Steven Soderbergh est mort, définitivement mort. Si le réalisateur avait vu sa carrière décoller en 1989 avec l’obtention de la Palme d’Or pour son film Sex, Lies, and Videotape, l’apogée de son ère cinématographique se situait entre Out of Sight en 1998 et Ocean's Eleven en 2001, avec comme sommet de la pyramide Traffic en 2000 ou alors l’autre film réalisé cette année-là, Erin Brockovich. Quoi qu’il en soit, quelque soit votre position sur le cinéma de Soderbergh, chiffres à l’appui, on ne peut nier le fait que sa carrière est en chute libre depuis quelques années. Parce qu’entre Ocean’s Eleven et Che, il n’y a rien : que des non-succès au box-office et des râlements de fans ou cinéphiles déçus du mec qui avait eu un certain sens du rythme, de la mise en scène. Che, en 2008, faisait revenir Soderbergh « au devant de la scène » sans pour autant le (re-)consacrer. Les critiques ont beau avoir encensé ce biopic en deux parties, le public n’a pas suivi, et catastrophe, les deux films ont coûté plus cher que ce qu’ils n’ont rapporté. En 2009, même constat pour The Informant avec Matt Damon dans le rôle principal.
Il y a quelques mois (ou peut-être un an déjà ?!) Soderbergh avait annoncé sa retraite en clamant que « le cinéma, c’est comme Capri, c’est fini, et dire que c’était la ville de mon premier amour». Malheureusement pour nous, le réalisateur s’était sans doute foutu de notre gueule, parce qu’il a quelques films en chantier et, son nouveau film destiné à un grand public, Contagion, vient de sortir. Exposons ici pourquoi Contagion est un retour aussi raté que celui de DSK sur TF1.
Déjà, l’affiche du film trompe énormément, comme un éléphant du PS. Des grands noms, des visages connus, une police aussi sanglante qu’horrifique qui annonce un tagline dantesque, à savoir, « que rien ne se propage comme la peur ». De quoi faire trouiller les non-avertis. Citons aussi vite l’exemple des publicités pour la radio, qui jouent sur le même tableau : bruits rappelant l’apocalypse – telle que le cinéma nous l’a déjà décrit au travers de films de zombies par exemple -, déclarations des autorités sanitaires et politiques qui font écho à la grippe porcine, et doublures françaises toujours aussi atroces à écouter. Mais la cerise sur le gâteau, c’est la bande-annonce (mensongère), qui est tout à l’inverse du film : elle présente une histoire qui semble complexe, intéressante et rythmée.
En réalité, il n’en est rien, ce qui est d’autant plus drôle que Soderbergh était adulé pour son sens de la cadence il y a dix ans, sens qu’il a visiblement complètement perdu quand on se retrouve devant Contagion, un film qui capte l’attention vingt minutes avant d’agir sur la formation réticulée du spectateur et de l’endormir sur son siège.
Contagion présente une épidémie mondiale, pire que la grippe porcine (qu’on cite allégrement, sans doute pour réactiver les zones du cerveau peuplées de croyances par rapport aux épidémies), qui décime petits et grands et isole la population survivante dans une crise d’angoisse sinistre. Tout au long du film, nous suivons plusieurs protagonistes impliqués de près ou de loin dans le développement ou l’éradication de la maladie : des médecins, des chercheurs, un blogueur, un père de famille. Plusieurs problématiques sont abordées en une heure quarante-cinq : les questions de prise en charge des patients, de prise en charge des familles, de santé publique, de remèdes alternatifs, de populations désavantagées par rapport aux autres (ici, l’Asie), l’hypocrisie et les mensonges des Etats, etc. On multiplie donc les intrigues, ce que Soderbergh maîtrisait dans Traffic, mais qu’ici, il émancipe de tout intérêt : on effleure les personnages, et on ne ressent d’ailleurs aucune véritable empathie pour eux, puisque on les connaît à peine, on ne les comprend pas non plus, forcément. Tout est présenté d’une façon superficielle, quasi-anecdotique. On regrette de ne pas avoir creusé le personnage insupportable de Jude Law qui promettait clairement plus que l’apathie de Matt Damon, en papa poule qui veut sauver sa fille.
A vrai dire, il y avait beaucoup de bons éléments à exploiter dans Contagion, il fallait forcer le rythme, créer un climat hostile et asphyxiant (voire apocalyptique total), souligner le travail (ou l’hypocrisie, au choix selon les convictions) des autorités sanitaires, faire entrer le spectateur dans la peur, la vraie peur, la panique même. A la place, Contagion est plutôt un iceberg : une structure de glace dans laquelle il est impossible de s’immiscer. Structure de glace parce qu’il est mal aisé de cerner ou même d’apprécier les personnages, qui, sur l’écran, ressemblent à des ombres fuyantes impossibles à suivre, il y en a d’ailleurs trop à essayer de traquer. La froideur des relations à peine esquissées entre ces protagonistes est d’ailleurs une erreur de plus : Contagion est lésé d’un point de vue émotionnel, ne promet aucune autre sensation que celle de l’ennui. L’autre grand problème de taille – qui freine définitivement toute tentative d’appréciation- est le rythme du film, soporifique à souhait après la surprise engendrée par les vingt premières minutes, qui vont de découvertes en stupéfactions. C’est dommage, il y avait beaucoup à tirer d’un film pareil. Mais voilà, Soderbergh aurait mieux fait de prendre une – vraie- retraite un peu plus tôt afin de nous épargner cette énorme ineptie de bas étalage qui exhibe grossièrement des têtes connues (sans doute pour s’attirer de gros dollars ?!) pour palier au manque de consistance du film (qui n’est qu’en fait une présentation très brève et stéréotypée des causes et conséquences d’une épidémie mondiale).
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mardi 29 novembre 2011
Takeshi Kitano 3/3 : Glory to the Filmmaker by Viyanne
Dernier article de ma série sur Takeshi Kitano il est à présent temps de se pencher plus sur le côté drôle et insensé de l'homme.
Pour cela j'ai décidé de vous présenter Glory to the Filmmaker.
Glory to the Filmmaker est un film de Takeshi Kitano, avec Takeshi Kitano et racontant les aventures de... Takeshi Kitano.
Mais qu'est-ce-que, en pratique ça peut bien raconter ?
Le film nous raconte en fait les difficultés de Kitano dans sa quête : réaliser le film ultime pour les amateurs de cinéma.
Pour cela il va donc étudier toutes les pistes et les genres possibles ; quel va être le genre du film ? ah tiens, peut-être un film d'amour parce qu'il n'en a jamais fait ! Ou un film d'horreur, car ces dernières années ça marche bien les films d'horreur ! Voici la démarche de base du film, se questionnant, montrant Kitano et sa doublure en pleins déboires, face aux doutes et parfois fonçant dans le mur.
Mais au final Kitano trouve l'idée et une idée absurde mettant en scène des personnages on ne peut plus absurdes justement !
Tellement que je n'arrive pas à vous en faire un vrai résumé digne de ce nom.
En gros un brin de n'importe quoi, un autre d'humour et surtout beaucoup de non sens et d'autodérision.
Glory to the Filmmaker donne rapidement le ton, dans les premières scènes on se retrouve dans un hôpital où des médecins font des examens sur un mannequin.
Examen se soldant par un "Dites lui qu'il vienne en personne la prochaine fois".
Car ce mannequin c'est la doublure de Kitano dont je vous ai parlé un peu plus haut.
Ensuite on a droit à plusieurs projets, de plusieurs tentatives de Kitano pour réaliser ce film ultime, toutes se soldant par un échec.
Dont une par la phrase "Qui veut voir des films pesants où des gens boivent du thé ou de l'alcool pendant une demi-heure ?".
Kitano se moque avec tendresse du cinéma japonais mais aussi de son propre cinéma dans ce métrage.
On y croise du tout et du n'importe quoi : comme des catcheurs qui tiennent un restaurant et démolissent tous ceux qui se plaignent de la nourriture, un méchant savant fou aux inventions dingues qui rit en permanence, une pseudo parodie de Matrix et encore beaucoup d'autres choses toujours plus cocasses les unes que les autres.
La force et la faiblesse de Glory to the Filmmaker c'est d'être toujours sur la corde raide entre l'humour et le n'importe quoi, ce qui rend le film parfois légèrement dur d'accès si on cherche à suivre "l'histoire" tant elle part dans le flou et dans tous les sens.
Glory to the Filmmaker peut être pris comme un exercice de l'auteur mais aussi un demi aveu d'un manque d'inspiration tout comme l'inverse.
Pour cela j'ai décidé de vous présenter Glory to the Filmmaker.
Glory to the Filmmaker est un film de Takeshi Kitano, avec Takeshi Kitano et racontant les aventures de... Takeshi Kitano.
Mais qu'est-ce-que, en pratique ça peut bien raconter ?
Le film nous raconte en fait les difficultés de Kitano dans sa quête : réaliser le film ultime pour les amateurs de cinéma.
Pour cela il va donc étudier toutes les pistes et les genres possibles ; quel va être le genre du film ? ah tiens, peut-être un film d'amour parce qu'il n'en a jamais fait ! Ou un film d'horreur, car ces dernières années ça marche bien les films d'horreur ! Voici la démarche de base du film, se questionnant, montrant Kitano et sa doublure en pleins déboires, face aux doutes et parfois fonçant dans le mur.
Mais au final Kitano trouve l'idée et une idée absurde mettant en scène des personnages on ne peut plus absurdes justement !
Tellement que je n'arrive pas à vous en faire un vrai résumé digne de ce nom.
En gros un brin de n'importe quoi, un autre d'humour et surtout beaucoup de non sens et d'autodérision.
Glory to the Filmmaker donne rapidement le ton, dans les premières scènes on se retrouve dans un hôpital où des médecins font des examens sur un mannequin.
Examen se soldant par un "Dites lui qu'il vienne en personne la prochaine fois".
Car ce mannequin c'est la doublure de Kitano dont je vous ai parlé un peu plus haut.
Ensuite on a droit à plusieurs projets, de plusieurs tentatives de Kitano pour réaliser ce film ultime, toutes se soldant par un échec.
Dont une par la phrase "Qui veut voir des films pesants où des gens boivent du thé ou de l'alcool pendant une demi-heure ?".
Kitano se moque avec tendresse du cinéma japonais mais aussi de son propre cinéma dans ce métrage.
On y croise du tout et du n'importe quoi : comme des catcheurs qui tiennent un restaurant et démolissent tous ceux qui se plaignent de la nourriture, un méchant savant fou aux inventions dingues qui rit en permanence, une pseudo parodie de Matrix et encore beaucoup d'autres choses toujours plus cocasses les unes que les autres.
La force et la faiblesse de Glory to the Filmmaker c'est d'être toujours sur la corde raide entre l'humour et le n'importe quoi, ce qui rend le film parfois légèrement dur d'accès si on cherche à suivre "l'histoire" tant elle part dans le flou et dans tous les sens.
Glory to the Filmmaker peut être pris comme un exercice de l'auteur mais aussi un demi aveu d'un manque d'inspiration tout comme l'inverse.
lundi 21 novembre 2011
Twilight: Breaking Dawn (2011) by Dylan
Twilight 4 : Breaking Dawn, le dernier film de la saga, première partie. (Bien qu’on se demande ce qu’ils vont mettre dans la deuxième). Aller, on prend les mêmes et on recommence. Ce coup-ci, on ne débute pas par Bella et Edward qui papillonnent dans un champ, mais par Bella qui apprend à marcher avec des talons. Ben oui, parce qu’elle va se marier, et qu’elle est obligée de se coltiner tout l’attirail. Bella va enfin devenir une femme en perdant ENFIN sa virginité (après le mariage bien sûr). Sauf que Bella flippe quand même un peu, parce que dans son cas, elle ne se marie pas vraiment jusqu’à ce que la mort les sépare. Elle se marie vraiment pour l’éternité. Parce qu’après le mariage, et après la nuit de noce, Bella va devenir vampire. Elle sera donc mariée à un émo tout blanc pour toujours. Mais bon, en attendant, Bella se prépare pour le mariage, et tout le monde se réunit dans les bois pour l’occasion. Le père de Bella n’est pas content que sa fille se marie à 18 ans mais il fait avec, en picolant et tirant des gueules de 3 mètres de long. Bella elle, nous dit grâce à une « super » narration que le temps de l’enfance est terminé et qu’elle grandit. Sous entendu, elle va bientôt se faire troncher et oublier ses rêves. Ou dans le cas de Bella, elle va ENFIN se faire troncher. Parce que bon, mine de rien, ça fait quand même quatre films qu’on attend ça.
