand même), les spectateurs sortants de la salle se voyait offrir un petit badge « Eraserhead, i saw it ! », qui pouvait ensuite titiller la curiosité de tous les gens qui le voyaient.
Le film en lui même associé à son histoire, et sa rareté en salle, la coupe de cheveux de Jack Nance, tout ça a contribué à faire de Eraserhead un film culte.

Mais alors, de quoi ça parle ? L'histoire en elle même est assez simple.
Henry (interprété par Jack Nance) est un imprimeur un peu attardé (voire autiste vu sa difficulté à communiquer) confronté à la morosité de son quotidien. Une existence pathétique et morne qui ne l'épargne pas des coups durs, puisqu'il apprend bientôt que Mary (Charlotte Stewart), cette sainte nitouche ultra émotive qu'il n'a pas vu depuis des semaines, a accouché de son fils. Une malédiction pour lui, qui voudrait déjà vivre sa propre vie... Pourtant la mère de Mary insiste pour qu'Henry prenne ses responsabilité et épouse Mary. En fait, son seul échappatoire, c'est le rêve.

Bon, ça a l'air simple comme ça, mais faut pas oublier que c'est le premier long métrage de Lynch, et donc il s'est lâché dessus. Il ne va pas te dire directement quand est ce que vient la réalité, quand est ce qu’apparaît le rêve. Pas du tout même. Les deux se mélangent.
Henry est tellement accablé par son existence qu'il rêve aussi bien éveillé qu'endormi, ce qui fait qu'on peut assister à des scènes totalement surréalistes et purement métaphoriques. Si Lynch avait voulu faire passer le message « il s'est précipité dans la gueule du loup », il aurait tourné une scène où le personnage cours dans la gueule d'un loup géant. C'est un peu comme ça qu'il faut le voir.
Ainsi, la scène du dîner, quand le père de Mary demande à Henry de couper un poulet histoire de dire « tiens, montre nous que tu as les choses en main, montre nous que tu es de la famille », il voit la carcasse de poulet essayer de remuer ses ailes déplumées, puis en train de saigner... ce qui effraie Henry qui se rend compte que c'est ce qui va lui arriver s'il accepte d'entrer dans la famille : il se retrouvera coincé, il ne pourra pas « s'envoler » et en attendant sa mort. Reste à savoir si c'est ce qu'il s'imagine...
La seule scène a aborder le rêve de façon explicite est celle qui donnera le nom au film. Scène contenant à peu près tous les clichés de Lynch, déroutante, extraordinaire et passionnante.



Tout est donc centré sur Henry. Certains diront qu'il y a trois personnages primordiaux en plus de lui... Je pense qu'on peut réduire au moins deux de ces personnages à Henry lui même et sa coupe de cheveux aussi extravagante que le film. Ces deux personnages liés à Henry sont le bébé d'Henry (qui ressemble a une salamandre mutante indescriptible), et l’énigmatique femme du radiateur... Le troisième personnage est la femme fantasme de l'autre côté du palier.
Ha oui, là ça devient un peu plus spécial, je vous l'accorde ! Je vous laisserai trouver quels rôles ont ces personnages pour Henry...
Cependant, si on regarde de plus prêt la filmographie de Lynch, on décèle quelques thèmes qui reviennent souvent et qui donnent un indice quant à l'interprétation des rôles de ces personnages : le double (parfaitement identifiable dans Lost Highway et Mulholland Drive par exemple), et le personnage prisonnier de sa condition qui ne peut en sortir que par sacrifice.

L'image en noir et blanc complète parfaitement le propos et va de pair avec la musique qui joue un rôle important en complément des images. Elle accentue l’atmosphère froide et industrielle de la vie d'Henry, comme si elle donnait plus d'importance aux décors qu'aux personnages eux même ; ce qui est très intéressant, puisqu'on a l'impression dans le film que Lynch a voulu montrer à quel point la vie d'Henry et des personnes qui l'entourent est sans intérêt, et par conséquent, effrayante.
Le seul morceau qui diffère de ça est la chanson de la femme du radiateur (radiateur ? Froid ? Chaud ? Coïncidence?), entêtante et...énervante (totalement subjectif). Sorte de comptine très explicite sur l'interprétation que l'on peut faire de la fin du film.



