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lundi 6 février 2012

Submarine de Richard Ayoade by Jim

My mother is worried I have mental problems. I found a book about teenage paranoid delusions during a routine search of my parents' bedroom (Oliver Tate)



Oliver Tate, un adolescent aux grand yeux blasés – et sûrement trop intelligents – représente cette société galloise du bord de mer qui semble appartenir à un souvenir tiré d’un appareil photo lomographique. Entre les problèmes de couple de ses parents et l’arrivée de Jordana Bevan dans sa vie, Oliver doit grandir, s’ouvrir et découvrir qu’il n’est vraiment pas doué, mais qu’il peut quand même s’en sortir et épater la galerie. L’histoire d’Oliver Tate, c’est un voyage indie au cœur de l’adolescence, avec pour seul gouvernail les réflexions absurdement désopilantes d’un jeune de quinze ans, définitivement paumé sur la question de l’amour en général.

C’était une des surprises du festival international de Toronto, et puis de Sundance, mais malgré tout, Submarine est passé en Belgique comme une brise dans un ouragan : inaperçu. Presque pas joué dans les salles, il a dû attendre sa sortie en dvd pour être correctement diffusé, et rendu accessible à tous. Et c’est bien dommage, parce que l’expérience devait être extravagante lorsque vécue dans une salle obscure. Quoi qu’il en soit, il est aussi vrai que Submarine n’appartient pas à un genre mainstream plébiscité par la plupart des spectateurs : ce n’est pas une comédie grasse – et pareille à un bon vieux furoncle – sur les difficultés de l’adolescence, à la façon, par exemple, d’un American Pie, ce qui rendait donc sa sortie dans toutes les salles du plat pays relativement improbable. Submarine est subtil, enchanteur, et finalement, d’un point de vue visuel et scénaristique, s’apparente à la veine des films de Wes Anderson, le roi du cinéma indie américain. La preuve ? Souvent, on ne sait pas si on doit rire ou pleurer, ou simplement se déconnecter le lobe temporal pour rigoler, les situations et les personnages transpirent de motivations aberrantes. La famille, le thème de prédilection d’Anderson, obtient aussi une place prépondérante, puisque la seconde partie du film se centre sur la résolution des problèmes d’Oliver. Et finalement, le ton général du film, entre absurde, désopilant, et dramatique, un mélange explosif, une marque de fabrique de Wes Anderson. Mais Submarine n’est pas un film calqué trivialement sur le modèle andersonien, c’est surtout, à la base, un livre on-ne-peut-plus-gallois écrit par un auteur gallois dément, Joe Dunthorne, qui dose à merveille les aspects sentimentaux, dramatiques, et absurdes d’une histoire somme toute ordinaire, mais rendue extraordinaire par un scénario audacieux et une mise en scène décapante – surtout photographiquement parlant.

Jordana and I enjoyed an atavistic, glorious fortnight of lovemakin', humiliatin' teachers and bullies in the week. I have already turned these moments into the Super-8 footage of memory (Oliver Tate)



Ce qui rend vraiment unique et intéressant Submarine, c’est le fait qu’Oliver Tate himself nous raconte son histoire, avec un sens inné, saugrenu et exceptionnel de l’usage de la métaphore. Il a beau avoir quinze ans, il a (presque) tout compris à la vie, à comment les individus raisonnent, mais, est toujours incapable de s’en sortir socialement et émotionnellement parlant, la faute à ses parents qui répriment parfaitement leurs sentiments. Et puis, il y a Jordana. Un petit bout de femme vêtue d’une veste rouge, à la frange rieuse, qui est aussi une énigme en elle-même, ce qui oblige Oliver à devoir faire preuve d’originalité et à adapter sans cesse ses comportements. Oliver, un anti-héros presque, puisque il n’a aucune force surhumaine – si on omet son intellect percutant-, habite un univers hors de la temporalité, loin du monde et de ses modes incessantes.

Bien sûr, on ne peut s’empêcher, d’emblée, de se prendre d’affection pour ce gosse cruellement drôle, dont les aventures cocasses se terminent souvent en sourires perplexes. Il y a quelque chose de véritablement touchant chez Oliver, visiblement inapte à opérer les bons choix, à avoir les bons comportements. Cette maladresse plus qu’évidente donne une force incroyable à ce petit film indie sans prétention aucune, si ce n’est celle de transporter ailleurs, et de faire rêver sous une musique indécemment excellente d'Alex Turner, le leader des Arctic Monkeys.

Jusqu’à Submarine, Craig Roberts était un inconnu, mais le rôle d’Oliver devrait le propulser, on l’espère sincèrement, dans une belle carrière. Et que dire de Yasmin Paige, au sourire prêt à se changer en moue en quelques secondes. Le reste du casting se compose notamment, pour les parents d’Oliver, de Sally Hawkins et Noah Taylor, tous deux dans des compositions névrosées, pour le plus grand plaisir de tous.
Autre révélation du film : son réalisateur, Richard Ayoade, qui transmet parfaitement l'univers conté par Joe Dunthorne.

Submarine, une bouffée d’air frais, une œuvre originale portée par une musique douce comme une vague timide et mélancolique qui vient s’évanouir sur les pieds, une promenade dans des clichés issus d’un vieux polaroid. Un plaisir total d’une heure trente qui ne déroge à aucun style particulier et qui s’affranchit des limites grasses et stéréotypées des films sur l’adolescence.

Trailer

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