Mais bon, en attendant, elle insiste pour faire l’amour pour la première fois en étant humaine. Même si c’est vachement dangereux, parce que Edward est vachement costaud et risque de la défoncer. D’ailleurs, tout ça ne plait pas du tout à Jacob. Jacob, il enlève toujours son t-shirt, mais il a de la barbe maintenant, il est plus mûr, alors il se fout moins à poil. Mais comme il est dégouté que Bella épouse Edward, il passe ses journées à courir dans les bois en loup-garou. Bah oui, ça défoule de courir nu dans les bois ! Finalement, Jacob vient quand même au mariage de Bella, invité par Edward. On ne sait pas pourquoi d’un coup Edward est devenu "pote" avec Jacob alors que dans le film d’avant, il avait quand même roulé des galoches à sa femme. MAIS BON. Pendant le mariage, Bella parle donc avec Jacob, danse avec lui, le serre dans ses bras pendant qu’il essaye lamentablement de l’embrasser dans le cou. Bella dit à Jacob qu’elle va coucher avec Edward en étant encore humaine. Et Jacob ramène ses potes chippendales pour lui faire la morale. Quel beau mariage ! Avoir une bande d’adolescent qui viennent te parler de ta virginité dans les bois. La classe quoi. Après le mariage, les deux partent en lune de miel, et tout semble bien se passer. Bella stresse, mais sa première fois se passe super bien. Sauf qu’elle a quelques bleus sur elle et que du coup, Edward se persuade qu’il lui a fait super mal et décide…de ne plus coucher avec elle. SUPREME FAIL. Du coup Bella n’est plus vierge mais elle veut encore niquer Edward. Encore et encore et encore. Vous l’avez compris, Bella est enfin une cochonne qui s’assume. Mais Edward ne veut pas, alors elle insiste, elle l’allume, et elle arrive à le faire craquer.Quelle sale tentatrice qui considère le sexe comme du plaisir ! BOUH.
Fuck me....
Heureusement, Twilight est très branché morale et va donc faire comprendre aux petites adolescentes que si tu es trop cochonne, tu vas prendre grave cher. Alors voilà, comme Bella ne connaît pas les capotes, et qu’elle pense que les vampires ça n’a pas de sperme….Bah elle tombe enceinte. Sauf qu’elle est enceinte d’un vampire, donc son bébé grandit 50 fois plus vite que la normale. Elle se retrouve alors enceinte après seulement 14 jours de mariage. Et son ventre grossit à vu d’œil. Et évidemment, elle ne veut pas avorter. Alors elle mets sa vie en danger, parce qu’être enceinte d’un bébé vampire, ça va clairement la tuer. Et il n’y a rien à faire. Ils passent alors tout le film à criser, à s’inquiéter, et a essayer de trouver une solution pour sauver Bella, sauver le bébé (ou le buter, selon les personnages). Tout le monde s’en mêle, les loups aussi. Le bébé est en train de tuer Bella vu qu’il est « trop fort » pour elle. La seule solution pour la sauver c’est qu’elle boive du sang. Alors elle le fait. Et elle kiffe. Mais ça ne suffit pas. Bella va-t-elle survivre ? Ou va t-elle regretter d’avoir été une petite cochonne à seulement 18 ans ? Jacob va-t-il empêcher ses potes de tuer Bella et son bébé?
Oh shit....
Au delà de l’histoire de merde, je dois avouer que j’ai été très surprise de la qualité de ce dernier film. Evidemment, ça reste à l’eau de rose, mal joué pour pas mal de personnages, et sans grand intérêt une fois sortit de la salle. Mais je voudrais dire BRAVO à l’équipe maquillage et effets spéciaux. Bella, lorsqu’elle est enceinte, devient tout maigre (sauf son ventre), toute blanche, toute frêle, et franchement flippante. Ce que j’ai apprécié dans le film, c’est la violence des images (oui oui). Ils n’ont pas hésités à vraiment rendre Kristen Stewart « horrible ». C’est très, très bien foutu. La scène de l’accouchement aussi, et tout ce qui suit après. Pour ça, j’ai été surprise, moi qui m’attendait à ce qu’ils épurent tout ça pour faire plaisir aux petites adolescentes qui s’identifient à Bella. Mais non, elle s’en prend vraiment plein la gueule, et tout le côté psychologique, relation entre elle et Edward etc… c’était réussi. Ca, c’est pour le côté positif. Mais il prend une place importante dans le film, et c’est pour ça que je trouve que c’est le plus réussi des Twilight, avec le 3. Par contre, les personnages secondaires sont clairement inutiles. On ne les voit presque pas et leurs scènes ne servent à rien et sont souvent mal jouées. La pote de Bella qui est jalouse, son père qui décidemment n’a jamais joué correctement depuis le début… sa mère en hippy/mère idéale, Jasper en mode beau gosse qui a UNE phrase de dialogue (Legolas power). On a aussi les deux loups qui décident d'aller aider Jacob, tout ça parce que Jacob fait le rebel et que ça les change de leur routine pourri... Et même quand on pense que le film est fini, on nous colle une scène surprise en plein dans le générique de fin, avec les Volturi (qu’on a pas vu de tout le film) qui nous disent que même si Bella devient vampire, leur conflit ne s’arrêtera pas, car la famille Cullen a quelque chose qu’ils veulent. (Le bébé? Ou autre chose?) OUUUUH SUSPENS !!!!!!
Conclusion : une bonne surprise, je m’attendais à bien pire que ça. Mais le film (et le livre) est beaucoup trop moralisateur. Il y a des passages drôles, de très bonnes idées, et une violence assumée, surtout vers la fin. Et rien que pour voir Jacob tomber amoureux du bébé de Bella (oui oui, un bébé), c’est franchement énorme. Twilight est donc un film qui vous dit que le sexe c’est mal, mais la pédophilie, c’est bien.
Eraserhead, David Lynch (1977) by Wayne
Eraserhead.
Rien que l'évocation de ce titre de film provoque chez certains une urticaire spontanée et chez d'autres des déclarations amoureuses ; et il en faut, des débats passionnés pour extraire la substance de ce premier long métrage indépendant devenu culte. David Lynch nous a-t-il livré le meilleur film de tous les temps ou s'est-il vastement foutu de la gueule du spectateur ?
Alors, de quoi en retourne-t-il ? Pourquoi tant de battage ? Premièrement, Eraserhead est une œuvre qui a mis longtemps avant d'avoir pu voir le jour en 1977. En effet, au départ c'était un court métrage nommé GardenBack, traitant de l'adultère, rien à voir. David Lynch faisait ce court métrage grâce à quelques bourses obtenues grâce à ses courts métrages précédent, et finalement il remplace le scénario original par celui de Eraserhead et commence à le tourner. Seulement, lorsqu'il présente une des scènes à l'American Film Institute, qui l'aidait au financement, ceux ci se retirent totalement. Lynch se retrouve donc sans aucune aide, et va devoir compter sur les apports financiers de ses collaborateurs et de sa famille pour mener à bien son film... et ça va durer plus de cinq années. Deuxièmement, on peut dire que les mecs ont su faire une promo vraiment astucieuse : le film étant diffusé en seconde partie de soirée dans deux cinémas New Yorkais (à l'affiche pendant 4 ans en Midnight Movie quand même), les spectateurs sortants de la salle se voyait offrir un petit badge « Eraserhead, i saw it ! », qui pouvait ensuite titiller la curiosité de tous les gens qui le voyaient.
Le film en lui même associé à son histoire, et sa rareté en salle, la coupe de cheveux de Jack Nance, tout ça a contribué à faire de Eraserhead un film culte.
Mais alors, de quoi ça parle ? L'histoire en elle même est assez simple.
Henry (interprété par Jack Nance) est un imprimeur un peu attardé (voire autiste vu sa difficulté à communiquer) confronté à la morosité de son quotidien. Une existence pathétique et morne qui ne l'épargne pas des coups durs, puisqu'il apprend bientôt que Mary (Charlotte Stewart), cette sainte nitouche ultra émotive qu'il n'a pas vu depuis des semaines, a accouché de son fils. Une malédiction pour lui, qui voudrait déjà vivre sa propre vie... Pourtant la mère de Mary insiste pour qu'Henry prenne ses responsabilité et épouse Mary. En fait, son seul échappatoire, c'est le rêve.
Bon, ça a l'air simple comme ça, mais faut pas oublier que c'est le premier long métrage de Lynch, et donc il s'est lâché dessus. Il ne va pas te dire directement quand est ce que vient la réalité, quand est ce qu’apparaît le rêve. Pas du tout même. Les deux se mélangent.
Henry est tellement accablé par son existence qu'il rêve aussi bien éveillé qu'endormi, ce qui fait qu'on peut assister à des scènes totalement surréalistes et purement métaphoriques. Si Lynch avait voulu faire passer le message « il s'est précipité dans la gueule du loup », il aurait tourné une scène où le personnage cours dans la gueule d'un loup géant. C'est un peu comme ça qu'il faut le voir.
Ainsi, la scène du dîner, quand le père de Mary demande à Henry de couper un poulet histoire de dire « tiens, montre nous que tu as les choses en main, montre nous que tu es de la famille », il voit la carcasse de poulet essayer de remuer ses ailes déplumées, puis en train de saigner... ce qui effraie Henry qui se rend compte que c'est ce qui va lui arriver s'il accepte d'entrer dans la famille : il se retrouvera coincé, il ne pourra pas « s'envoler » et en attendant sa mort. Reste à savoir si c'est ce qu'il s'imagine...
La seule scène a aborder le rêve de façon explicite est celle qui donnera le nom au film. Scène contenant à peu près tous les clichés de Lynch, déroutante, extraordinaire et passionnante.
Tout est donc centré sur Henry. Certains diront qu'il y a trois personnages primordiaux en plus de lui... Je pense qu'on peut réduire au moins deux de ces personnages à Henry lui même et sa coupe de cheveux aussi extravagante que le film. Ces deux personnages liés à Henry sont le bébé d'Henry (qui ressemble a une salamandre mutante indescriptible), et l’énigmatique femme du radiateur... Le troisième personnage est la femme fantasme de l'autre côté du palier.
Ha oui, là ça devient un peu plus spécial, je vous l'accorde ! Je vous laisserai trouver quels rôles ont ces personnages pour Henry...
Cependant, si on regarde de plus prêt la filmographie de Lynch, on décèle quelques thèmes qui reviennent souvent et qui donnent un indice quant à l'interprétation des rôles de ces personnages : le double (parfaitement identifiable dans Lost Highway et Mulholland Drive par exemple), et le personnage prisonnier de sa condition qui ne peut en sortir que par sacrifice.
L'image en noir et blanc complète parfaitement le propos et va de pair avec la musique qui joue un rôle important en complément des images. Elle accentue l’atmosphère froide et industrielle de la vie d'Henry, comme si elle donnait plus d'importance aux décors qu'aux personnages eux même ; ce qui est très intéressant, puisqu'on a l'impression dans le film que Lynch a voulu montrer à quel point la vie d'Henry et des personnes qui l'entourent est sans intérêt, et par conséquent, effrayante.
Le seul morceau qui diffère de ça est la chanson de la femme du radiateur (radiateur ? Froid ? Chaud ? Coïncidence?), entêtante et...énervante (totalement subjectif). Sorte de comptine très explicite sur l'interprétation que l'on peut faire de la fin du film.
Il est clair que ce film est très intéressant dans le fond et même la forme. Cependant, il est vraiment extrêmement difficile d'y entrer. J'ai moi même eu énormément de mal, je me suis quasi forcé à le regarder, motivé et animé seulement par la question « où est ce que ça mène »... Peut être que si j'avais lu mon article avant de voir le film, j'y aurais eu plus d’intérêt dès le début (retour vers le futur). Mais là, même en ayant vu et apprécié la plupart de ses films, ce fut dur. Et pourtant j'ai quand même pu pondre cet article plutôt mélioratif. Improbable.
C'est en fait peut être cela, l'effet d'un film culte.
En tout cas maintenant, si vous voulez le voir, vous êtes prévenus !
Rien que l'évocation de ce titre de film provoque chez certains une urticaire spontanée et chez d'autres des déclarations amoureuses ; et il en faut, des débats passionnés pour extraire la substance de ce premier long métrage indépendant devenu culte. David Lynch nous a-t-il livré le meilleur film de tous les temps ou s'est-il vastement foutu de la gueule du spectateur ?
Alors, de quoi en retourne-t-il ? Pourquoi tant de battage ? Premièrement, Eraserhead est une œuvre qui a mis longtemps avant d'avoir pu voir le jour en 1977. En effet, au départ c'était un court métrage nommé GardenBack, traitant de l'adultère, rien à voir. David Lynch faisait ce court métrage grâce à quelques bourses obtenues grâce à ses courts métrages précédent, et finalement il remplace le scénario original par celui de Eraserhead et commence à le tourner. Seulement, lorsqu'il présente une des scènes à l'American Film Institute, qui l'aidait au financement, ceux ci se retirent totalement. Lynch se retrouve donc sans aucune aide, et va devoir compter sur les apports financiers de ses collaborateurs et de sa famille pour mener à bien son film... et ça va durer plus de cinq années. Deuxièmement, on peut dire que les mecs ont su faire une promo vraiment astucieuse : le film étant diffusé en seconde partie de soirée dans deux cinémas New Yorkais (à l'affiche pendant 4 ans en Midnight Movie quand même), les spectateurs sortants de la salle se voyait offrir un petit badge « Eraserhead, i saw it ! », qui pouvait ensuite titiller la curiosité de tous les gens qui le voyaient.