Il est clair que ce film est très intéressant dans le fond et même la forme. Cependant, il est vraiment extrêmement difficile d'y entrer. J'ai moi même eu énormément de mal, je me suis quasi forcé à le regarder, motivé et animé seulement par la question « où est ce que ça mène »... Peut être que si j'avais lu mon article avant de voir le film, j'y aurais eu plus d’intérêt dès le début (retour vers le futur). Mais là, même en ayant vu et apprécié la plupart de ses films, ce fut dur. Et pourtant j'ai quand même pu pondre cet article plutôt mélioratif. Improbable.
C'est en fait peut être cela, l'effet d'un film culte.

En tout cas maintenant, si vous voulez le voir, vous êtes prévenus !

Drive de Nicolas Winding Refn by Jim

If I drive for you, you give me a time and a place. I give you a five-minute window, anything happens in that five minutes and I'm yours no matter what. I don't sit in while you're running it down; I don't carry a gun... I drive (The Driver)



Drive commence sur ces quelques mots d’un homme mystérieux qui porte un blouson orné d’un scorpion dans le dos. L’homme regarde les lumières de la ville – Los Angeles – et part dans l’ombre, dans la nuit. La première vraie séquence du film montre ce même homme dans une activité qu’il maîtrise avec brio et froideur : celle d’être le chauffeur de malfrats qui font des casses. Son cure-dent coincé entre les lèvres, des cernes marquées sur son visage, « The Driver » ne fait qu’une chose : conduire.

Drive est le film de la consécration, pour Nicolas Winding Refn, le réalisateur de la trilogie danoise Pusher et de Valhalla Rising, mais aussi pour Ryan Gosling, un acteur qui, depuis ces quelques dernières années, ne cesse de nous épater avec des rôles qui vont toujours plus loin dans le grandiose. Refn s’est vu récompenser – pour sa réalisation épatante et stylée - avec le prix de la mise en scène, à Cannes, en 2011, et Gosling, lui, s’est contenté de devenir une figure, un acteur imparable, forcément et définitivement incontournable. Dorénavant, quand on parlera de l’acteur canadien, ce sera pour l’encenser dans le rôle difficile du Driver, ce personnage étrange, quasi-impassible, presqu’incompréhensible, mais tellement soucieux d’une chose : de la femme qu’il aime, même s’il n’a pas le droit de le faire. On peut dire que dans la carrière de Gosling, il y aura un avant et un après Drive ; il est entré dans la cour des grands, est devenu intemporel, comme un De Niro avec Taxi Driver, un Pacino avec Scarface, ou un Brando avec The Godfather. The Driver est un rôle comme on en a une fois dans sa vie. Un de ces rôles qui vont marquer des générations de cinéphiles à force de leur glacer le sang et de les pousser dans leurs derniers retranchements. Pour revenir à Refn, il a également beaucoup de mérite : celui de faire un film qui n’appartient à aucun genre, qui défie les catégories : si le fond de l’histoire peut faire penser au western (le cowboy solitaire qui sauve la veuve et l’orphelin), en une heure quarante on passe du drame à la sauce Cronenberg (certaines scènes font penser à A History of Violence) au romantique anti-mainstream (l’histoire entre Irene et The Driver ne tombe jamais dans le cliché rose bonbon).

