Alors, aujourd’hui bizarrement je vais vous parler d’un film à gros budget. D’ailleurs c’est le film sur lequel Lionsgate a misé toute sa fortune. Si ce film échoue, Lionsgate a de très forte chance de couler. La propa qui suit va essayer de répondre à la question « Ai-je des raisons de sauver Lionsgate ? ».
Citoyens, Hunger Games.
D’abord, et c’est important de faire cette petite précision, c’est un grand fan qui écrit ces lignes. Réalisé par Gary Ross d’après le premier volume de la trilogie éponyme écrite par Suzanne Collins, Hunger Games est sorti dans les salles françaises le 21 mars, soit deux jours avant les salles des yankees. Pour la petite histoire, perso, j’ai eu un court-métrage avant le film, Absence, extrêmement glauque si bien que j’ai cru m’être trompé de salle.
Hunger Games raconte une Amérique du futur. Le Capitole, une utopie architecturale et apogée de la surconsommation mais surtout dictature sans scrupule régnant jadis sur 13 districts, qui extraient et cultivent les ressources naturelles du pays pour le Capitole. Exploités, les 13 districts se rebellent mais échouent : le Capitole détruit le district 13 et condamne les autres à une sentence des plus horribles : tout les ans, les Hunger Games verront un tribut mâle et femelle de chaque district entre 12 et 18 ans se battre à mort jusqu’au dernier dans une arène où la survie sera primordiale. Évènement monstrueux mais retransmis à la télévision pour le bon plaisir du peuple du Capitole. La dictature de la
télé-réalité à son paroxysme.
L’héroïne, Katniss Everdeen, vit dans le district 12 et nourrit sa famille aussi pauvre que le reste de la population du district, en chassant. Jusqu’au jour où sa sœur est tirée au sort pour les Hunger Games et que pour la sauver, elle se porte volontaire à sa place.
Bon, ça c’était pour la partie visible de l’Iceberg. Ma métaphore est la parce que tout l’intérêt du film réside d’abord dans la richesse phénoménale de son univers. Scénaristiquement, ne venez même pas me parler de Battle Royale. Et ceux qui ont Twilight au bord des lèvres peuvent aller se faire émasculer. Hunger Games mêle des thèmes plus proches de nous, en tant qu’être. La survie et les instincts qui se ressentent à chaque instant, et pas seulement au milieu de l’arène. Survivre avec les autres, se faire apprécier, se faire bien voir. Construire des relations. D’une autre manière, le contexte politique (qui sera plus développé dans les volumes suivants) est inhérent au récit puisque c’est tout ce climat dictatorial fort qui sert de toile de fond à un autre questionnement : l’aliénation des foules. Par la télé, la propagande. Ce qu’on montre ou pas. Et de quelle manière on les montre.
C’est pourquoi tout cela m’amène à vous le dire franchement : si vous cherchez un film d’action, ou même un émule d’Harry Potter dans la narration, le contexte, n’allez pas voir Hunger Games en pensant trouver votre compte. Le film, dont le grain de pellicule, la mise en scène pratiquement caméra à l’épaule pour des séquences entières, et aux décors à une échelle oscillant entre le démesuré et le plus basique et fourmillant de détails est tout simplement d’un réalisme saisissant. Le film se concentre davantage sur la profondeur et la richesse de son histoire (je parle bien de son histoire, et pas de son scénario en lui même, on murmurera qu’il est classique, mais les volumes suivants donneront tort aux bruits de couloir), et surtout sur la psychologie de ses personnages.
Les acteurs sont d’ailleurs l’un des principaux atouts du film. C’est Jennifer Lawrence (X-Men, le commencement, Winter’s Bone) qui donne vie à Katniss et de la plus belle des manières : son jeu est d’une subtilité rare alors que se succèdent les coups durs et les joies trop éphémères de l’héroïne. C’est Josh Hutcherson (Zathura, Le secret de Térabithia) qui surprend en Peeta Mellark, le tribut mâle qui se battra avec (ou contre ?) Katniss dans l’arène. Pour un acteur que l’on croyait monolithique, le jeune homme se débrouille et arrive à conférer au personnage toute la vulnérabilité et la force tranquille qu’incarne le personnage. Idem pour Liam Hemsworth (petit frère de Thor), en Gale Hawthorne. A part cela, on retrouve Elizabeth Banks en Effie Trinket, Lenny Kravitz en Cinna et Woody Harrelson en Haymitch, tous trois bons même si leurs personnages ne crèvent pas l’écran. Wes Bentley, lui, incarne avec justesse un Seneca Crane presque mieux écrit que dans le livre. Enfin, Donald Sutherland est un président Snow parfait. Quand à Stanley Tucci en Caesar Flickerman, un mot : remarquable. Les autres tributs sont bons sans briller mais le casting reste dans l’ensemble assez impeccable.
Côté technique, James Newton Howard se charge de la musique après que Danny Elfman se soit désisté. Il prend le parti de ne pas créer de thème marquant mais ne lésine pas sur l’ambiance, qu’il rend tout à fait convenable et plaisante. Les costumes et décors sont contrastés mais pertinents.
Enfin, parlons un peu adaptation. C’est un fan qui vous parle, comme précisé plus haut, et je ne peux pas vous mentir. Hunger Games est peut être l’adaptation d’un roman la plus fidèle que j’aie vu à ce jour. Il faut être aveugle (ou sacrément borné) pour ne pas s’extasier devant le travail scénaristique de Gary Ross et Suzan Collins (oui, l’auteure est au scénario). Les suppressions sont absolument justifiées, et le film prend même le luxe de nous faire visiter des lieux inédits dans ce volume là ou dans les romans en général. Le jardin de rose du président Snow, le plateau de télévision avec commentaires ou la salle de contrôle des jeux. Le film est tout simplement un régal de fan, j’ai même été étonné de voir des scènes entières à l’écran de la même manière que je me les était imaginées. C’est d’ailleurs assez troublant parce qu’au final, le film prend la forme d’une mise en abyme de télé-réalité malsaine. Le spectateur devient voyeur du meurtre, de la douleur et de l’abus de pouvoir. D’ailleurs, à ceux qui voudraient encore hurler au scandale parce que le film n’est pas assez sanglant, je leur réponds personnellement qu’on en voit bien assez, et que le film franchit des tabous rares pour un blockbuster.
Oui, Hunger Games est une adaptation fidèle, loin d’être décevante et recommandable en sa qualité de film de SF en marge, loin du pop-corn movie qui grouillent encore cette année. Une brochette d’acteurs et de qualités techniques qui en font une perle de mise en scène sans pour autant avoir la prétention de l’être.
Allez, j’ai été enthousiasmé, oui. Mais je me fais les réflexions suivantes. Le film est lent, le rythme est même très inhabituel pour ce qu’on a tendance à se représenter comme un teen-movie. Pas d’action grandiloquente, tout est psychologie, SF étrange, contre-utopie. Les thèmes sont vastes. Le film ne passe pas vite mais l’univers est assez riche pour que l’on ne s’ennuie pas. Mon inquiétude tient en une seule phrase. A part les fans, Hunger Games peut-il trouver son public ?
Je vous laisse le soin de répondre, moi je vais relire les trois volumes, et je ne saurai que trop vous conseiller de vous lancer !
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