Le film en lui même associé à son histoire, et sa rareté en salle, la coupe de cheveux de Jack Nance, tout ça a contribué à faire de Eraserhead un film culte.
Mais alors, de quoi ça parle ? L'histoire en elle même est assez simple.
Henry (interprété par Jack Nance) est un imprimeur un peu attardé (voire autiste vu sa difficulté à communiquer) confronté à la morosité de son quotidien. Une existence pathétique et morne qui ne l'épargne pas des coups durs, puisqu'il apprend bientôt que Mary (Charlotte Stewart), cette sainte nitouche ultra émotive qu'il n'a pas vu depuis des semaines, a accouché de son fils. Une malédiction pour lui, qui voudrait déjà vivre sa propre vie... Pourtant la mère de Mary insiste pour qu'Henry prenne ses responsabilité et épouse Mary. En fait, son seul échappatoire, c'est le rêve.
Bon, ça a l'air simple comme ça, mais faut pas oublier que c'est le premier long métrage de Lynch, et donc il s'est lâché dessus. Il ne va pas te dire directement quand est ce que vient la réalité, quand est ce qu’apparaît le rêve. Pas du tout même. Les deux se mélangent.
Henry est tellement accablé par son existence qu'il rêve aussi bien éveillé qu'endormi, ce qui fait qu'on peut assister à des scènes totalement surréalistes et purement métaphoriques. Si Lynch avait voulu faire passer le message « il s'est précipité dans la gueule du loup », il aurait tourné une scène où le personnage cours dans la gueule d'un loup géant. C'est un peu comme ça qu'il faut le voir.
Ainsi, la scène du dîner, quand le père de Mary demande à Henry de couper un poulet histoire de dire « tiens, montre nous que tu as les choses en main, montre nous que tu es de la famille », il voit la carcasse de poulet essayer de remuer ses ailes déplumées, puis en train de saigner... ce qui effraie Henry qui se rend compte que c'est ce qui va lui arriver s'il accepte d'entrer dans la famille : il se retrouvera coincé, il ne pourra pas « s'envoler » et en attendant sa mort. Reste à savoir si c'est ce qu'il s'imagine...
La seule scène a aborder le rêve de façon explicite est celle qui donnera le nom au film. Scène contenant à peu près tous les clichés de Lynch, déroutante, extraordinaire et passionnante.
Tout est donc centré sur Henry. Certains diront qu'il y a trois personnages primordiaux en plus de lui... Je pense qu'on peut réduire au moins deux de ces personnages à Henry lui même et sa coupe de cheveux aussi extravagante que le film. Ces deux personnages liés à Henry sont le bébé d'Henry (qui ressemble a une salamandre mutante indescriptible), et l’énigmatique femme du radiateur... Le troisième personnage est la femme fantasme de l'autre côté du palier.
Ha oui, là ça devient un peu plus spécial, je vous l'accorde ! Je vous laisserai trouver quels rôles ont ces personnages pour Henry...
Cependant, si on regarde de plus prêt la filmographie de Lynch, on décèle quelques thèmes qui reviennent souvent et qui donnent un indice quant à l'interprétation des rôles de ces personnages : le double (parfaitement identifiable dans Lost Highway et Mulholland Drive par exemple), et le personnage prisonnier de sa condition qui ne peut en sortir que par sacrifice.
L'image en noir et blanc complète parfaitement le propos et va de pair avec la musique qui joue un rôle important en complément des images. Elle accentue l’atmosphère froide et industrielle de la vie d'Henry, comme si elle donnait plus d'importance aux décors qu'aux personnages eux même ; ce qui est très intéressant, puisqu'on a l'impression dans le film que Lynch a voulu montrer à quel point la vie d'Henry et des personnes qui l'entourent est sans intérêt, et par conséquent, effrayante.
Le seul morceau qui diffère de ça est la chanson de la femme du radiateur (radiateur ? Froid ? Chaud ? Coïncidence?), entêtante et...énervante (totalement subjectif). Sorte de comptine très explicite sur l'interprétation que l'on peut faire de la fin du film.
Il est clair que ce film est très intéressant dans le fond et même la forme. Cependant, il est vraiment extrêmement difficile d'y entrer. J'ai moi même eu énormément de mal, je me suis quasi forcé à le regarder, motivé et animé seulement par la question « où est ce que ça mène »... Peut être que si j'avais lu mon article avant de voir le film, j'y aurais eu plus d’intérêt dès le début (retour vers le futur). Mais là, même en ayant vu et apprécié la plupart de ses films, ce fut dur. Et pourtant j'ai quand même pu pondre cet article plutôt mélioratif. Improbable.
C'est en fait peut être cela, l'effet d'un film culte.
En tout cas maintenant, si vous voulez le voir, vous êtes prévenus !
Drive de Nicolas Winding Refn by Jim
If I drive for you, you give me a time and a place. I give you a five-minute window, anything happens in that five minutes and I'm yours no matter what. I don't sit in while you're running it down; I don't carry a gun... I drive (The Driver)
Drive commence sur ces quelques mots d’un homme mystérieux qui porte un blouson orné d’un scorpion dans le dos. L’homme regarde les lumières de la ville – Los Angeles – et part dans l’ombre, dans la nuit. La première vraie séquence du film montre ce même homme dans une activité qu’il maîtrise avec brio et froideur : celle d’être le chauffeur de malfrats qui font des casses. Son cure-dent coincé entre les lèvres, des cernes marquées sur son visage, « The Driver » ne fait qu’une chose : conduire.
Drive est le film de la consécration, pour Nicolas Winding Refn, le réalisateur de la trilogie danoise Pusher et de Valhalla Rising, mais aussi pour Ryan Gosling, un acteur qui, depuis ces quelques dernières années, ne cesse de nous épater avec des rôles qui vont toujours plus loin dans le grandiose. Refn s’est vu récompenser – pour sa réalisation épatante et stylée - avec le prix de la mise en scène, à Cannes, en 2011, et Gosling, lui, s’est contenté de devenir une figure, un acteur imparable, forcément et définitivement incontournable. Dorénavant, quand on parlera de l’acteur canadien, ce sera pour l’encenser dans le rôle difficile du Driver, ce personnage étrange, quasi-impassible, presqu’incompréhensible, mais tellement soucieux d’une chose : de la femme qu’il aime, même s’il n’a pas le droit de le faire. On peut dire que dans la carrière de Gosling, il y aura un avant et un après Drive ; il est entré dans la cour des grands, est devenu intemporel, comme un De Niro avec Taxi Driver, un Pacino avec Scarface, ou un Brando avec The Godfather. The Driver est un rôle comme on en a une fois dans sa vie. Un de ces rôles qui vont marquer des générations de cinéphiles à force de leur glacer le sang et de les pousser dans leurs derniers retranchements. Pour revenir à Refn, il a également beaucoup de mérite : celui de faire un film qui n’appartient à aucun genre, qui défie les catégories : si le fond de l’histoire peut faire penser au western (le cowboy solitaire qui sauve la veuve et l’orphelin), en une heure quarante on passe du drame à la sauce Cronenberg (certaines scènes font penser à A History of Violence) au romantique anti-mainstream (l’histoire entre Irene et The Driver ne tombe jamais dans le cliché rose bonbon).
Bien sûr, Drive est tout sauf un film d’action : il n’y a que deux scènes de poursuite en voiture – parfaitement maîtrisées-, et, on s’attarde plus sur The Driver que sur les cascades. C’est un peu ça Drive : un film bizarre, violent, inattendu, stylé, mais pas un Fast and Furious 6, et heureusement. D’un point de vue psychologique, on n’entre jamais dans les clichés faciles, ni dans les heuristiques habituelles : le personnage principal, The Driver, ou Kid pour son boss, est un personnage comme on en voit rarement, difficile à cerner : on ne sait rien de lui, ni son prénom, ni s’il est fils, frère ou ami. Un mystère total joué avec brio par Gosling, qui cultive sa part d’ombre pour nous emmener là où on ne revient plus, ou du moins, où chaque minute est lourd, véhémente. En plus d’être aussi fuyant qu’une ombre, The Driver séduit. Même lorsqu’il est méthodique, distant, placide, violent d’une certaine façon, le personnage ne perd aucunement son charisme : il étincelle, il est le sexe à l’état pur. Les rares sourires qui ornent le visage du Driver ne sont que des sortilèges qu’il lance, sans le savoir : sa dualité est elle-même enivrante, presque magique, surtout parce que tout ce qu’il fait, même les gestes les plus virulents, ne sont que le résultat de son envie de protéger celle qui fait battre son cœur.
En dehors de Gosling, il y a Carey Mulligan, sombre et tellement vraie qu’elle éclipse ses précédentes (excellentes) prestations, que ce soit dans An Education ou dans Never Let Me Go. Le duo formé avec Gosling est d’autant plus intéressant de par le fait qu’il est voué à l’échec : les deux amoureux maudits ne sont pas censés vivre le bonheur, leurs destinées ne doivent pas connaître un point d’intersection. Pour l’actrice anglaise au regard d’ordinaire mutin, le film est une occasion de briller et de jouer avec ses plus beaux regards, ses expressions les plus vives. Mais la présence de son personnage, Irene, ne dissimule pas toute l’intrigue inquiétante et (plus) intéressante : si le film effleure l’amour, et le considère comme moteur principal de l’action, il n’en fait pas le simple propos. Bryan Cranston, figure centrale de la série Breaking Bad, tient un rôle clef, entouré de deux ténors cruels aux mains sales : Albert Brooks et Ron Perlman (inoubliable One dans La Cité des Enfants Perdus de Jeunet et Caro). On rejoint encore l’aspect western à cause de ces derniers, qui font figure de brutes et truands en comparaison avec The Driver qui serait un héros.
Si le clin d’œil aux westerns est évident, celui aux films des années 80 l’est encore plus : on se croirait en train de regarder une histoire qui se passe il y a plus de vingt ans. Los Angeles semble inchangée, les décors ne mettent jamais en avant l’univers quasi high-tech dans lequel nous évoluons actuellement. Les voitures choisies pour le film sont également intemporelles et ne suggèrent pas que le film a été tourné en 2010. La seule chose qui rappelle à la réalité le spectateur, c’est lorsqu’un téléphone portable sonne. Mais le répit est de courte durée, nous voilà de retour dans une autre ambiance, pleine de brouillard et de solitude. Drive rappelle Taxi Driver bien sûr : les deux personnages principaux vivent en marge de la société, et roulent, nous livrent sur un plateau d’argent leurs villes respectives. Mais là où les deux films diffèrent, c’est dans l’exploration de la psychologie des personnages : The Driver n’est pas le taxi driver, puisque de ce dernier on connaît le passé. De plus, le taxi driver, lui, devient fou, alors que The Driver, lui, habite psychiquement dans le monde, agit en réfléchissant de façon « raisonnable ».
Ce qui aide beaucoup Refn à scotcher et à charmer, c’est la musique du film. Les morceaux composés par Cliff Martinez sont en parfaite adéquation avec les chansons exploitées plus que judicieusement à certains moments, dont la très « à -propos » A Real Hero de College & Electric Youth. Toutes les chansons rajoutées – à l’exception de Oh My Love de Riz Ortolani – peuvent être taxées d’« electro-pop », avec des tonalités romantiques, qui se prêtent à la relation de The Driver et d’Irene. Dans le registre électronique, il y a aussi Tick of the Clock de The Chromatics qui énerve à cause de la tension qu’elle suggère, mais c’est tout à fait normal et enviable, le morceau sert pour la première séquence où on voit The Driver en plein casse. En dehors de la musique, la photographie occupe aussi une place prépondérante : les couleurs de Los Angeles by night donnent une impression particulière, entre fièvre et peur. D’ailleurs, la plupart des plans du film sont tournés dans l’obscurité ou dans des lumières artificielles, ce qui rend encore plus poétique l’esthétique générale. Même les couleurs les plus crues deviennent donc une explosion de beauté, de splendeur, de chaleur.
Refn n’a pas volé son prix de la mise en scène : chaque scène a son importance, est filmée avec un savoir-faire inégalable. Quand un film est bien réalisé, c’est lorsqu’il partage un imaginaire, une vision qui est unique, incroyable. Le pari est réussi avec Drive : on nous présente un univers inclassable, un personnage principal mi-ange mi-démon qui transpire de charisme, un mélange jouissif des genres, une surprise qui prend des airs de poing dans la gueule, mais qui sous la couche de sang, est un baiser langoureux et sensuel.