Bien sûr, Drive est tout sauf un film d’action : il n’y a que deux scènes de poursuite en voiture – parfaitement maîtrisées-, et, on s’attarde plus sur The Driver que sur les cascades. C’est un peu ça Drive : un film bizarre, violent, inattendu, stylé, mais pas un Fast and Furious 6, et heureusement. D’un point de vue psychologique, on n’entre jamais dans les clichés faciles, ni dans les heuristiques habituelles : le personnage principal, The Driver, ou Kid pour son boss, est un personnage comme on en voit rarement, difficile à cerner : on ne sait rien de lui, ni son prénom, ni s’il est fils, frère ou ami. Un mystère total joué avec brio par Gosling, qui cultive sa part d’ombre pour nous emmener là où on ne revient plus, ou du moins, où chaque minute est lourd, véhémente. En plus d’être aussi fuyant qu’une ombre, The Driver séduit. Même lorsqu’il est méthodique, distant, placide, violent d’une certaine façon, le personnage ne perd aucunement son charisme : il étincelle, il est le sexe à l’état pur. Les rares sourires qui ornent le visage du Driver ne sont que des sortilèges qu’il lance, sans le savoir : sa dualité est elle-même enivrante, presque magique, surtout parce que tout ce qu’il fait, même les gestes les plus virulents, ne sont que le résultat de son envie de protéger celle qui fait battre son cœur.



En dehors de Gosling, il y a Carey Mulligan, sombre et tellement vraie qu’elle éclipse ses précédentes (excellentes) prestations, que ce soit dans An Education ou dans Never Let Me Go. Le duo formé avec Gosling est d’autant plus intéressant de par le fait qu’il est voué à l’échec : les deux amoureux maudits ne sont pas censés vivre le bonheur, leurs destinées ne doivent pas connaître un point d’intersection. Pour l’actrice anglaise au regard d’ordinaire mutin, le film est une occasion de briller et de jouer avec ses plus beaux regards, ses expressions les plus vives. Mais la présence de son personnage, Irene, ne dissimule pas toute l’intrigue inquiétante et (plus) intéressante : si le film effleure l’amour, et le considère comme moteur principal de l’action, il n’en fait pas le simple propos. Bryan Cranston, figure centrale de la série Breaking Bad, tient un rôle clef, entouré de deux ténors cruels aux mains sales : Albert Brooks et Ron Perlman (inoubliable One dans La Cité des Enfants Perdus de Jeunet et Caro). On rejoint encore l’aspect western à cause de ces derniers, qui font figure de brutes et truands en comparaison avec The Driver qui serait un héros.

Si le clin d’œil aux westerns est évident, celui aux films des années 80 l’est encore plus : on se croirait en train de regarder une histoire qui se passe il y a plus de vingt ans. Los Angeles semble inchangée, les décors ne mettent jamais en avant l’univers quasi high-tech dans lequel nous évoluons actuellement. Les voitures choisies pour le film sont également intemporelles et ne suggèrent pas que le film a été tourné en 2010. La seule chose qui rappelle à la réalité le spectateur, c’est lorsqu’un téléphone portable sonne. Mais le répit est de courte durée, nous voilà de retour dans une autre ambiance, pleine de brouillard et de solitude. Drive rappelle Taxi Driver bien sûr : les deux personnages principaux vivent en marge de la société, et roulent, nous livrent sur un plateau d’argent leurs villes respectives. Mais là où les deux films diffèrent, c’est dans l’exploration de la psychologie des personnages : The Driver n’est pas le taxi driver, puisque de ce dernier on connaît le passé. De plus, le taxi driver, lui, devient fou, alors que The Driver, lui, habite psychiquement dans le monde, agit en réfléchissant de façon « raisonnable ».



Ce qui aide beaucoup Refn à scotcher et à charmer, c’est la musique du film. Les morceaux composés par Cliff Martinez sont en parfaite adéquation avec les chansons exploitées plus que judicieusement à certains moments, dont la très « à -propos » A Real Hero de College & Electric Youth. Toutes les chansons rajoutées – à l’exception de Oh My Love de Riz Ortolani – peuvent être taxées d’« electro-pop », avec des tonalités romantiques, qui se prêtent à la relation de The Driver et d’Irene. Dans le registre électronique, il y a aussi Tick of the Clock de The Chromatics qui énerve à cause de la tension qu’elle suggère, mais c’est tout à fait normal et enviable, le morceau sert pour la première séquence où on voit The Driver en plein casse. En dehors de la musique, la photographie occupe aussi une place prépondérante : les couleurs de Los Angeles by night donnent une impression particulière, entre fièvre et peur. D’ailleurs, la plupart des plans du film sont tournés dans l’obscurité ou dans des lumières artificielles, ce qui rend encore plus poétique l’esthétique générale. Même les couleurs les plus crues deviennent donc une explosion de beauté, de splendeur, de chaleur.

