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dimanche 13 octobre 2013

Hasta La Vista by Albé

J'en avais déjà parlé il y a quelques mois sur un autre secteur mais je crois qu'il serait bon de vous en reparler plus longuement ici, histoire que vous ne passiez pas à côté d'une telle merveille.

Hasta la vista est sans aucun doute ma plus belle découverte cinématographique de 2012. Et je ne suis pas le seul à en dire que du bien. Primé par de nombreux festivals et extrêmement bien accueilli par la presse et par le public, le film est distribué par un Claude Lelouch bluffé :

En attendant de faire une master class, je rentre dans une salle de cinéma au hasard. Une projection débute, je ne sais absolument pas ce que je vais voir. Jusque là, rien d'extraordinaire. Car quand je prends place dans mon fauteuil, je suis très loin d'imaginer qu'il va se mettre à rouler et que je vais être projeté dans le monde de ceux que je regarde rarement au fond des yeux. Et c'est le contraire qui se produit, c'est un homme aveugle que je vois me fixer à travers l'écran de mes préjugés. Prendre un tel pied en découvrant un film auquel je ne m'attendais pas, mais alors pas du tout, m'était rarement arrivé.



Ce film flamand à petit budget souffre de la comparaison faite avec Intouchables, sorti pratiquement en même temps. Pour ma part, je vous dirai d'oublier tous vos a priori. Ce n'est absolument pas comparable. Intouchables ne fait pas le poids face à ce chef-d’œuvre, et je pèse mes mots. Cette fois-ci, pas question de plaire au tout public. Le seul objectif de ce film est d'être vrai et sans superflu, quitte à être cru.

Notez que les flamands ne tolèrent aucune traduction, aussi bien dans un sens que dans l'autre. Ce sont des partisans absolus de la version originale sous-titrée. Mais le film n'est pas entièrement en flamand car il y a une francophone dans l'histoire. Cela sera d'ailleurs sujet à des plaisanteries sur l'éternel conflit entre wallons et flamands. Mais inutile d'être belge pour comprendre que même des minorités comme les handicapés peuvent être xénophobes.

Le sujet abordé est lourd et peut de prime abord rebuter par son côté tabou : le handicap et la frustration sexuelle générée par le handicap. À l'heure où l'on songe seulement à parler d'une telle problématique / pendant qu'au Pays-Bas par exemple, on subventionne déjà des programmes d'assistance sexuelle pour les personnes handicapées / ce film a de quoi être choquant. Mais ne vous y trompez pas, le sujet est traité avec une simplicité remarquable. Aucun hermétisme, aucun voyeurisme, les sentiments éprouvés par les personnages sont tout de suite accessibles. De plus, l'histoire a beau être dramatique, elle est allégée par un humour décapant, contrairement à Philadelphia où là on s’apitoie sur le sort d'un sidéen du début à la fin. Ici, c'est avant tout une comédie absolument déjantée présentée sous la forme d'un roadtrip avec la profondeur en bonus. Il y a en donc pour tous les goûts. Ainsi, comme le souligne très justement le réalisateur Geoffrey Enthoven, il s'agit d'un roller coaster d'émotion, d'une véritable montagne russe où l'on passe des rires aux pleurs. Impossible d'en sortir indemne. Les acteurs n'en sortent pas indemnes non plus. La difficulté à se déplacer sur une chaise roulante, l'incompréhension et le regard de pitié des autres sont des réalités quotidiennes du handicap qu'ils ont pu ressentir durant le tournage (voir interview sur youtube).

Comme sous-entendu ci-dessus, les acteurs ne sont pas réellement handicapés, ce qui ne se devine absolument durant le visionnage du film et démontre par la même occasion leur talent.



L'histoire est celle de trois jeunes garçons puceaux âgés d'une vingtaine d'années, tous les trois handicapés moteurs : un malvoyant, un paraplégique et un cancéreux avec une mobilité réduite. Rien ne le distingue des autres hormis leur handicap. Ce sont des gens normaux avec des besoins normaux coincés dans un corps qui leur fait défaut. Mais personne de leur entourage n'est prêt à l'admettre. À l'insu de leurs parents, les trois jeunes hommes vont donc entreprendre une virée à destination de l'Espagne et d'El Cielo, un bordel spécialisé. "Je veux du sexe. Je veux baiser" apparait alors comme le slogan de notre trio de choc. Bien entendu, tout ne va pas se passer comme prévu. Dès l'élaboration du plan, les problèmes de taille s'accumulent et cela génère des situations parfois drôles et parfois bouleversantes. Mais peu importe les problèmes, l'obstination d'en finir avec la virginité est plus forte que tout. A l'évidence, il est question ici de bien plus qu'une simple partie de jambes en l'air. Il s'agit avant tout de se sentir reconnu en tant qu'être humain avec des besoins charnels de tendresse et de bestialité ou plus généralement, des besoins d'Amour.

Quant à la bande sonore, elle est irréprochable et prenante, à l'image de tout le film en définitive. Difficile de vous trouver les morceaux qui la compose mais il n'y a que du bon. En guise d'introduction, nous avons droit à un fabuleux son pop rock sur fond de roploplos qui rebondissent. Ensuite, le ringard Joe Dassin est remis au goût du jour et puis il y a aussi ce morceau de Papermouth qui pourrait faire vaguement penser à quelques chansons soft de Marilyn Manson.

Ne passez pas à côté d'une telle réalisation et de ce véritable concentré de richesse humaine ! Vous ne le regretterez pas, je m'y engage !

Enfin et quitte à m'éloigner légèrement du sujet principal, j'aimerai également vous faire part de ce sketch sur les handicapés de Jérémy Ferrari et Guillaume Bats. C'est un humour noir et corrosif, à l'image du film. Ça ne peut qu'avoir sa place ici.

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