Trailer
Drive commence sur ces quelques mots d’un homme mystérieux qui porte un blouson orné d’un scorpion dans le dos. L’homme regarde les lumières de la ville – Los Angeles – et part dans l’ombre, dans la nuit. La première vraie séquence du film montre ce même homme dans une activité qu’il maîtrise avec brio et froideur : celle d’être le chauffeur de malfrats qui font des casses. Son cure-dent coincé entre les lèvres, des cernes marquées sur son visage, « The Driver » ne fait qu’une chose : conduire.
Drive est le film de la consécration, pour Nicolas Winding Refn, le réalisateur de la trilogie danoise Pusher et de Valhalla Rising, mais aussi pour Ryan Gosling, un acteur qui, depuis ces quelques dernières années, ne cesse de nous épater avec des rôles qui vont toujours plus loin dans le grandiose. Refn s’est vu récompenser – pour sa réalisation épatante et stylée - avec le prix de la mise en scène, à Cannes, en 2011, et Gosling, lui, s’est contenté de devenir une figure, un acteur imparable, forcément et définitivement incontournable. Dorénavant, quand on parlera de l’acteur canadien, ce sera pour l’encenser dans le rôle difficile du Driver, ce personnage étrange, quasi-impassible, presqu’incompréhensible, mais tellement soucieux d’une chose : de la femme qu’il aime, même s’il n’a pas le droit de le faire. On peut dire que dans la carrière de Gosling, il y aura un avant et un après Drive ; il est entré dans la cour des grands, est devenu intemporel, comme un De Niro avec Taxi Driver, un Pacino avec Scarface, ou un Brando avec The Godfather. The Driver est un rôle comme on en a une fois dans sa vie. Un de ces rôles qui vont marquer des générations de cinéphiles à force de leur glacer le sang et de les pousser dans leurs derniers retranchements. Pour revenir à Refn, il a également beaucoup de mérite : celui de faire un film qui n’appartient à aucun genre, qui défie les catégories : si le fond de l’histoire peut faire penser au western (le cowboy solitaire qui sauve la veuve et l’orphelin), en une heure quarante on passe du drame à la sauce Cronenberg (certaines scènes font penser à A History of Violence) au romantique anti-mainstream (l’histoire entre Irene et The Driver ne tombe jamais dans le cliché rose bonbon).
Bien sûr, Drive est tout sauf un film d’action : il n’y a que deux scènes de poursuite en voiture – parfaitement maîtrisées-, et, on s’attarde plus sur The Driver que sur les cascades. C’est un peu ça Drive : un film bizarre, violent, inattendu, stylé, mais pas un Fast and Furious 6, et heureusement. D’un point de vue psychologique, on n’entre jamais dans les clichés faciles, ni dans les heuristiques habituelles : le personnage principal, The Driver, ou Kid pour son boss, est un personnage comme on en voit rarement, difficile à cerner : on ne sait rien de lui, ni son prénom, ni s’il est fils, frère ou ami. Un mystère total joué avec brio par Gosling, qui cultive sa part d’ombre pour nous emmener là où on ne revient plus, ou du moins, où chaque minute est lourd, véhémente. En plus d’être aussi fuyant qu’une ombre, The Driver séduit. Même lorsqu’il est méthodique, distant, placide, violent d’une certaine façon, le personnage ne perd aucunement son charisme : il étincelle, il est le sexe à l’état pur. Les rares sourires qui ornent le visage du Driver ne sont que des sortilèges qu’il lance, sans le savoir : sa dualité est elle-même enivrante, presque magique, surtout parce que tout ce qu’il fait, même les gestes les plus virulents, ne sont que le résultat de son envie de protéger celle qui fait battre son cœur.
En dehors de Gosling, il y a Carey Mulligan, sombre et tellement vraie qu’elle éclipse ses précédentes (excellentes) prestations, que ce soit dans An Education ou dans Never Let Me Go. Le duo formé avec Gosling est d’autant plus intéressant de par le fait qu’il est voué à l’échec : les deux amoureux maudits ne sont pas censés vivre le bonheur, leurs destinées ne doivent pas connaître un point d’intersection. Pour l’actrice anglaise au regard d’ordinaire mutin, le film est une occasion de briller et de jouer avec ses plus beaux regards, ses expressions les plus vives. Mais la présence de son personnage, Irene, ne dissimule pas toute l’intrigue inquiétante et (plus) intéressante : si le film effleure l’amour, et le considère comme moteur principal de l’action, il n’en fait pas le simple propos. Bryan Cranston, figure centrale de la série Breaking Bad, tient un rôle clef, entouré de deux ténors cruels aux mains sales : Albert Brooks et Ron Perlman (inoubliable One dans La Cité des Enfants Perdus de Jeunet et Caro). On rejoint encore l’aspect western à cause de ces derniers, qui font figure de brutes et truands en comparaison avec The Driver qui serait un héros.
Si le clin d’œil aux westerns est évident, celui aux films des années 80 l’est encore plus : on se croirait en train de regarder une histoire qui se passe il y a plus de vingt ans. Los Angeles semble inchangée, les décors ne mettent jamais en avant l’univers quasi high-tech dans lequel nous évoluons actuellement. Les voitures choisies pour le film sont également intemporelles et ne suggèrent pas que le film a été tourné en 2010. La seule chose qui rappelle à la réalité le spectateur, c’est lorsqu’un téléphone portable sonne. Mais le répit est de courte durée, nous voilà de retour dans une autre ambiance, pleine de brouillard et de solitude. Drive rappelle Taxi Driver bien sûr : les deux personnages principaux vivent en marge de la société, et roulent, nous livrent sur un plateau d’argent leurs villes respectives. Mais là où les deux films diffèrent, c’est dans l’exploration de la psychologie des personnages : The Driver n’est pas le taxi driver, puisque de ce dernier on connaît le passé. De plus, le taxi driver, lui, devient fou, alors que The Driver, lui, habite psychiquement dans le monde, agit en réfléchissant de façon « raisonnable ».
Ce qui aide beaucoup Refn à scotcher et à charmer, c’est la musique du film. Les morceaux composés par Cliff Martinez sont en parfaite adéquation avec les chansons exploitées plus que judicieusement à certains moments, dont la très « à -propos » A Real Hero de College & Electric Youth. Toutes les chansons rajoutées – à l’exception de Oh My Love de Riz Ortolani – peuvent être taxées d’« electro-pop », avec des tonalités romantiques, qui se prêtent à la relation de The Driver et d’Irene. Dans le registre électronique, il y a aussi Tick of the Clock de The Chromatics qui énerve à cause de la tension qu’elle suggère, mais c’est tout à fait normal et enviable, le morceau sert pour la première séquence où on voit The Driver en plein casse. En dehors de la musique, la photographie occupe aussi une place prépondérante : les couleurs de Los Angeles by night donnent une impression particulière, entre fièvre et peur. D’ailleurs, la plupart des plans du film sont tournés dans l’obscurité ou dans des lumières artificielles, ce qui rend encore plus poétique l’esthétique générale. Même les couleurs les plus crues deviennent donc une explosion de beauté, de splendeur, de chaleur.
Refn n’a pas volé son prix de la mise en scène : chaque scène a son importance, est filmée avec un savoir-faire inégalable. Quand un film est bien réalisé, c’est lorsqu’il partage un imaginaire, une vision qui est unique, incroyable. Le pari est réussi avec Drive : on nous présente un univers inclassable, un personnage principal mi-ange mi-démon qui transpire de charisme, un mélange jouissif des genres, une surprise qui prend des airs de poing dans la gueule, mais qui sous la couche de sang, est un baiser langoureux et sensuel.
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La Piel que Habito by Harmoniak
Salut à tous, citoyens de CIN ! Aujourd’hui je sors de mes terrains connus, puisque je ne vais pas vous parler du dernier blockbuster, mais d’un film qu’on appellera « d’auteur », qu’on aime ou pas Almodovar. Il s’agit de La Piel que Habito.
D’abord, il est essentiel que je précise que le synopsis consciencieusement colporté par la presse pour la sortie du film est absolument erroné. La Piel que Habito ne développe pas « La quête d’un chirurgien esthétique d’une nouvelle peau qui aurait pu sauver sa femme, victime d’un incendie ». Le film d’Almodovar parle bien de ce détail mais le fait en l’intriquant avec les événements réellement constitutifs de son histoire. Histoire qu’il serait tout simplement ridicule de synopsiser (oui, synopsiser, absolument), parce que le film se découvre avec magie. Toutefois, c’est un très léger aperçu du film que je vais tenter de présenter pour que les plus réticents d’entre vous se laissent, peut être, tenter.
Antonio Banderas, qui signe ici une nouvelle collaboration avec le réalisateur espagnol après une période d’absence, incarne un chirurgien esthétique, Robert Ledgard pour qui « Le visage définit l’homme ». C’est avec cette réplique qu’il s’adresse à l’assemblée de scientifiques à qui il confie son dernier projet. Le film se poursuit alors en dévoilant les sombres aspérités de ce personnage : un passé trouble, une femme mystérieuse qui habite chez lui, recluse, un personnel de maison au passé aussi flou que le sien… Almodovar brode cette histoire avec finesse. Mais aussi avec cruauté.
Car, qu’on se le dise, La Piel que Habito a été conçu comme « un film d’horreur sans cris ». Peu de détails sont épargnés à la vue du spectateur. Le film est à voir en version originale pour la crudité du ton de plusieurs interventions, et aussi pour l’émotion que chaque protagoniste transmet en faisant face à une situation souvent terrifiante. Le film s’étale dans une violence sourde, parfois muette, mais adopte un ton plus caricatural que purement gore. Le sadisme côtoie un humour noir qui n’est oublié ni dans le ton ou les couleurs, ni dans la mise en scène. Le film représente d’ailleurs pour Almodovar un grand aboutissement. Certains plans sont d’une puissance que j’ai trouvé (soyons un peu subjectif), phénoménale.
Et ce qui plait aussi dans ce film, c'est la relation artistique recherchée du réalisateur avec ce qu’il filme. Ce qui m’a frappé par exemple, est le côté très plastique des plans ciblés sur le tissu. Ce n’est pas qu’une question de visuel. Il y a le mouvement des mains qui manipulent les étoffes, ou les sons de déchirement qui se font entendre par moments. Je pense particulièrement a un plan assez long dans lequel une robe est éparpillée au sol et que… par l’action d’un certains personnage, ces morceaux de tissus s’animent, disparaissent, comme si l’air du temps était happé avec panache (grandes phrases, wesh). Autre exemple, la relation du metteur en scène avec la manipulation manuelle de plusieurs objets. En chirurgie d’abord, avec les opérations que pratique Robert (à prononcer avec l’accent Castillan, bien sûr !), mais aussi dans toutes les petites transitions qui ponctuent le film. C’est si minutieux que le trivial en devient beau !
Le film est aussi nourri et se repait de références artistiques importantes. L’œuvre de Louise Bourgeois est par exemple largement employée à plusieurs reprises. Côté lumière, Almodovar signe aussi une partition de couleurs impressionnante. Pas une teinte qui ne sonne faux. Des plans hospitaliers qui subjuguent, rien n’est laissé au hasard, et le film devient une sorte de toile de maître au détour de chaque travelling. Almodovar allie aussi à sa fresque un assortiment de costumes choisis. Ici, un Homme-Tigre de cirque côtoie une femme sublime en combinaison de tissu rose peau.
Bien entendu, aucune prestation d’acteur n’est à mettre de côté. À commencer bien sûr par Antonio Banderas, qui fait preuve d’un diabolisme fou mais retenu tout en finesse. Quant à Elena Anaya, qui incarne la mystérieuse femme qui habite avec Ledgard, elle joue avec son physique sublime et sa grâce de danseuse pour tisser son rôle avec mérite. Complexes et jamais unidimensionnels, les personnages sont écrits et contribuent ainsi largement à la richesse du film.
Quant au scénario, il est à la fois épatant de machiavélisme, et épouvantablement inhumain. L’histoire captive par ses twists mêlés de moments de grâce ou d’intense émotion (de l’horreur, souvent, et le film en devient presque inquisiteur et malmène le spectateur à ce niveau là). Mais lorsque l’issue s’amorce, on comprend qu’il est question de thèmes plus complexes que ceux envisagés : la quête d’identité, de rédemption, de vengeance, au premier abord. Mais pourquoi pas d’inceste ou de liberté d’Être ? On ira glaner le sens où il se trouve, une deuxième lecture étant fortement recommandée pour comprendre les retors du film.
Mais c’est avec un regard peut être critique que j’avancerai que le film a sans doute des aspects rebutants. D’abord, sa façon d’aborder l’horreur qu’il comporte. Avis aux âmes sensibles amateurs de papillons, La Piel que Habito s’adresse à ceux qui peuvent faire face à des peurs charnelles plus qu’à des images réellement choquantes. En fait, le plus marquant du film sont les idées qu’il inspire. Encore qu’ayant l’Espagnol pour langue maternelle, j’ai aussi retenu plusieurs répliques et le ton sur lesquelles elles sont alors prononcées.