Refn n’a pas volé son prix de la mise en scène : chaque scène a son importance, est filmée avec un savoir-faire inégalable. Quand un film est bien réalisé, c’est lorsqu’il partage un imaginaire, une vision qui est unique, incroyable. Le pari est réussi avec Drive : on nous présente un univers inclassable, un personnage principal mi-ange mi-démon qui transpire de charisme, un mélange jouissif des genres, une surprise qui prend des airs de poing dans la gueule, mais qui sous la couche de sang, est un baiser langoureux et sensuel.

Trailer

La Piel que Habito by Harmoniak

Salut à tous, citoyens de CIN ! Aujourd’hui je sors de mes terrains connus, puisque je ne vais pas vous parler du dernier blockbuster, mais d’un film qu’on appellera « d’auteur », qu’on aime ou pas Almodovar. Il s’agit de La Piel que Habito.



D’abord, il est essentiel que je précise que le synopsis consciencieusement colporté par la presse pour la sortie du film est absolument erroné. La Piel que Habito ne développe pas « La quête d’un chirurgien esthétique d’une nouvelle peau qui aurait pu sauver sa femme, victime d’un incendie ». Le film d’Almodovar parle bien de ce détail mais le fait en l’intriquant avec les événements réellement constitutifs de son histoire. Histoire qu’il serait tout simplement ridicule de synopsiser (oui, synopsiser, absolument), parce que le film se découvre avec magie. Toutefois, c’est un très léger aperçu du film que je vais tenter de présenter pour que les plus réticents d’entre vous se laissent, peut être, tenter.

Antonio Banderas, qui signe ici une nouvelle collaboration avec le réalisateur espagnol après une période d’absence, incarne un chirurgien esthétique, Robert Ledgard pour qui « Le visage définit l’homme ». C’est avec cette réplique qu’il s’adresse à l’assemblée de scientifiques à qui il confie son dernier projet. Le film se poursuit alors en dévoilant les sombres aspérités de ce personnage : un passé trouble, une femme mystérieuse qui habite chez lui, recluse, un personnel de maison au passé aussi flou que le sien… Almodovar brode cette histoire avec finesse. Mais aussi avec cruauté.

Car, qu’on se le dise, La Piel que Habito a été conçu comme « un film d’horreur sans cris ». Peu de détails sont épargnés à la vue du spectateur. Le film est à voir en version originale pour la crudité du ton de plusieurs interventions, et aussi pour l’émotion que chaque protagoniste transmet en faisant face à une situation souvent terrifiante. Le film s’étale dans une violence sourde, parfois muette, mais adopte un ton plus caricatural que purement gore. Le sadisme côtoie un humour noir qui n’est oublié ni dans le ton ou les couleurs, ni dans la mise en scène. Le film représente d’ailleurs pour Almodovar un grand aboutissement. Certains plans sont d’une puissance que j’ai trouvé (soyons un peu subjectif), phénoménale.



Et ce qui plait aussi dans ce film, c'est la relation artistique recherchée du réalisateur avec ce qu’il filme. Ce qui m’a frappé par exemple, est le côté très plastique des plans ciblés sur le tissu. Ce n’est pas qu’une question de visuel. Il y a le mouvement des mains qui manipulent les étoffes, ou les sons de déchirement qui se font entendre par moments. Je pense particulièrement a un plan assez long dans lequel une robe est éparpillée au sol et que… par l’action d’un certains personnage, ces morceaux de tissus s’animent, disparaissent, comme si l’air du temps était happé avec panache (grandes phrases, wesh). Autre exemple, la relation du metteur en scène avec la manipulation manuelle de plusieurs objets. En chirurgie d’abord, avec les opérations que pratique Robert (à prononcer avec l’accent Castillan, bien sûr !), mais aussi dans toutes les petites transitions qui ponctuent le film. C’est si minutieux que le trivial en devient beau !

Le film est aussi nourri et se repait de références artistiques importantes. L’œuvre de Louise Bourgeois est par exemple largement employée à plusieurs reprises. Côté lumière, Almodovar signe aussi une partition de couleurs impressionnante. Pas une teinte qui ne sonne faux. Des plans hospitaliers qui subjuguent, rien n’est laissé au hasard, et le film devient une sorte de toile de maître au détour de chaque travelling. Almodovar allie aussi à sa fresque un assortiment de costumes choisis. Ici, un Homme-Tigre de cirque côtoie une femme sublime en combinaison de tissu rose peau.

Bien entendu, aucune prestation d’acteur n’est à mettre de côté. À commencer bien sûr par Antonio Banderas, qui fait preuve d’un diabolisme fou mais retenu tout en finesse. Quant à Elena Anaya, qui incarne la mystérieuse femme qui habite avec Ledgard, elle joue avec son physique sublime et sa grâce de danseuse pour tisser son rôle avec mérite. Complexes et jamais unidimensionnels, les personnages sont écrits et contribuent ainsi largement à la richesse du film.

Quant au scénario, il est à la fois épatant de machiavélisme, et épouvantablement inhumain. L’histoire captive par ses twists mêlés de moments de grâce ou d’intense émotion (de l’horreur, souvent, et le film en devient presque inquisiteur et malmène le spectateur à ce niveau là). Mais lorsque l’issue s’amorce, on comprend qu’il est question de thèmes plus complexes que ceux envisagés : la quête d’identité, de rédemption, de vengeance, au premier abord. Mais pourquoi pas d’inceste ou de liberté d’Être ? On ira glaner le sens où il se trouve, une deuxième lecture étant fortement recommandée pour comprendre les retors du film.



Mais c’est avec un regard peut être critique que j’avancerai que le film a sans doute des aspects rebutants. D’abord, sa façon d’aborder l’horreur qu’il comporte. Avis aux âmes sensibles amateurs de papillons, La Piel que Habito s’adresse à ceux qui peuvent faire face à des peurs charnelles plus qu’à des images réellement choquantes. En fait, le plus marquant du film sont les idées qu’il inspire. Encore qu’ayant l’Espagnol pour langue maternelle, j’ai aussi retenu plusieurs répliques et le ton sur lesquelles elles sont alors prononcées.
Ensuite, il est à admettre que le film aborde des thématiques complexes qu’on ne peut aborder dans l’optique d’aller voir un simple film de « détente ». C’est en se plongeant pleinement en lui qu’on en découvre toutes les subtilités.

Enfin, et même si pour le coup cela me semble capilotracté, je sais que certaines personnes pourront se détacher (et non pas se désintéresser) du film pour deux principales raisons : d’abord sa lenteur dans certains passages, qui est utilisée comme un moyen de sublimer les moments de grâce artistique, mais qui mal interprétée, peut céder chez des esprits parfois moins sensibles à l’écriture d’Almodovar, la place à un ennui certains. Enfin, mais c’est encore plus rare, il est possible qu’une faiblesse du film mal considérée soit son côté « On y va jusqu’au bout du bout » dans les scènes éprouvantes. Je pense surtout à un plan ou il est question de dilatation. Ce n’est pas vraiment ce que vous croyez si vous n’avez pas vu le film. Vous savez de quoi je parle sinon.

La Piel que Habito est un film que j’ai aimé pour sa complexité à la fois scénaristique dans les thèmes qu’il aborde avec subtilité, et graphique dans son sens du beau, de l’horreur sublime, crue et remâchée pour un effet de malaise efficace. Un film à retenir, et surtout à voir et à revoir.

dimanche 13 novembre 2011

Takeshi Kitano 2/3: Zaitochi by Viyanne



Dans mon optique de vous faire mieux connaître Takeshi Kitano, me voici pour vous parler de Zaitochi, un film qu'il a réalisé en 2003 et qui représente, si on peut le dire ainsi, son côté sérieux.