Ensuite, il est à admettre que le film aborde des thématiques complexes qu’on ne peut aborder dans l’optique d’aller voir un simple film de « détente ». C’est en se plongeant pleinement en lui qu’on en découvre toutes les subtilités.
Enfin, et même si pour le coup cela me semble capilotracté, je sais que certaines personnes pourront se détacher (et non pas se désintéresser) du film pour deux principales raisons : d’abord sa lenteur dans certains passages, qui est utilisée comme un moyen de sublimer les moments de grâce artistique, mais qui mal interprétée, peut céder chez des esprits parfois moins sensibles à l’écriture d’Almodovar, la place à un ennui certains. Enfin, mais c’est encore plus rare, il est possible qu’une faiblesse du film mal considérée soit son côté « On y va jusqu’au bout du bout » dans les scènes éprouvantes. Je pense surtout à un plan ou il est question de dilatation. Ce n’est pas vraiment ce que vous croyez si vous n’avez pas vu le film. Vous savez de quoi je parle sinon.
La Piel que Habito est un film que j’ai aimé pour sa complexité à la fois scénaristique dans les thèmes qu’il aborde avec subtilité, et graphique dans son sens du beau, de l’horreur sublime, crue et remâchée pour un effet de malaise efficace. Un film à retenir, et surtout à voir et à revoir.
D’abord, il est essentiel que je précise que le synopsis consciencieusement colporté par la presse pour la sortie du film est absolument erroné. La Piel que Habito ne développe pas « La quête d’un chirurgien esthétique d’une nouvelle peau qui aurait pu sauver sa femme, victime d’un incendie ». Le film d’Almodovar parle bien de ce détail mais le fait en l’intriquant avec les événements réellement constitutifs de son histoire. Histoire qu’il serait tout simplement ridicule de synopsiser (oui, synopsiser, absolument), parce que le film se découvre avec magie. Toutefois, c’est un très léger aperçu du film que je vais tenter de présenter pour que les plus réticents d’entre vous se laissent, peut être, tenter.
Antonio Banderas, qui signe ici une nouvelle collaboration avec le réalisateur espagnol après une période d’absence, incarne un chirurgien esthétique, Robert Ledgard pour qui « Le visage définit l’homme ». C’est avec cette réplique qu’il s’adresse à l’assemblée de scientifiques à qui il confie son dernier projet. Le film se poursuit alors en dévoilant les sombres aspérités de ce personnage : un passé trouble, une femme mystérieuse qui habite chez lui, recluse, un personnel de maison au passé aussi flou que le sien… Almodovar brode cette histoire avec finesse. Mais aussi avec cruauté.
Car, qu’on se le dise, La Piel que Habito a été conçu comme « un film d’horreur sans cris ». Peu de détails sont épargnés à la vue du spectateur. Le film est à voir en version originale pour la crudité du ton de plusieurs interventions, et aussi pour l’émotion que chaque protagoniste transmet en faisant face à une situation souvent terrifiante. Le film s’étale dans une violence sourde, parfois muette, mais adopte un ton plus caricatural que purement gore. Le sadisme côtoie un humour noir qui n’est oublié ni dans le ton ou les couleurs, ni dans la mise en scène. Le film représente d’ailleurs pour Almodovar un grand aboutissement. Certains plans sont d’une puissance que j’ai trouvé (soyons un peu subjectif), phénoménale.
Et ce qui plait aussi dans ce film, c'est la relation artistique recherchée du réalisateur avec ce qu’il filme. Ce qui m’a frappé par exemple, est le côté très plastique des plans ciblés sur le tissu. Ce n’est pas qu’une question de visuel. Il y a le mouvement des mains qui manipulent les étoffes, ou les sons de déchirement qui se font entendre par moments. Je pense particulièrement a un plan assez long dans lequel une robe est éparpillée au sol et que… par l’action d’un certains personnage, ces morceaux de tissus s’animent, disparaissent, comme si l’air du temps était happé avec panache (grandes phrases, wesh). Autre exemple, la relation du metteur en scène avec la manipulation manuelle de plusieurs objets. En chirurgie d’abord, avec les opérations que pratique Robert (à prononcer avec l’accent Castillan, bien sûr !), mais aussi dans toutes les petites transitions qui ponctuent le film. C’est si minutieux que le trivial en devient beau !
Le film est aussi nourri et se repait de références artistiques importantes. L’œuvre de Louise Bourgeois est par exemple largement employée à plusieurs reprises. Côté lumière, Almodovar signe aussi une partition de couleurs impressionnante. Pas une teinte qui ne sonne faux. Des plans hospitaliers qui subjuguent, rien n’est laissé au hasard, et le film devient une sorte de toile de maître au détour de chaque travelling. Almodovar allie aussi à sa fresque un assortiment de costumes choisis. Ici, un Homme-Tigre de cirque côtoie une femme sublime en combinaison de tissu rose peau.
Bien entendu, aucune prestation d’acteur n’est à mettre de côté. À commencer bien sûr par Antonio Banderas, qui fait preuve d’un diabolisme fou mais retenu tout en finesse. Quant à Elena Anaya, qui incarne la mystérieuse femme qui habite avec Ledgard, elle joue avec son physique sublime et sa grâce de danseuse pour tisser son rôle avec mérite. Complexes et jamais unidimensionnels, les personnages sont écrits et contribuent ainsi largement à la richesse du film.
Quant au scénario, il est à la fois épatant de machiavélisme, et épouvantablement inhumain. L’histoire captive par ses twists mêlés de moments de grâce ou d’intense émotion (de l’horreur, souvent, et le film en devient presque inquisiteur et malmène le spectateur à ce niveau là). Mais lorsque l’issue s’amorce, on comprend qu’il est question de thèmes plus complexes que ceux envisagés : la quête d’identité, de rédemption, de vengeance, au premier abord. Mais pourquoi pas d’inceste ou de liberté d’Être ? On ira glaner le sens où il se trouve, une deuxième lecture étant fortement recommandée pour comprendre les retors du film.
Mais c’est avec un regard peut être critique que j’avancerai que le film a sans doute des aspects rebutants. D’abord, sa façon d’aborder l’horreur qu’il comporte. Avis aux âmes sensibles amateurs de papillons, La Piel que Habito s’adresse à ceux qui peuvent faire face à des peurs charnelles plus qu’à des images réellement choquantes. En fait, le plus marquant du film sont les idées qu’il inspire. Encore qu’ayant l’Espagnol pour langue maternelle, j’ai aussi retenu plusieurs répliques et le ton sur lesquelles elles sont alors prononcées.
Ensuite, il est à admettre que le film aborde des thématiques complexes qu’on ne peut aborder dans l’optique d’aller voir un simple film de « détente ». C’est en se plongeant pleinement en lui qu’on en découvre toutes les subtilités.
Enfin, et même si pour le coup cela me semble capilotracté, je sais que certaines personnes pourront se détacher (et non pas se désintéresser) du film pour deux principales raisons : d’abord sa lenteur dans certains passages, qui est utilisée comme un moyen de sublimer les moments de grâce artistique, mais qui mal interprétée, peut céder chez des esprits parfois moins sensibles à l’écriture d’Almodovar, la place à un ennui certains. Enfin, mais c’est encore plus rare, il est possible qu’une faiblesse du film mal considérée soit son côté « On y va jusqu’au bout du bout » dans les scènes éprouvantes. Je pense surtout à un plan ou il est question de dilatation. Ce n’est pas vraiment ce que vous croyez si vous n’avez pas vu le film. Vous savez de quoi je parle sinon.
La Piel que Habito est un film que j’ai aimé pour sa complexité à la fois scénaristique dans les thèmes qu’il aborde avec subtilité, et graphique dans son sens du beau, de l’horreur sublime, crue et remâchée pour un effet de malaise efficace. Un film à retenir, et surtout à voir et à revoir.
dimanche 13 novembre 2011
Takeshi Kitano 2/3: Zaitochi by Viyanne
Dans mon optique de vous faire mieux connaître Takeshi Kitano, me voici pour vous parler de Zaitochi, un film qu'il a réalisé en 2003 et qui représente, si on peut le dire ainsi, son côté sérieux.
Le film nous narre l'histoire de Zaitochi dans le Japon des samouraïs.
Si l'homme garde ses yeux d'aveugle fermés, ses autres sens semblent bien plus développés que la moyenne.
Il voyage beaucoup, gagnant sa vie en tant que masseur mais aussi dans des tripots à jouer et cela énormément.
Si l'homme semble calme et inoffensif, voire faible de par son handicap, il dissimule en fait un guerrier maîtrisant le sabre comme peu savent le faire.
Au long de ses voyages, Zaitochi arrive dans un village sous l'emprise d'un chef menaçant et tueur : Ginzo.
Il rencontre aussi deux geishas cherchant les meurtriers de leurs parents afin de se venger.
C'est dans ce décor que Zaitochi parcourt, mais aussi fait ce qu'il estime être juste quitte à ce que cela implique de sortir son sabre.
Anecdotes :
Zaitochi est un personnage bien connu au Japon, il a tout d'abord été le héros d'un roman de Kan Shimozawa puis d'une série d'une série de 26 films dont le premier est sorti en 1962 et le dernier en 1989. Un manga est aussi publié en 1967 et une série télévisée de 4 saisons le met aussi en vedette entre 74 et 79.
Takashi Miike a quant à lui mis en scène une pièce de théâtre sur Zaitochi en 2007. Le personnage semble avoir encore de beau jour devant lui !
Je vous avais dit lors de mon premier article sur Kitano que Zaitochi avait reçu beaucoup de récompenses, en voici la liste :
- Lion d'argent du meilleur réalisateur pour Takeshi Kitano et Prix du public au Festival de Venise 2003.
- Prix du meilleur film, prix du public et prix de la meilleure musique de film, lors du Festival international du film de Catalogne 2003.
- Prix du public, lors du Festival international du film de Toronto 2003.
- Prix de la meilleure photographie, meilleur montage, meilleur éclairage, meilleure musique de film et meilleur son, lors des Awards of the Japanese Academy 2004.
- Nomination au prix du meilleur film, lors du Festival international du film de Bangkok 2004.
- Prix du meilleur second rôle féminin pour Michiyo Ookusu, lors des Blue Ribbon Awards 2004.
- Prix du meilleur film et du meilleur second rôle féminin pour Michiyo Ookusu, lors des Kinema Junpo Awards 2004.
- Prix du meilleur second rôle masculin pour Akira Emoto et du meilleur second rôle féminin pour Michiyo Ookusu, lors du Mainichi Film Concours 2004.
ça calme...
Mais qu'est-ce-que ce film a t'il de si particulier ?
Le résumé vous laisse penser à une histoire basique et elle est, et le déroulement est lui aussi plutôt prévisible, mais ce film captive et ne perd aucun intérêt.
Ici Kitano montre ses talents d'acteur dans le meilleur de sa forme : il incarne Zaitochi avec justesse et le personnage dégage une réelle sensation de calme et de paix.
Il est aisé de comprendre que Zaitochi lutte pour le bien alors que ses paroles se font pourtant rares tout au long du film.
S'il peut sembler facile de jouer un homme qui ne voit pas, ne parle quasi pas non plus, je pense qu'il en est en fait tout l'inverse et qu'ici le jeu de Kitano relève de la performance.
Du côté de la réalisation, et donc toujours de Kitano, le tout est bien ficelé et l'image est belle.
On note pas mal de personnages secondaires sans pour autant en avoir trop.
Si Kitano nous livre ici un film sérieux et de toute beauté, il ne reste pas moins lui-même en y incorporant une petite pointe de folie par le biais du personnage de l'idiot du village, personnage scénaristiquement inutile mais totalement indispensable !
Il n'y a pas seulement la folie qui est un élément clé des oeuvres de Kitano, mais aussi la violence ; et ici autant vous dire qu'il n'a pas oublié d'y mettre le quota nécessaire ! Effusions de sang sont en perspective, c'est fou d'ailleurs cette pression sanguine qu'ils ont les japonais !
Autre aspect notable de Zaitochi : son intrusion parfaite au sein de la culture japonaise ! Si tout le monde connait les geishas et les samouraïs, Kitano nous en montre plus et m'a fait découvrir quelques petites choses ma foi bien sympathiques sur la culture japonaise !
En résumé : histoire commune mais mise en forme superbe pour ce film qui d’après moi mérite ses récompenses.
Saw, la saga by Arno
Avertissement : L’auteur décline toute responsabilité si des spoilers perturbent le bon déroulement de la lecture de cet article, mais bon avec une telle cascade de suites difficile de ne pas en faire !
En cette période Halloweenesque, il est bien un film qui va manquer (ou pas !) à l’affiche des cinémas cette année, lui qui rythmait la fête de la citrouille depuis 7 ans. C’est donc avec un brin de nostalgie ou…en fait je ne sais pas quelle idée m’a pris l’autre jour, peut-être un énième jour de pluie et une météo du même genre pour toute la semaine qui s’annonçait. C’est alors que je décidais d’enclencher mon marathon Saw : un film par jour, ça tombe bien, 7 films, 7 jours, pile une semaine de pluie… non parce que je n’allais pas pousser le vice à enchainer les visionnages à la suite, c’est un coup à devenir un dangereux psychopathe… ou être totalement lobotomisé, au choix.
Que la partie commence !
Ou comment un simple court-métrage de James Wan s’est ensuite transformé en long, premier opus qui restera le plus dans les mémoires de par son originalité, James Wan aux commandes de son bébé, rythmé par ses fameux traveling rotatif en accéléré, une ambiance délétére, une action qui se passe en huis-clos dans une pièce des plus beurk, avec à l’intérieur deux mecs enchainés - le super pote de James qui joue dans tous ses films (et aussi producteur de tous les autres opus qui ont suivi) et Cary Elwes que vous avez pu voir dans Hot Shots ou le Dracula de Coppola - pris au piège par un mystérieux serial-killer au doux nom de Jigsaw. Pendant ce temps-là dehors, un Danny Glover en inspecteur obsédé mène l’enquête pour démasquer le fameux tueur au puzzle. Personne ne dira rien à redire (je pense et j’espère) que ce film se suffisait à lui-même tellement il était abouti, le côté trash est suggéré, uniquement psychologique, pas d’images dégoutantes ou d’hémoglobine qui gicle de partout. Une vraie réussite, encensé par la critique et par le public !
L’année suivante arrive… la suite... et les années suivantes ses suites, appelons ça l'ère Bouseman !
Logique, quand on sort un film d’un million de dollars de budgets et qu’on ramasse 100 fois plus (rien que pour l’exploitation US), les maisons de prod sont obligés de faire pondre une suite ! Darren Lynn Bousman récupère les manettes de James Wan et commence à souiller à grand coup d’hectolitre de ketchup et scènes crados. Donnie ‘step by step’ Wahlberg et Diana Meyer (entre-aperçue dans le premier opus) reprennent l’enquête du tueur au puzzle jusqu’à le débusquer dans son repère. Donnie va faire les frais du dernier( ou pas !) plan de Jigsaw puisque son fils (qui a bien grandi et joue dans Scream 4 cette année) est aux premières loges aux côtés d’Amanda (unique survivante du fameux piège à ours inversé),Beverley ‘Seven Heaven’ Mitchell et d’autres sombres inconnus. Les pièges sont de plus en plus machiavéliques, tout du moins dérangeants, sanglants et/ou bien dégueus. Le dénouement final est plutôt bien joué à tel point que j’étais à deux doigts d’enclencher l’opus suivant…
… toujours réalisé par l’homme-bouse, un opus très irrégulier, qui commence avec plusieurs pièges indépendants (mouais bof, juste pour que ça tache bien !) avant d’amorcer un vrai jeu à plusieurs tiroirs (cheminement un peu plus psychologique mais des scènes bien dégueulasses quand même, y en a une en particulier qui m’aurait presque fait vomir si j’avais bu une vodka-martini de plus : je parle de celle des cochons pour les personnes qui sont allés jusqu’au 3), même si l’interprétation de Jeff est vraiment plus que moyenne, le côté je veux me venger, je vais ptêtre te pardonner mais je sais pas trop, devient très lassant, laisse les tous crever point barre merde ! Intéressantes aussi, les scènes transversales qui nous montre les préparatifs du jeu du premier film et nous raconte ce qu’il advient de l’inspecteur Matthews. Et un final qui aurait pu (dû ?) être le point final de la saga. CE troisième opus a tout de même été interdit au moins de 18 ans à sa sortie en salles, le seul de toute la saga.
Le dernier opus de l’ère Bousman (oui, nous sommes déjà un numéro quatre) se lance avec une splendide scène d’autopsie de John Kramer (aka Jigsaw), on découvre une cassette (qu’il a discrètement avalé dans l’opus précédent, mais si puisqu’on vous le dit, son deuxième surnom c’est gorge profonde !) dans son estomac. Après ça part un peu dans tous les sens, plusieurs hommes piègés dont la vie dépend des autres, et finalement on pousse le bouchon jusqu’à imbriquer cette histoire dans celle de l’opus précédent, et rajouter encore une enquête interne par des agents du FBI, houlala, ça va bien se passer… Heureusement qu’on éclaire notre lanterne sur les motivations de Kramer à répandre le bien (mal ?) autour de lui. Pas trop de scènes dégueulasses et on apprend donc que l’œuvre du jigsaw a trouvé un nouveau disciple (bah oui forcément Amanda aussi est morte !). Vous trouvez que c’est un peu tiré par les cheveux ?! Demandez-lui plutôt à elle
On refile le projet à l’ancien chef déco puis assistant réal de bas étage sous les ordres de Bousman, qui nous pond une histoire rien de bien folichon. L’agent du FBI a survécu (tout comme le dernier officier de police qui enquêtait) et pense savoir qui pris la relève de Jigsaw et va donc se mettre sur ses traces. Pendant ce temps-là, 5 personnes prises au piège tentent de survivre et on revoit Jigsaw qui enseigne les bonne manières à son protégé dans un flashback… c’est tout, 1h20 de film avec quand même deux fois la même séquence de 10min au début et à la fin du film… et un final en suspens qui laisse entrevoir donc une (énième !) suite (de trop !)
Ce qui à la base était un poisson d'avril sur Allociné, se transforme malheureusement en nouvelle suite du tueur de Strasbourg.. euh... tueur au puzzle. Donc on change encore de réal (le quatrième si vous avez bien suivi), mais c’est pas pour autant que ça va relever le niveau, le problème principal quand on se lance dans les suites de suites de suites de suites… heureusement que Kramer avait pas un chien, car on lui aurait sûrement donner le rôle du nouveau tueur au puzzle. D’ailleurs son protégé a du mal à faire diversion, un nouveau piège de rédemption, des litres de sang et une dernière mort à base d’acide bien dégueulasse. 68 millions de recettes, Lionsgate commence à faire la gueule…
… Mais se décide à faire un petit dernier histoire de se mettre à la 3D, voici donc ‘Saw : Chapitre Final’ Kramer n’est plus là depuis… fort longtemps et son esprit de montrer que la vie est belle aux gens perdure même si son protégé dénature cela en zigouillant à tout va et se lance dans un combat sans merci avec l’ex de Mr Puzzle… pendant ce temps-là un Monsieur J’ai Survécu – JE sors un livresur cette expérience tragique mais au combien spirituelle fait sa promo s’netourant d’autres survivants pour faire sa comm (et donc amasser un max de blé). D’ailleurs en parlant gros sous, petite comparaison d’avec le premier (remonter un peu la page) ce Saw 3D a coûté 20 millions et n’a engrengé que 130millions (à travers le monde !), ridicule !
... le jeu est terminé ! (.. enfin il se murmure qu’on pourrait éventuellement avoir droit à un huitième épisode, mais chut !)
Bon, vous avez survécu à tout ça, maintenant vous pouvez répondre à quelques questions : quel est votre Saw préféré ?! ou plutôt non, lequel est le plus mauvais ? Votre piège préféré?
Question subsidiaire : combien ai-je fait de jeux de mots ridicules en corrélation avec le film dans cette propa ?
En cette période Halloweenesque, il est bien un film qui va manquer (ou pas !) à l’affiche des cinémas cette année, lui qui rythmait la fête de la citrouille depuis 7 ans. C’est donc avec un brin de nostalgie ou…en fait je ne sais pas quelle idée m’a pris l’autre jour, peut-être un énième jour de pluie et une météo du même genre pour toute la semaine qui s’annonçait. C’est alors que je décidais d’enclencher mon marathon Saw : un film par jour, ça tombe bien, 7 films, 7 jours, pile une semaine de pluie… non parce que je n’allais pas pousser le vice à enchainer les visionnages à la suite, c’est un coup à devenir un dangereux psychopathe… ou être totalement lobotomisé, au choix.
Que la partie commence !
Ou comment un simple court-métrage de James Wan s’est ensuite transformé en long, premier opus qui restera le plus dans les mémoires de par son originalité, James Wan aux commandes de son bébé, rythmé par ses fameux traveling rotatif en accéléré, une ambiance délétére, une action qui se passe en huis-clos dans une pièce des plus beurk, avec à l’intérieur deux mecs enchainés - le super pote de James qui joue dans tous ses films (et aussi producteur de tous les autres opus qui ont suivi) et Cary Elwes que vous avez pu voir dans Hot Shots ou le Dracula de Coppola - pris au piège par un mystérieux serial-killer au doux nom de Jigsaw. Pendant ce temps-là dehors, un Danny Glover en inspecteur obsédé mène l’enquête pour démasquer le fameux tueur au puzzle. Personne ne dira rien à redire (je pense et j’espère) que ce film se suffisait à lui-même tellement il était abouti, le côté trash est suggéré, uniquement psychologique, pas d’images dégoutantes ou d’hémoglobine qui gicle de partout. Une vraie réussite, encensé par la critique et par le public !
L’année suivante arrive… la suite... et les années suivantes ses suites, appelons ça l'ère Bouseman !
Logique, quand on sort un film d’un million de dollars de budgets et qu’on ramasse 100 fois plus (rien que pour l’exploitation US), les maisons de prod sont obligés de faire pondre une suite ! Darren Lynn Bousman récupère les manettes de James Wan et commence à souiller à grand coup d’hectolitre de ketchup et scènes crados. Donnie ‘step by step’ Wahlberg et Diana Meyer (entre-aperçue dans le premier opus) reprennent l’enquête du tueur au puzzle jusqu’à le débusquer dans son repère. Donnie va faire les frais du dernier( ou pas !) plan de Jigsaw puisque son fils (qui a bien grandi et joue dans Scream 4 cette année) est aux premières loges aux côtés d’Amanda (unique survivante du fameux piège à ours inversé),Beverley ‘Seven Heaven’ Mitchell et d’autres sombres inconnus. Les pièges sont de plus en plus machiavéliques, tout du moins dérangeants, sanglants et/ou bien dégueus. Le dénouement final est plutôt bien joué à tel point que j’étais à deux doigts d’enclencher l’opus suivant…
… toujours réalisé par l’homme-bouse, un opus très irrégulier, qui commence avec plusieurs pièges indépendants (mouais bof, juste pour que ça tache bien !) avant d’amorcer un vrai jeu à plusieurs tiroirs (cheminement un peu plus psychologique mais des scènes bien dégueulasses quand même, y en a une en particulier qui m’aurait presque fait vomir si j’avais bu une vodka-martini de plus : je parle de celle des cochons pour les personnes qui sont allés jusqu’au 3), même si l’interprétation de Jeff est vraiment plus que moyenne, le côté je veux me venger, je vais ptêtre te pardonner mais je sais pas trop, devient très lassant, laisse les tous crever point barre merde ! Intéressantes aussi, les scènes transversales qui nous montre les préparatifs du jeu du premier film et nous raconte ce qu’il advient de l’inspecteur Matthews. Et un final qui aurait pu (dû ?) être le point final de la saga. CE troisième opus a tout de même été interdit au moins de 18 ans à sa sortie en salles, le seul de toute la saga.
Le dernier opus de l’ère Bousman (oui, nous sommes déjà un numéro quatre) se lance avec une splendide scène d’autopsie de John Kramer (aka Jigsaw), on découvre une cassette (qu’il a discrètement avalé dans l’opus précédent, mais si puisqu’on vous le dit, son deuxième surnom c’est gorge profonde !) dans son estomac. Après ça part un peu dans tous les sens, plusieurs hommes piègés dont la vie dépend des autres, et finalement on pousse le bouchon jusqu’à imbriquer cette histoire dans celle de l’opus précédent, et rajouter encore une enquête interne par des agents du FBI, houlala, ça va bien se passer… Heureusement qu’on éclaire notre lanterne sur les motivations de Kramer à répandre le bien (mal ?) autour de lui. Pas trop de scènes dégueulasses et on apprend donc que l’œuvre du jigsaw a trouvé un nouveau disciple (bah oui forcément Amanda aussi est morte !). Vous trouvez que c’est un peu tiré par les cheveux ?! Demandez-lui plutôt à elle
On refile le projet à l’ancien chef déco puis assistant réal de bas étage sous les ordres de Bousman, qui nous pond une histoire rien de bien folichon. L’agent du FBI a survécu (tout comme le dernier officier de police qui enquêtait) et pense savoir qui pris la relève de Jigsaw et va donc se mettre sur ses traces. Pendant ce temps-là, 5 personnes prises au piège tentent de survivre et on revoit Jigsaw qui enseigne les bonne manières à son protégé dans un flashback… c’est tout, 1h20 de film avec quand même deux fois la même séquence de 10min au début et à la fin du film… et un final en suspens qui laisse entrevoir donc une (énième !) suite (de trop !)