Le film nous narre l'histoire de Zaitochi dans le Japon des samouraïs.
Si l'homme garde ses yeux d'aveugle fermés, ses autres sens semblent bien plus développés que la moyenne.
Il voyage beaucoup, gagnant sa vie en tant que masseur mais aussi dans des tripots à jouer et cela énormément.
Si l'homme semble calme et inoffensif, voire faible de par son handicap, il dissimule en fait un guerrier maîtrisant le sabre comme peu savent le faire.
Au long de ses voyages, Zaitochi arrive dans un village sous l'emprise d'un chef menaçant et tueur : Ginzo.
Il rencontre aussi deux geishas cherchant les meurtriers de leurs parents afin de se venger.
C'est dans ce décor que Zaitochi parcourt, mais aussi fait ce qu'il estime être juste quitte à ce que cela implique de sortir son sabre.



Anecdotes :
Zaitochi est un personnage bien connu au Japon, il a tout d'abord été le héros d'un roman de Kan Shimozawa puis d'une série d'une série de 26 films dont le premier est sorti en 1962 et le dernier en 1989. Un manga est aussi publié en 1967 et une série télévisée de 4 saisons le met aussi en vedette entre 74 et 79.
Takashi Miike a quant à lui mis en scène une pièce de théâtre sur Zaitochi en 2007. Le personnage semble avoir encore de beau jour devant lui !

Je vous avais dit lors de mon premier article sur Kitano que Zaitochi avait reçu beaucoup de récompenses, en voici la liste :
- Lion d'argent du meilleur réalisateur pour Takeshi Kitano et Prix du public au Festival de Venise 2003.
- Prix du meilleur film, prix du public et prix de la meilleure musique de film, lors du Festival international du film de Catalogne 2003.
- Prix du public, lors du Festival international du film de Toronto 2003.
- Prix de la meilleure photographie, meilleur montage, meilleur éclairage, meilleure musique de film et meilleur son, lors des Awards of the Japanese Academy 2004.
- Nomination au prix du meilleur film, lors du Festival international du film de Bangkok 2004.
- Prix du meilleur second rôle féminin pour Michiyo Ookusu, lors des Blue Ribbon Awards 2004.
- Prix du meilleur film et du meilleur second rôle féminin pour Michiyo Ookusu, lors des Kinema Junpo Awards 2004.
- Prix du meilleur second rôle masculin pour Akira Emoto et du meilleur second rôle féminin pour Michiyo Ookusu, lors du Mainichi Film Concours 2004.

ça calme...


Mais qu'est-ce-que ce film a t'il de si particulier ?
Le résumé vous laisse penser à une histoire basique et elle est, et le déroulement est lui aussi plutôt prévisible, mais ce film captive et ne perd aucun intérêt.
Ici Kitano montre ses talents d'acteur dans le meilleur de sa forme : il incarne Zaitochi avec justesse et le personnage dégage une réelle sensation de calme et de paix.
Il est aisé de comprendre que Zaitochi lutte pour le bien alors que ses paroles se font pourtant rares tout au long du film.
S'il peut sembler facile de jouer un homme qui ne voit pas, ne parle quasi pas non plus, je pense qu'il en est en fait tout l'inverse et qu'ici le jeu de Kitano relève de la performance.
Du côté de la réalisation, et donc toujours de Kitano, le tout est bien ficelé et l'image est belle.
On note pas mal de personnages secondaires sans pour autant en avoir trop.
Si Kitano nous livre ici un film sérieux et de toute beauté, il ne reste pas moins lui-même en y incorporant une petite pointe de folie par le biais du personnage de l'idiot du village, personnage scénaristiquement inutile mais totalement indispensable !
Il n'y a pas seulement la folie qui est un élément clé des oeuvres de Kitano, mais aussi la violence ; et ici autant vous dire qu'il n'a pas oublié d'y mettre le quota nécessaire ! Effusions de sang sont en perspective, c'est fou d'ailleurs cette pression sanguine qu'ils ont les japonais !
Autre aspect notable de Zaitochi : son intrusion parfaite au sein de la culture japonaise ! Si tout le monde connait les geishas et les samouraïs, Kitano nous en montre plus et m'a fait découvrir quelques petites choses ma foi bien sympathiques sur la culture japonaise !



En résumé : histoire commune mais mise en forme superbe pour ce film qui d’après moi mérite ses récompenses.

Saw, la saga by Arno

Avertissement : L’auteur décline toute responsabilité si des spoilers perturbent le bon déroulement de la lecture de cet article, mais bon avec une telle cascade de suites difficile de ne pas en faire !


En cette période Halloweenesque, il est bien un film qui va manquer (ou pas !) à l’affiche des cinémas cette année, lui qui rythmait la fête de la citrouille depuis 7 ans. C’est donc avec un brin de nostalgie ou…en fait je ne sais pas quelle idée m’a pris l’autre jour, peut-être un énième jour de pluie et une météo du même genre pour toute la semaine qui s’annonçait. C’est alors que je décidais d’enclencher mon marathon Saw : un film par jour, ça tombe bien, 7 films, 7 jours, pile une semaine de pluie… non parce que je n’allais pas pousser le vice à enchainer les visionnages à la suite, c’est un coup à devenir un dangereux psychopathe… ou être totalement lobotomisé, au choix.

Que la partie commence !



Ou comment un simple court-métrage de James Wan s’est ensuite transformé en long, premier opus qui restera le plus dans les mémoires de par son originalité, James Wan aux commandes de son bébé, rythmé par ses fameux traveling rotatif en accéléré, une ambiance délétére, une action qui se passe en huis-clos dans une pièce des plus beurk, avec à l’intérieur deux mecs enchainés - le super pote de James qui joue dans tous ses films (et aussi producteur de tous les autres opus qui ont suivi) et Cary Elwes que vous avez pu voir dans Hot Shots ou le Dracula de Coppola - pris au piège par un mystérieux serial-killer au doux nom de Jigsaw. Pendant ce temps-là dehors, un Danny Glover en inspecteur obsédé mène l’enquête pour démasquer le fameux tueur au puzzle. Personne ne dira rien à redire (je pense et j’espère) que ce film se suffisait à lui-même tellement il était abouti, le côté trash est suggéré, uniquement psychologique, pas d’images dégoutantes ou d’hémoglobine qui gicle de partout. Une vraie réussite, encensé par la critique et par le public !

L’année suivante arrive… la suite... et les années suivantes ses suites, appelons ça l'ère Bouseman !


Logique, quand on sort un film d’un million de dollars de budgets et qu’on ramasse 100 fois plus (rien que pour l’exploitation US), les maisons de prod sont obligés de faire pondre une suite ! Darren Lynn Bousman récupère les manettes de James Wan et commence à souiller à grand coup d’hectolitre de ketchup et scènes crados. Donnie ‘step by step’ Wahlberg et Diana Meyer (entre-aperçue dans le premier opus) reprennent l’enquête du tueur au puzzle jusqu’à le débusquer dans son repère. Donnie va faire les frais du dernier( ou pas !) plan de Jigsaw puisque son fils (qui a bien grandi et joue dans Scream 4 cette année) est aux premières loges aux côtés d’Amanda (unique survivante du fameux piège à ours inversé),Beverley ‘Seven Heaven’ Mitchell et d’autres sombres inconnus. Les pièges sont de plus en plus machiavéliques, tout du moins dérangeants, sanglants et/ou bien dégueus. Le dénouement final est plutôt bien joué à tel point que j’étais à deux doigts d’enclencher l’opus suivant…
… toujours réalisé par l’homme-bouse, un opus très irrégulier, qui commence avec plusieurs pièges indépendants (mouais bof, juste pour que ça tache bien !) avant d’amorcer un vrai jeu à plusieurs tiroirs (cheminement un peu plus psychologique mais des scènes bien dégueulasses quand même, y en a une en particulier qui m’aurait presque fait vomir si j’avais bu une vodka-martini de plus : je parle de celle des cochons pour les personnes qui sont allés jusqu’au 3), même si l’interprétation de Jeff est vraiment plus que moyenne, le côté je veux me venger, je vais ptêtre te pardonner mais je sais pas trop, devient très lassant, laisse les tous crever point barre merde ! Intéressantes aussi, les scènes transversales qui nous montre les préparatifs du jeu du premier film et nous raconte ce qu’il advient de l’inspecteur Matthews. Et un final qui aurait pu (dû ?) être le point final de la saga. CE troisième opus a tout de même été interdit au moins de 18 ans à sa sortie en salles, le seul de toute la saga.
Le dernier opus de l’ère Bousman (oui, nous sommes déjà un numéro quatre) se lance avec une splendide scène d’autopsie de John Kramer (aka Jigsaw), on découvre une cassette (qu’il a discrètement avalé dans l’opus précédent, mais si puisqu’on vous le dit, son deuxième surnom c’est gorge profonde !) dans son estomac. Après ça part un peu dans tous les sens, plusieurs hommes piègés dont la vie dépend des autres, et finalement on pousse le bouchon jusqu’à imbriquer cette histoire dans celle de l’opus précédent, et rajouter encore une enquête interne par des agents du FBI, houlala, ça va bien se passer… Heureusement qu’on éclaire notre lanterne sur les motivations de Kramer à répandre le bien (mal ?) autour de lui. Pas trop de scènes dégueulasses et on apprend donc que l’œuvre du jigsaw a trouvé un nouveau disciple (bah oui forcément Amanda aussi est morte !). Vous trouvez que c’est un peu tiré par les cheveux ?! Demandez-lui plutôt à elle