Ce qui à la base était un poisson d'avril sur Allociné, se transforme malheureusement en nouvelle suite du tueur de Strasbourg.. euh... tueur au puzzle. Donc on change encore de réal (le quatrième si vous avez bien suivi), mais c’est pas pour autant que ça va relever le niveau, le problème principal quand on se lance dans les suites de suites de suites de suites… heureusement que Kramer avait pas un chien, car on lui aurait sûrement donner le rôle du nouveau tueur au puzzle. D’ailleurs son protégé a du mal à faire diversion, un nouveau piège de rédemption, des litres de sang et une dernière mort à base d’acide bien dégueulasse. 68 millions de recettes, Lionsgate commence à faire la gueule…
… Mais se décide à faire un petit dernier histoire de se mettre à la 3D, voici donc ‘Saw : Chapitre Final’ Kramer n’est plus là depuis… fort longtemps et son esprit de montrer que la vie est belle aux gens perdure même si son protégé dénature cela en zigouillant à tout va et se lance dans un combat sans merci avec l’ex de Mr Puzzle… pendant ce temps-là un Monsieur J’ai Survécu – JE sors un livresur cette expérience tragique mais au combien spirituelle fait sa promo s’netourant d’autres survivants pour faire sa comm (et donc amasser un max de blé). D’ailleurs en parlant gros sous, petite comparaison d’avec le premier (remonter un peu la page) ce Saw 3D a coûté 20 millions et n’a engrengé que 130millions (à travers le monde !), ridicule !
... le jeu est terminé ! (.. enfin il se murmure qu’on pourrait éventuellement avoir droit à un huitième épisode, mais chut !)
Bon, vous avez survécu à tout ça, maintenant vous pouvez répondre à quelques questions : quel est votre Saw préféré ?! ou plutôt non, lequel est le plus mauvais ? Votre piège préféré?
Question subsidiaire : combien ai-je fait de jeux de mots ridicules en corrélation avec le film dans cette propa ?
dimanche 6 novembre 2011
Takeshi Kitano 1/3 by Viyanne
Si nous étions au Japon il y a un homme dont vous auriez tous entendu parler à moins de vivre en ermite dans une grotte.
Mais comme nous ne sommes pas au Japon c'est à moi que va revenir la dure tâche de vous faire découvrir ce curieux personnage qu'est Takeshi Kitano aussi connu sous le pseudonyme de Beat Takeshi.
Takeshi Kitano est né le 18 janvier 1947 (le même jour que ma maman donc, ce qui veut dire que c'est forcement quelqu'un de bien) près de Tokyo.
Il n'est rien de moins que :
- réalisateur et scénariste
- acteur
- animateur de télévision
- humoriste
- peintre et plasticien
- écrivain et poète
- chanteur
- designer de jeux-vidéo
- professeur à l'école universitaire de Tokyo
Il est aussi possesseur de sa propre société Office Kitano.
Voilà, vous avez donc compris qu'on a affaire à un sacré monstre des arts.
Takeshi Kitano commence sa carrière d'artiste en tant qu'acteur et comique.
C'est à la fin de ses études d'ingénieur qu'il est engagé comme réparateur d'ascenseur dans un théâtre.
C'est forcé de voir les comiques sur scène qu'il se découvrira une vocation mais aussi apprendra à l'exploiter grâce aux comiques sur scène.
Lorsque le comique régulier du théâtre tomba alors malade ce sera le début de la carrière de Kitano.
Il fondera ensuite un duo comique avec un de ses amis, les Two beats (d'où vient son pseudonyme Beat Takeshi, cela en 1972.
Ce pseudonyme d'ailleurs sera utilisé pour ses travaux plus drôles alors qu'il utilisera son nom pour ses rôles plus sérieux.
En 1976 ceux-ci passeront à la télévision japonaise et la reconnaissance du public arrivera rapidement.
Comment ont-ils obtenu cette reconnaissance ? Grâce à de petits sketchs satiriques appelés **manzai **, mais la particularité du duo est de s'aventurer sur des sujets délicats tels que les pauvres, les laids, les handicapés, les vieux, les cons et j'en passe. La provoc' ça a toujours payé c'est bien connu.
Tout ça c'est fort bien, ça vous situe le personnage mais passons à quelque chose qui nous intéresse plus, le cinemaaaaa.
Takeshi Kitano est tout d'abord acteur, et il incarne bien souvent des rôles de gangsters ou alors se retrouve dans des comédies.
Son jeu d'acteur est particulier, l'homme ne laisse bien souvent aucune expression sur son visage (fait qu'il explique lui-même de cette manière : "dans mes films et ceux des autres, j'essaie en général d'inhiber mes expressions faciales pour que le spectateur, suivant la situation, ressente ses propres émotions à travers mon personnage")
1989, tournant de sa vie d'acteur et de réalisateur : il est pris pour le rôle principal de Violent cop où il incarne un détective plutôt singulier... c'est alors que le réalisateur du film tombe malade... et que Kitano se propose pour le réaliser !
Il remanie fortement le scénario et fait de son personnage un anti héros, pari gagné, le film est un succès au Japon !
1990, Jugatsu, son 2eme film en tant que réalisateur et son premier en tant que scénariste, il y joue le rôle d'un gangster psychotique en quête de vengeance. Un film violent et a l'humour noir et un échec budgétaire...
C'est en 1993 avec Sonatine où il incarne un Yakuza qu'il sera reconnu du public international.
1997 nouveau succès avec Hana Bi, l'histoire d'un policier rongé qui entreprend un dernier voyage avec sa femme souffrante. Le film sera nominé au César, Lion d'or au festival de Venise, prix du meilleur film étranger, lors des Prix du cinéma européen, prix du meilleur film, lors des Kinema Junpo Awards et encore d'autres.
Remarquable rôle aussi bien que secondaire de Kitano, celui de Kitano justement dans Battle Royale.
L'année suivante il tourne Aniki, mon frère à Los Angeles où il incarne encore une fois un yakuza au côté d'Omar Epps dans le rôle d'un gangster.
Ensuite en 2003 il réalise Zaitochi où il incarne le personnage principal, un masseur aveugle dont les talents aux sabres ne laissent pas à désirer. Ce film devient son plus grand succès de manière nationale et internationale et reçoit d'ailleurs beaucoup de prix dont le Lion d'argent du festival de Venise.
En 2005 il réalise Takeshi's, en 2007 Glory to the Filmmaker et en 2008 Achille et la Tortue. Ces trois films forment une trilogie autobiographique sur Kitano, alliant humour, remise en question de l'auteur et burlesque.
Cette trilogie ne signifie cependant pas la fin de la carrière de Kitano et celui-ci le démontre en sortant en 2009 Outrage, films de Yakuzas encore où il est à nouveau en tête d'affiche.
Et toujours en rapport avec le cinéma il faut savoir que certains de ses romans ont même été adaptés à l'écran par d'autres réalisateurs.
Mais comme nous ne sommes pas au Japon c'est à moi que va revenir la dure tâche de vous faire découvrir ce curieux personnage qu'est Takeshi Kitano aussi connu sous le pseudonyme de Beat Takeshi.
Takeshi Kitano est né le 18 janvier 1947 (le même jour que ma maman donc, ce qui veut dire que c'est forcement quelqu'un de bien) près de Tokyo.
Il n'est rien de moins que :
- réalisateur et scénariste
- acteur
- animateur de télévision
- humoriste
- peintre et plasticien
- écrivain et poète
- chanteur
- designer de jeux-vidéo
- professeur à l'école universitaire de Tokyo
Il est aussi possesseur de sa propre société Office Kitano.
Voilà, vous avez donc compris qu'on a affaire à un sacré monstre des arts.
Takeshi Kitano commence sa carrière d'artiste en tant qu'acteur et comique.
C'est à la fin de ses études d'ingénieur qu'il est engagé comme réparateur d'ascenseur dans un théâtre.
C'est forcé de voir les comiques sur scène qu'il se découvrira une vocation mais aussi apprendra à l'exploiter grâce aux comiques sur scène.
Lorsque le comique régulier du théâtre tomba alors malade ce sera le début de la carrière de Kitano.
Il fondera ensuite un duo comique avec un de ses amis, les Two beats (d'où vient son pseudonyme Beat Takeshi, cela en 1972.
Ce pseudonyme d'ailleurs sera utilisé pour ses travaux plus drôles alors qu'il utilisera son nom pour ses rôles plus sérieux.
En 1976 ceux-ci passeront à la télévision japonaise et la reconnaissance du public arrivera rapidement.
Comment ont-ils obtenu cette reconnaissance ? Grâce à de petits sketchs satiriques appelés **manzai **, mais la particularité du duo est de s'aventurer sur des sujets délicats tels que les pauvres, les laids, les handicapés, les vieux, les cons et j'en passe. La provoc' ça a toujours payé c'est bien connu.
Tout ça c'est fort bien, ça vous situe le personnage mais passons à quelque chose qui nous intéresse plus, le cinemaaaaa.
Takeshi Kitano est tout d'abord acteur, et il incarne bien souvent des rôles de gangsters ou alors se retrouve dans des comédies.
Son jeu d'acteur est particulier, l'homme ne laisse bien souvent aucune expression sur son visage (fait qu'il explique lui-même de cette manière : "dans mes films et ceux des autres, j'essaie en général d'inhiber mes expressions faciales pour que le spectateur, suivant la situation, ressente ses propres émotions à travers mon personnage")
1989, tournant de sa vie d'acteur et de réalisateur : il est pris pour le rôle principal de Violent cop où il incarne un détective plutôt singulier... c'est alors que le réalisateur du film tombe malade... et que Kitano se propose pour le réaliser !
Il remanie fortement le scénario et fait de son personnage un anti héros, pari gagné, le film est un succès au Japon !
1990, Jugatsu, son 2eme film en tant que réalisateur et son premier en tant que scénariste, il y joue le rôle d'un gangster psychotique en quête de vengeance. Un film violent et a l'humour noir et un échec budgétaire...
C'est en 1993 avec Sonatine où il incarne un Yakuza qu'il sera reconnu du public international.
1997 nouveau succès avec Hana Bi, l'histoire d'un policier rongé qui entreprend un dernier voyage avec sa femme souffrante. Le film sera nominé au César, Lion d'or au festival de Venise, prix du meilleur film étranger, lors des Prix du cinéma européen, prix du meilleur film, lors des Kinema Junpo Awards et encore d'autres.
Remarquable rôle aussi bien que secondaire de Kitano, celui de Kitano justement dans Battle Royale.
L'année suivante il tourne Aniki, mon frère à Los Angeles où il incarne encore une fois un yakuza au côté d'Omar Epps dans le rôle d'un gangster.
Ensuite en 2003 il réalise Zaitochi où il incarne le personnage principal, un masseur aveugle dont les talents aux sabres ne laissent pas à désirer. Ce film devient son plus grand succès de manière nationale et internationale et reçoit d'ailleurs beaucoup de prix dont le Lion d'argent du festival de Venise.
En 2005 il réalise Takeshi's, en 2007 Glory to the Filmmaker et en 2008 Achille et la Tortue. Ces trois films forment une trilogie autobiographique sur Kitano, alliant humour, remise en question de l'auteur et burlesque.
Cette trilogie ne signifie cependant pas la fin de la carrière de Kitano et celui-ci le démontre en sortant en 2009 Outrage, films de Yakuzas encore où il est à nouveau en tête d'affiche.
Et toujours en rapport avec le cinéma il faut savoir que certains de ses romans ont même été adaptés à l'écran par d'autres réalisateurs.
Videodrome de David Cronenberg by Jim
« Television is reality, and reality is less than television »
En novembre 2011, tout le monde parlera du nouveau film de David Cronenberg, A Dangerous Method, basé sur le livre éponyme de John Kerr qui raconte les débuts houleux de la psychanalyse sous l’égide de Sigmund Freud et de Carl Jung.
Si Cronenberg a laissé tomber – partiellement dirons nous - dans cette dernière décennie son amour du gore, de l’horreur, c’est au profit de son affection pour les côtés psychologiques des histoires qu’il raconte : depuis les années nonante, et depuis plus particulièrement Crash en 1996, la dimension psychique est omniprésente dans l’œuvre de Cronenberg. A Dangerous Method consisterait donc, d’après les premières images et les premiers commentaires des acteurs, en un film psychanalytique sur la psychanalyse, un programme tout en noirceur et en névrose, puisque les thèmes fétiches de Cronenberg s’articulent parfaitement dans le film : le sexe, la mort et les pathologies psychologiques composent le propos général de ce long-métrage.
Et pourtant, si certains s’époumonent à déclarer que ce film sera le millésime de Cronenberg, il est de la responsabilité des autres de mettre en lumière les dix-huit films précédents du cinéaste canadien, et de souligner l’importance, encore aujourd’hui, de Videodrome, un des films les plus engagés sociologiquement, psychologiquement, politiquement, de David Cronenberg.