On refile le projet à l’ancien chef déco puis assistant réal de bas étage sous les ordres de Bousman, qui nous pond une histoire rien de bien folichon. L’agent du FBI a survécu (tout comme le dernier officier de police qui enquêtait) et pense savoir qui pris la relève de Jigsaw et va donc se mettre sur ses traces. Pendant ce temps-là, 5 personnes prises au piège tentent de survivre et on revoit Jigsaw qui enseigne les bonne manières à son protégé dans un flashback… c’est tout, 1h20 de film avec quand même deux fois la même séquence de 10min au début et à la fin du film… et un final en suspens qui laisse entrevoir donc une (énième !) suite (de trop !)



Ce qui à la base était un poisson d'avril sur Allociné, se transforme malheureusement en nouvelle suite du tueur de Strasbourg.. euh... tueur au puzzle. Donc on change encore de réal (le quatrième si vous avez bien suivi), mais c’est pas pour autant que ça va relever le niveau, le problème principal quand on se lance dans les suites de suites de suites de suites… heureusement que Kramer avait pas un chien, car on lui aurait sûrement donner le rôle du nouveau tueur au puzzle. D’ailleurs son protégé a du mal à faire diversion, un nouveau piège de rédemption, des litres de sang et une dernière mort à base d’acide bien dégueulasse. 68 millions de recettes, Lionsgate commence à faire la gueule…



… Mais se décide à faire un petit dernier histoire de se mettre à la 3D, voici donc ‘Saw : Chapitre Final’ Kramer n’est plus là depuis… fort longtemps et son esprit de montrer que la vie est belle aux gens perdure même si son protégé dénature cela en zigouillant à tout va et se lance dans un combat sans merci avec l’ex de Mr Puzzle… pendant ce temps-là un Monsieur J’ai Survécu – JE sors un livresur cette expérience tragique mais au combien spirituelle fait sa promo s’netourant d’autres survivants pour faire sa comm (et donc amasser un max de blé). D’ailleurs en parlant gros sous, petite comparaison d’avec le premier (remonter un peu la page) ce Saw 3D a coûté 20 millions et n’a engrengé que 130millions (à travers le monde !), ridicule !




... le jeu est terminé ! (.. enfin il se murmure qu’on pourrait éventuellement avoir droit à un huitième épisode, mais chut !)





Bon, vous avez survécu à tout ça, maintenant vous pouvez répondre à quelques questions : quel est votre Saw préféré ?! ou plutôt non, lequel est le plus mauvais ? Votre piège préféré?


Question subsidiaire : combien ai-je fait de jeux de mots ridicules en corrélation avec le film dans cette propa ?