A l’époque de Videodrome, en 1983, David Cronenberg n’est pas encore très connu : il faudra attendre 1986 avec The Fly pour que le metteur en scène soit une référence dans son registre : celui qui mêle le sexe, la mort, la violence, la métamorphose, la psycho(patho)logie, l’horreur et la société.
Videodrome orchestre parfaitement ces différents thèmes pour proposer une vision unique de l’homme, de sa place dans la société moderne, et le film est d’autant plus important qu’il contient un message prophétique sur notre utilisation des technologies, et plus particulièrement de la télévision (qu’on peut étendre aujourd’hui à internet), qui, pour résumer, nous transforme plus que nous la transformons en retour. De plus, du début à la fin du film, on peut voir se dessiner une intention : celle de déconstruire nos idées sur ce médium. At last but not least, le personnage principal, interprété avec brio par James Woods, est une sorte d’anti-héros cynique, drogué aux images violentes et sexuelles, qui se joue des mœurs de la société. Videodrome ne présente que des aspects pervers de la télévision, de la conception des programmes à l’internalisation chez le sujet de ce qu’il regarde. Un prétexte de Cronenberg pour nous amener vers la métamorphose : physique, mais aussi philosophique puisqu’on nous pose cette simple question : est-ce que le virtuel est plus réel que le réel lui-même ?
Décrire par un vulgaire synopsis Videodrome ne servirait à rien : ça casserait même la « magie » de ce film controversé, osé, sévèrement burné, à l’image de son personnage principal, Max Renn, le propriétaire d’une chaîne de télévision qui ne diffuse que des vidéos, des séquences, des émissions, ayant trait à une sexualité brutale, à des scènes de violence. Max Renn, à l’aube des années quatre-vingt est le symbole de cette génération qui recherche un sens au-delà du marasme ambiant : Dieu, la patrie, la nation, les bonnes intentions ont été remplacées par l’Absurde (qui s’exprime de sa meilleure façon au travers de cette société de consommation dont le simple but est de se gaver de matérialisme pour palier au manque de valeur de l’existence). Et cette absurdité régnante se traduit par le non-sens dans lequel nous vivons : la télévision est envisagée comme un sens, un symbole réconfortant bourré d’images agréables, d’avis, de connaissances. Cette place est aujourd’hui occupée par internet : un rêve imaginé dans un but des plus philanthropiques, didactiques, mais qui connaît des effets pervers. Dans les années quatre-vingt, la télévision fait office de sens de secours pour l’humanité : une multitude d’émissions croissent et pullulent, dans le simple but de rassasier les hommes.
Et comme tout a perdu son sens en soi, la télévision peut faire ce qu’elle veut, peut tout montrer, tout oser : ainsi, la chaîne de Max Renn offre une catharsis, un déchargement immédiat de pulsions de mort, de destruction, grâce à ses programmes ultra-violents.
Mais l’inattendu doit toujours surgir dans une histoire pour épicer les affaires, et c’est là qu’intervient Videodrome, un programme étrange où la torture est la seule monnaie courante. Et si le marquis de Sade n’aurait sans doute pour rien au monde manqué Videodrome, Max Renn, l’obsédé, le sadique, le pervers, en est lui-même effrayé dès que l’idée que le programme serait un snuff movie lui vient à l’esprit.
De son début à sa fin, Videodrome est une hallucination collective, comme la télévision finalement: une aliénation qui fait perdre pied, qui entrave la réalité, ou, qui, justement rétablit l’exactitude. Et pour aller même encore plus loin, Videodrome se moque de nous, petits spectateurs, pour nous glisser d’une voix frigorifiée à l’oreille une question primordiale, à savoir celle-ci : « est-ce que le réel est une illusion ou est-ce le leurre qui fait office de vérité ? ». Aujourd’hui, c’est l’ordinateur le personnage principal de notre vie : nous l’allumons chaque jour, nous avons besoin de lui pour savoir ce qui se passe dans le monde, nous transitons par son écran pour avoir accès à nos propres petites obsessions : pornographie et violence sont plébiscitées et exaucent les prières virtuelles que nous faisons. Internet contient une multitude de données, auxquelles nous avons facilement accès, et grâce à elles, nous pouvons par exemple mener une vie virtuelle, vivre, participer à une hallucination collective en définitive. Et si Internet était, comme la télévision autrefois, une gigantesque illusion à laquelle nous participons tous gentiment sans nous rendre compte de quoi que ce soit ?
Faire Videodrome était un risque, un pari. Il fallait oser le sadomasochisme de Deborah Harry (Blondie), les scènes gores de métamorphose, le message politique, et bien sûr, l’inévitable James Woods sur qui on pourrait écrire des thèses à cause de son charisme, de sa façon d’être, d’évoluer dans des rôles malsains. Parce que même si Max Renn est l’anti-héros, on ne peut s’empêcher de se prendre d’affection de lui, de le trouver brillant, empreint d’un magnétisme puissant et de souhaiter qu’il ne sombre pas complètement dans la folie, ou pire, la mort. Videodrome n’était pas le premier film de David Cronenberg, et pourtant, avec ce film, Cronenberg s’inscrit dans une perspective kafkaïenne (le thème de la métamorphose, exploité par exemple d’une façon plus importante dans The Fly), psychologique (ses films oscillent entre des personnages qui présentent des altérations d’un mode psychique sain), et sociologique (ses films comportent un message sur la société dans laquelle nous évoluons).
Videodrome est une référence et un film qui mérite d’être vu et apprécié, pour lui-même. Et aux vilaines langues qui répliqueront que les effets spéciaux ont mal vieilli, on peut rétorquer que premièrement, le film date de 1983, et deuxièmement, les grands films qui contiennent une transcendance certaine n’ont pas besoin d’effets spéciaux parfaits pour délivrer leur message.
« After all, there is nothing real outside our perception of reality, is there? »
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En novembre 2011, tout le monde parlera du nouveau film de David Cronenberg, A Dangerous Method, basé sur le livre éponyme de John Kerr qui raconte les débuts houleux de la psychanalyse sous l’égide de Sigmund Freud et de Carl Jung.
Si Cronenberg a laissé tomber – partiellement dirons nous - dans cette dernière décennie son amour du gore, de l’horreur, c’est au profit de son affection pour les côtés psychologiques des histoires qu’il raconte : depuis les années nonante, et depuis plus particulièrement Crash en 1996, la dimension psychique est omniprésente dans l’œuvre de Cronenberg. A Dangerous Method consisterait donc, d’après les premières images et les premiers commentaires des acteurs, en un film psychanalytique sur la psychanalyse, un programme tout en noirceur et en névrose, puisque les thèmes fétiches de Cronenberg s’articulent parfaitement dans le film : le sexe, la mort et les pathologies psychologiques composent le propos général de ce long-métrage.
Et pourtant, si certains s’époumonent à déclarer que ce film sera le millésime de Cronenberg, il est de la responsabilité des autres de mettre en lumière les dix-huit films précédents du cinéaste canadien, et de souligner l’importance, encore aujourd’hui, de Videodrome, un des films les plus engagés sociologiquement, psychologiquement, politiquement, de David Cronenberg.
A l’époque de Videodrome, en 1983, David Cronenberg n’est pas encore très connu : il faudra attendre 1986 avec The Fly pour que le metteur en scène soit une référence dans son registre : celui qui mêle le sexe, la mort, la violence, la métamorphose, la psycho(patho)logie, l’horreur et la société.
Videodrome orchestre parfaitement ces différents thèmes pour proposer une vision unique de l’homme, de sa place dans la société moderne, et le film est d’autant plus important qu’il contient un message prophétique sur notre utilisation des technologies, et plus particulièrement de la télévision (qu’on peut étendre aujourd’hui à internet), qui, pour résumer, nous transforme plus que nous la transformons en retour. De plus, du début à la fin du film, on peut voir se dessiner une intention : celle de déconstruire nos idées sur ce médium. At last but not least, le personnage principal, interprété avec brio par James Woods, est une sorte d’anti-héros cynique, drogué aux images violentes et sexuelles, qui se joue des mœurs de la société. Videodrome ne présente que des aspects pervers de la télévision, de la conception des programmes à l’internalisation chez le sujet de ce qu’il regarde. Un prétexte de Cronenberg pour nous amener vers la métamorphose : physique, mais aussi philosophique puisqu’on nous pose cette simple question : est-ce que le virtuel est plus réel que le réel lui-même ?
Décrire par un vulgaire synopsis Videodrome ne servirait à rien : ça casserait même la « magie » de ce film controversé, osé, sévèrement burné, à l’image de son personnage principal, Max Renn, le propriétaire d’une chaîne de télévision qui ne diffuse que des vidéos, des séquences, des émissions, ayant trait à une sexualité brutale, à des scènes de violence. Max Renn, à l’aube des années quatre-vingt est le symbole de cette génération qui recherche un sens au-delà du marasme ambiant : Dieu, la patrie, la nation, les bonnes intentions ont été remplacées par l’Absurde (qui s’exprime de sa meilleure façon au travers de cette société de consommation dont le simple but est de se gaver de matérialisme pour palier au manque de valeur de l’existence). Et cette absurdité régnante se traduit par le non-sens dans lequel nous vivons : la télévision est envisagée comme un sens, un symbole réconfortant bourré d’images agréables, d’avis, de connaissances. Cette place est aujourd’hui occupée par internet : un rêve imaginé dans un but des plus philanthropiques, didactiques, mais qui connaît des effets pervers. Dans les années quatre-vingt, la télévision fait office de sens de secours pour l’humanité : une multitude d’émissions croissent et pullulent, dans le simple but de rassasier les hommes.
Et comme tout a perdu son sens en soi, la télévision peut faire ce qu’elle veut, peut tout montrer, tout oser : ainsi, la chaîne de Max Renn offre une catharsis, un déchargement immédiat de pulsions de mort, de destruction, grâce à ses programmes ultra-violents.
Mais l’inattendu doit toujours surgir dans une histoire pour épicer les affaires, et c’est là qu’intervient Videodrome, un programme étrange où la torture est la seule monnaie courante. Et si le marquis de Sade n’aurait sans doute pour rien au monde manqué Videodrome, Max Renn, l’obsédé, le sadique, le pervers, en est lui-même effrayé dès que l’idée que le programme serait un snuff movie lui vient à l’esprit.
De son début à sa fin, Videodrome est une hallucination collective, comme la télévision finalement: une aliénation qui fait perdre pied, qui entrave la réalité, ou, qui, justement rétablit l’exactitude. Et pour aller même encore plus loin, Videodrome se moque de nous, petits spectateurs, pour nous glisser d’une voix frigorifiée à l’oreille une question primordiale, à savoir celle-ci : « est-ce que le réel est une illusion ou est-ce le leurre qui fait office de vérité ? ». Aujourd’hui, c’est l’ordinateur le personnage principal de notre vie : nous l’allumons chaque jour, nous avons besoin de lui pour savoir ce qui se passe dans le monde, nous transitons par son écran pour avoir accès à nos propres petites obsessions : pornographie et violence sont plébiscitées et exaucent les prières virtuelles que nous faisons. Internet contient une multitude de données, auxquelles nous avons facilement accès, et grâce à elles, nous pouvons par exemple mener une vie virtuelle, vivre, participer à une hallucination collective en définitive. Et si Internet était, comme la télévision autrefois, une gigantesque illusion à laquelle nous participons tous gentiment sans nous rendre compte de quoi que ce soit ?
Faire Videodrome était un risque, un pari. Il fallait oser le sadomasochisme de Deborah Harry (Blondie), les scènes gores de métamorphose, le message politique, et bien sûr, l’inévitable James Woods sur qui on pourrait écrire des thèses à cause de son charisme, de sa façon d’être, d’évoluer dans des rôles malsains. Parce que même si Max Renn est l’anti-héros, on ne peut s’empêcher de se prendre d’affection de lui, de le trouver brillant, empreint d’un magnétisme puissant et de souhaiter qu’il ne sombre pas complètement dans la folie, ou pire, la mort. Videodrome n’était pas le premier film de David Cronenberg, et pourtant, avec ce film, Cronenberg s’inscrit dans une perspective kafkaïenne (le thème de la métamorphose, exploité par exemple d’une façon plus importante dans The Fly), psychologique (ses films oscillent entre des personnages qui présentent des altérations d’un mode psychique sain), et sociologique (ses films comportent un message sur la société dans laquelle nous évoluons).
Videodrome est une référence et un film qui mérite d’être vu et apprécié, pour lui-même. Et aux vilaines langues qui répliqueront que les effets spéciaux ont mal vieilli, on peut rétorquer que premièrement, le film date de 1983, et deuxièmement, les grands films qui contiennent une transcendance certaine n’ont pas besoin d’effets spéciaux parfaits pour délivrer leur message.
« After all, there is nothing real outside our perception of reality, is there? »
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